OTTAWA — Le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, implore Ottawa d’arrêter «les critères, les paramètres, les tergiversations» au chapitre de l’accueil d’Ukrainiens fuyant la guerre, une sortie qui rejoint la position du Nouveau Parti démocratique (NPD).
«Lorsque les gens sont exposés à recevoir des bombes, lorsque des gens plient bagage avec un balluchon et leurs biens personnels dans une vieille poussette pour sortir de l’Ukraine, tu ne leur demandes pas de faire des tests biométriques, tu ne leur demandes pas de remplir des papiers de visas», a lancé mardi M. Blanchet en mêlée de presse.
Ottawa s’est engagé à traiter en priorité les dossiers de ceux qui fuient l’Ukraine. Le gouvernement Trudeau a aussi annoncé au début mars qu’il mettait sur pied une procédure simplifiée pour l’accueil d’Ukrainiens souhaitant venir au Canada.
La ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, a souligné mardi que ce programme, l’Autorisation de voyage d’urgence Canada-Ukraine, entrera en vigueur jeudi, soit deux semaines plus tard.
«Pour faire en sorte que les réfugiés viennent, il faut, au départ, qu’ils postulent à nos programmes, a déclaré Mme Joly. Donc on va ouvrir le programme. Ils vont pouvoir postuler et après on va pouvoir travailler avec les gens qui sont intéressés à venir au Canada.»
Cette voie d’accès ne signifie pas que toutes exigences de visa et de vérifications préalables à l’arrivée d’Ukrainiens sont levées.
En guise d’explication, le ministre Fraser avait indiqué que le recours aux mesures biométriques vise à filtrer certaines demandes pour protéger le Canada de ce «risque de sécurité».
Le gouvernement veut notamment éviter d’accueillir des gens «comme ceux qui ont appuyé et ont combattu l’armée ukrainienne dans les huit dernières années dans le Donbass et d’autres qui travaillent contre les Ukrainiens et aident les troupes russes».
Selon le chef bloquiste, les tests de sécurité pourraient être réalisés à l’arrivée sur le territoire, «comme ça s’est fait dans le passé». Il juge que l’argument du ministre pour justifier son «obstination» est «farfelu».
Au NPD, le chef adjoint Alexandre Boulerice estime que l’argumentaire du gouvernement ressemble «à une excuse pour ne pas agir et ne pas agir plus rapidement».
«Ceux qui fuient les combats ne sont pas des combattants pro-Poutine et pro-Russes. Ceux qui fuient les bombes en ce moment, ce sont des femmes et des enfants qui arrivent à la frontière de la Roumanie, de la Moldavie, de la Pologne», a-t-il dit en entrevue avec La Presse Canadienne.
Il a rappelé du même souffle que sa formation politique demande aussi, depuis des semaines, une suspension temporaire de l’obligation de visas pour les résidents ukrainiens, de même que les tests de sécurité et de biométrie soient effectués à l’arrivée en sol canadien.
«Il y a des gens qui fuient, des gens qui meurent, des gens qui sont blessés et Ottawa dit »Non, il va falloir voir (avec) le programme » et il y a encore beaucoup d’incertitudes en ce qui concerne l’accueil de réfugiés au Canada.»
De l’avis de M. Blanchet, le gouvernement du Canada saisit mal l’urgence de la situation et devrait mettre en place de toute urgence une «navette humanitaire», soit des vols nolisés pour récupérer tous ceux qui veulent fuir l’Ukraine, peu importe leur destination finale.
«Ce n’est pas une opération d’immigration, c’est une opération de sauvetage, a-t-il soutenu. Il faut sauver des vies de réfugiés ukrainiens.»
Appelé à réagir aux critiques du chef bloquiste, le bureau du ministre Fraser a évité de répondre directement.
«Nous sommes en pourparlers avec nos partenaires, y compris les provinces et les territoires, le milieu des affaires, la communauté canado-ukrainienne et les organismes d’établissement, sur la meilleure façon de soutenir les personnes qui arrivent d’Ukraine», a-t-on déclaré par courriel.
On a également souligné que plus de 8500 ressortissants ukrainiens sont arrivés au Canada à travers les voies d’accès et les programmes déjà existants.
«Nous continuerons de surveiller de près les volumes de voyageurs et leurs besoins et prendrons les mesures nécessaires», plaide le cabinet du ministre.
Les conservateurs n’ont pas répondu mardi à une demande de commentaire de La Presse Canadienne.