OTTAWA — Il n’y a jamais eu autant de nouveaux véhicules électriques qui ont pris la route au Canada que l’année dernière, mais cette croissance est loin d’être comparable à ce qui se passe en Europe.
Selon Statistique Canada, plus de 65 000 nouvelles voitures entièrement électriques ou hybrides rechargeables ont été immatriculées au cours des neuf premiers mois de 2021, contre 38 000 en 2020.
Il y a également eu plus de nouvelles immatriculations de véhicules électriques en seulement neuf mois l’an dernier qu’au cours d’une année complète auparavant.
Mais les véhicules électriques au Canada ne représentaient encore que 5 % des immatriculations de voitures particulières, bien en deçà de l’objectif du gouvernement fédéral d’une nouvelle immatriculation sur deux d’ici 2030, et la totalité d’ici 2035. Cela inclut les véhicules à batterie uniquement, hybrides rechargeables et à pile à combustible à hydrogène.
Aux yeux de la gestionnaire de programme chez Clean Energy Canada, Joanna Kyriazis, la croissance du marché canadien des véhicules électriques est une bonne nouvelle, mais elle ne suit pas le rythme de l’Europe.
Il y a deux ans, la part de marché des nouveaux véhicules électriques au Canada était de 3 %, à égalité avec la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni. Mais l’année dernière, ces véhicules représentaient environ 17 % des nouvelles immatriculations au Royaume-Uni et en France, et plus de 25 % en Allemagne.
«Ils ont donc commencé au même endroit que le Canada en 2019 et en deux ans, ils ont vu les ventes monter en flèche», a analysé Mme Kyriazis.
«J’espère donc que le Canada est sur le point de connaître le même type de croissance exponentielle des ventes de véhicules électriques si nous pouvons contourner les problèmes d’approvisionnement.»
Mme Kyriazis soutient que la demande au Canada est forte, citant un récent sondage réalisé par Clean Energy Canada qui a révélé que 80 % des Canadiens étaient disposés à acheter une voiture électrique avant la récente flambée des prix de l’essence.
Le problème reste la disponibilité, fait-elle valoir.
«Les faibles niveaux d’inventaire font que les concessionnaires ne peuvent pas suivre et les conducteurs canadiens attendent non seulement des mois, mais dans certains cas des années, pour mettre la main sur un nouveau véhicule électrique», a-t-elle exposé.
Le ministre de l’Environnement, Steven Guilbeault, mène actuellement des consultations sur la meilleure façon d’atteindre les objectifs d’ici 2035, y compris un système de quotas de vente obligatoires de véhicules électriques similaire à ceux qui existent déjà depuis 2018 au Québec et depuis 2020 en Colombie-Britannique..
Les concessionnaires qui ne vendent pas une proportion suffisante de véhicules zéro émission s’exposent à des sanctions financières.
Mme Kyriazis a déclaré que les quotas de vente sont un élément essentiel de la solution, car ils obligent les constructeurs automobiles à ajuster leur production et leur distribution de véhicules. Selon elle, le ministre Guilbeault doit adopter une telle mesure à l’échelle nationale.
Dans une déclaration écrite lundi, M. Guilbeault a indiqué que le gouvernement restait déterminé à le faire.
Trois véhicules électriques sur quatre immatriculés au Canada l’année dernière ont été vendus en Colombie-Britannique et au Québec. Mme Kyriazis croit que les quotas en sont responsables, car ils obligent les constructeurs automobiles à expédier la plupart des véhicules électriques disponibles aux concessionnaires de ces provinces.
Le Québec et la Colombie-Britannique offrent également leurs propres rabais qui s’ajoutent à l’aide financière du fédéral pour les achats de voitures électriques neuves.
Le président de l’Association canadienne des constructeurs de véhicules (ACCV), Brian Kingston, a déclaré que les constructeurs automobiles croient que les rabais, et non les quotas de vente, sont ce qui fait la différence.
«Nous ne voyons aucune preuve que les ventes obligatoires ou les quotas de véhicules zéro émission ont un impact sur la demande, a-t-il soutenu. En Colombie-Britannique et au Québec, nous avons constaté une hausse au moment où l’incitatif (monétaire) a été mis en place.»
En Ontario, lorsque le gouvernement progressiste-conservateur nouvellement élu a supprimé un remboursement provincial en 2018, les ventes ont chuté. Au printemps dernier, lorsque l’Île-du-Prince-Édouard et le Nouveau-Brunswick ont instauré un rabais, les ventes de voitures électriques ont commencé à grimper.
La Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve-et-Labrador ont également lancé des programmes de remise l’année dernière, mais leurs statistiques de ventes de voiture électrique ne sont pas déclarées individuellement par Statistique Canada.
L’ACCV fait pression sur le gouvernement fédéral, avant le prochain budget, pour qu’il triple le montant des remises à l’achat de véhicules électriques offertes aux consommateurs canadiens.
Par contre, l’association demande à Ottawa de renoncer à l’idée d’introduire des quotas qui obligeraient les concessionnaires à vendre un nombre minimum de voitures électriques, sous peine de redevances.