Une vigile salue la libération de Raif Badawi, mais déplore son interdit de voyage

Pierre Saint-Arnaud, La Presse Canadienne
Une vigile salue la libération de Raif Badawi, mais déplore son interdit de voyage

MONTRÉAL — Une trentaine de personnes ont tenu une vigile à Montréal jeudi à la fois pour saluer la libération du blogueur saoudien Raif Badawi et demander à l’Arabie saoudite de le laisser quitter le pays.

Raif Badawi a été libéré le 11 mars dernier, mais il est toujours frappé d’une interdiction de quitter le pays pour 10 ans, et ce, même si son épouse Ensaf Haidar et ses enfants sont ici au Québec. Il a également été condamné à une amende de 1 million de riyals, soit l’équivalent d’environ 340 000 $ CAN.

«C’est un peu une célébration, mais en demi-teintes. Il est libéré, il n’aura pas reçu l’entièreté des coups de fouet. C’était quand même 1000 coups de fouet, ce n’est pas rien. Il en a reçu 50, ce n’est pas rien non plus», a déclaré France-Isabelle Langlois, directrice générale d’Amnistie internationale Canada, en s’adressant au petit groupe.

Le comédien Paul Ahmarani, qui a aussi pris la parole, a dit avoir tenté, comme c’est son métier de le faire, de se mettre dans la peau de Raif Badawi, «mais j’ai tout de suite arrêté. Je suis aussi un mari, un père de deux jeunes filles de 15 ans et d’être arraché de force à ceux qu’on aime pendant 10 ans, c’était trop dur à imaginer.»

L’Arabie saoudite: «une prison en soi»

«Le combat n’est pas terminé, parce que l’Arabie saoudite est une prison en soi», a pour sa part rappelé la comédienne Geneviève Rochette, aussi présente à la vigile. 

Mme Langlois a tout de même fait part d’un certain espoir: «Le roi d’Arabie saoudite a confirmé qu’il était interdit de sortie pour 10 ans, sauf dans le cas où une grâce royale serait prononcée. Il a mentionné la possibilité de la grâce royale et c’est bientôt le début du ramadan et c’est une occasion souvent pour qu’il y ait des grâces royales ou présidentielles.»

Cependant, a-t-elle précisé, l’organisme n’entend pas pousser de façon désordonnée pour réclamer cette grâce. «On continue de se mobiliser sans faire de trop gros coups d’éclat parce qu’on ne veut pas non plus nuire, avoir l’effet inverse. C’est aussi à Raif et à Ensaf, son épouse, ses enfants, de nous dire ce qu’ils attendent de nous, le soutien qu’ils attendent de nous, jusqu’où on doit aller.»

Une ouverture de façade

En entrevue avec La Presse Canadienne, la responsable de campagne d’Amnistie internationale, Colette Lelièvre, a rappelé que l’Arabie saoudite tente de redorer son blason.

«L’Arabie saoudite dit depuis plusieurs années qu’ils veulent changer l’image de leur pays, qu’ils veulent s’ouvrir au monde, qu’ils veulent changer les lois à l’intérieur de leur pays, qu’il va y avoir des réformes. Amnistie internationale considère que, oui, c’est super les réformes, mais il faut encore les mettre en oeuvre et qu’on respecte les droits humains.

«S’ils veulent démontrer au reste du monde qu’ils veulent s’ouvrir et qu’ils veulent montrer un visage plus clément, le geste à faire sera de permettre à Raif de sortir du pays, lui et tous les autres prisonniers et prisonnières qui sont dans la même situation que Raif, parce qu’il n’est pas le seul», a-t-elle ajouté.

Il faut dire cependant, que le royaume n’a montré aucun signe de clémence dans le cas de Raif Badawi, si ce n’est que d’interrompre les flagellations. Après les premiers 50 coups de fouet, l’état de santé du prisonnier s’était considérablement détérioré et il semble acquis que les autorités ne voulaient pas en faire un martyr. Cependant, aucune clémence n’a été accordée sur sa peine. Au contraire, il a été libéré deux semaines après l’expiration des 10 ans imposés.

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