Hydrogène vert: le Québec doit «capitaliser maintenant»

Stéphane Blais, La Presse Canadienne
Hydrogène vert: le Québec doit «capitaliser maintenant»

TROIS-RIVIÈRES, Qc — Le Québec doit rapidement saisir l’occasion qu’offre l’hydrogène vert, selon le professeur Bruno Pollet, qui vient d’être nommé directeur de la nouvelle chaire de recherche sur l’hydrogène de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR).

Bruno Pollet est à la tête de la Chaire Innergex, un nouveau centre de recherche sur la production renouvelable d’hydrogène, financé par l’entreprise québécoise Innergex énergie renouvelable et le gouvernement du Québec.

Lors de l’annonce du nouveau centre à l’UQTR, jeudi, le professeur a expliqué que la crise énergétique qui secoue plusieurs pays européens qui cherchent à ne plus dépendre du pétrole russe est une occasion de mettre les bouchées doubles et d’accélérer le développement de la filière de l’hydrogène vert.

«Il faut vraiment capitaliser maintenant. Avec la crise énergétique, il est temps de bien se positionner sur la production d’hydrogène vert, de l’utiliser ici au Canada et au Québec, mais aussi éventuellement de l’exporter en Europe où ils en ont besoin. Nous devons être là pour les aider à faire face à la crise énergétique et réussir leur transition énergétique.»

Il a fait valoir que «des compagnies produisent déjà de l’hydrogène au Québec», en faisant référence notamment à Air Liquide Canada à Bécancour, «et que la filière peut se développer très rapidement».

La chaire de recherche de l’UQTR, dont le financement est assuré par Innergex (625 000 $) et le gouvernement du Québec (450 000 $), développera des électrolyseurs, des instruments qui permettent l’électrolyse de l’eau, donc la séparation de la molécule d’eau grâce à un courant électrique, afin de générer de l’hydrogène et de l’oxygène.

Actuellement les électrolyseurs sont dispendieux, notamment parce qu’ils sont fabriqués avec des métaux rares, comme le platine et l’iridium, qui proviennent de pays étrangers.

L’équipe de Bruno Pollet compte remplacer ces métaux par «des éléments plus disponibles, abordables et stratégiques pour le Canada», et il souhaite «déployer sur le marché des systèmes dans trois, quatre, cinq ans» qui «coûteront 30 % moins cher».

Le chercheur a souligné que l’objectif est également de participer au développement de la filière québécoise et canadienne, «de l’extraction des métaux à la production d’électrolyseurs et de l’hydrogène vert».

L’hydrogène vert sera complémentaire

Pour le ministre de l’Économie et de l’Innovation, Pierre Fitzgibbon, qui a participé à la conférence de presse de jeudi à l’UQTR, l’hydrogène vert aura une place complémentaire à l’hydroélectricité dans l’avenir énergétique du Québec, mais actuellement, le coût de production est encore élevé.

«Quand on regarde les transports, ils sont responsables de 44 % des GES, mais on ne peut pas électrifier tous les transports, alors on peut utiliser l’hydrogène vert pour les transports lourds comme les bateaux, les trains et les camions», a-t-il dit.

Le ministre a expliqué que l’hydrogène vert pourrait également décarboner les industries lourdes comme les aciéries et les alumineries, responsables de 11 % des GES.

«Les investissements dans l’hydrogène vert pourraient être très importants, on ne fait que commencer, mais l’un des enjeux présentement, c’est que le coût de production de l’hydrogène vert est de loin supérieur à l’hydrogène bleu ou l’hydrogène gris.»

Hydrogène vert, bleu, gris

L’hydrogène est considéré comme une façon d’éliminer les émissions de carbone des secteurs difficiles à électrifier. Ce gaz brûle sans émissions et peut être produit à l’aide de l’énergie éolienne, solaire ou l’hydroélectricité — on l’appelle alors «hydrogène vert». Il peut aussi être produit en extrayant le carbone de combustibles fossiles comme le gaz naturel, après quoi ce carbone est stocké sous terre — on parle alors d’«hydrogène bleu». L’hydrogène gris (95 % de l’hydrogène consommé dans le monde) est fabriqué à partir d’énergies fossiles, et le Co2 qu’il émet n’est pas stocké sous terre.

Le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles, Jonatan Julien, a déclaré que les recherches menées à l’UQTR permettront «de faire un pas de géant» dans l’expertise du Québec dans l’hydrogène vert.

«La transition vers une économie plus sobre en carbone passe nécessairement par une utilisation accrue d’énergies renouvelables, comme l’hydrogène vert. Collectivement, on doit saisir cette occasion pour développer notre expertise dans ce domaine et intégrer davantage cette nouvelle forme d’énergie», a indiqué le ministre dans un communiqué.

Le plan stratégique du gouvernement concernant l’hydrogène vert doit être annoncé ce printemps.

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