Un technicien a vu sa vie basculer dans la drogue après l’attentat du Métropolis

Morgan Lowrie, La Presse Canadienne
Un technicien a vu sa vie basculer dans la drogue après l’attentat du Métropolis

MONTRÉAL — Un technicien qui a été témoin de la fusillade mortelle de la nuit des élections québécoises de 2012 a témoigné mercredi dans le cadre d’une poursuite alléguant que la police de Montréal et la Sûreté du Québec n’avaient pas correctement sécurisé l’événement.

Le traumatisme d’avoir vu son ami proche atteint par balle a fait basculer sa vie dans la consommation de drogues dures, a raconté au tribunal Jonathan Dubé. 

Quatre travailleurs de la salle de concert où la fusillade du 4 septembre 2012 a eu lieu, poursuivent la Ville de Montréal et le Procureur général du Québec pour un total de plus de 600 000 $, alléguant qu’ils ont souffert de stress post-traumatique et d’autres dommages psychologiques à la suite de cet événement.

Le tireur Richard Henry Bain a été reconnu coupable en 2016 d’un chef de meurtre au deuxième degré et de trois chefs de tentative de meurtre après la fusillade à l’extérieur d’une salle de concert, autrefois nommée le Métropolis, alors que la première ministre élue de l’époque, Pauline Marois, prononçait un discours de victoire.

Le technicien en éclairage Denis Blanchette a été tué dans l’attaque et un deuxième technicien, David Courage, a été blessé après avoir été touché par la même balle.

Le recours judiciaire, qui a été déposé en mars 2019, indique que les plaignants ont connu «des périodes de dépression et de dépendance à l’alcool et/ou aux drogues et ont ressenti des sentiments de honte et de culpabilité» résultant du traumatisme.

Jonathan Dubé ne s’est jamais remis de la mort de son ami proche, affirme la poursuite. À la barre, M. Dubé a évoqué sa rechute dans la consommation de drogues dures survenue à la suite de l’événement, après plusieurs années de sobriété.

Alors qu’il a commencé avec la kétamine, il s’est ensuite tourné vers la consommation d’héroïne, qu’il a décrite comme la «plus grande bataille de (sa) vie».

Il a dû être hospitalisé quelques mois après sa rechute et il a bénéficié de l’aide sociale la plupart du temps depuis l’attentat du Métropolis, a relaté M. Dubé.

De «jovial» à «ermite»

Plus tard, deux de ses amis ont témoigné que sa personnalité avait complètement changé à la suite de l’événement.

Audrey Bissonnette, une ancienne voisine, a affirmé qu’il était passé de quelqu’un avec un énorme cercle social qui aimait assister à des spectacles de musique métal à un «ermite» qui restait seul.

«C’était quelqu’un de lumineux, jovial, plein de vie, a-t-elle déclaré. Après les événements, il l’a perdue, cette lumière. Il ne l’avait plus.»

Jonathan Dubé avait semblé «torturé» par les événements et s’était demandé pourquoi Denis Blanchette avait perdu la vie alors que la sienne avait été épargnée, a ajouté Mme Bissonnette.

Le recours judiciaire mentionne que les plaignants attendaient devant la porte arrière de la salle pour démonter la scène lorsque Richard Henry Bain s’est approché et a tiré dans leur direction.

Le tireur, armé d’un fusil d’assaut semi-automatique et vêtu d’un peignoir et d’une cagoule, a tiré une seule balle avant que son arme ne s’enraye, selon des documents légaux.

Il a été arrêté après une brève poursuite policière, aux cris «Les Anglais se réveillent!», alors qu’il était en état d’arrestation.

La poursuite indique que deux des plaignants, Audrey Dulong Bérubé et Gaël Ghiringelli, ont aidé à transporter David Courage dans l’immeuble après la fusillade, tandis qu’un autre, Guillaume Parisien, était si proche que le corps de Denis Blanchette est tombé sur lui.

Les plaignants allèguent que la police n’a pas correctement évalué les risques associés à l’événement et qu’aucun policier n’était stationné devant la porte arrière du site du centre-ville ou dans d’autres zones clés.

Les plaignants demandent 125 000 $ chacun, ainsi que plusieurs milliers de dollars chacun pour la thérapie et une autre somme forfaitaire de 100 000 $ en dommages punitifs.

L’action en justice n’a été déposée que plusieurs années après l’événement, car il a fallu du temps aux plaignants pour traiter et reconnaître ce qui s’était passé, selon le document du tribunal.

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