Attaque du Vieux-Québec à l’Halloween 2020: Girouard voulait être «un agent du chaos»

Caroline Plante, La Presse Canadienne
Attaque du Vieux-Québec à l’Halloween 2020: Girouard voulait être «un agent du chaos»

QUÉBEC — Le jury au procès de Carl Girouard devra déterminer si l’accusé est criminellement responsable de l’attaque du Vieux-Québec à l’Halloween 2020 qui a causé la mort de deux personnes.

C’est la seule question qui subsiste, a laissé entendre lundi le juge Richard Grenier, de la Cour supérieure, à l’ouverture de ce procès très attendu. 

Le juge Grenier a annoncé que Carl Girouard admettait avoir tué deux personnes et en avoir blessé cinq autres. Il plaidera toutefois qu’il était atteint de troubles mentaux au moment des événements. 

Le procès s’est ouvert avec la théorie de la cause du procureur Me François Godin. S’adressant directement au jury, il a fait valoir que Carl Girouard planifiait un «coup d’éclat» depuis 2014.

Le 31 octobre 2020, Carl Girouard quitte donc son domicile de Sainte-Thérèse, en banlieue de Montréal, pour se rendre à Québec «accomplir un désir malveillant». Il entre le trajet dans son téléphone cellulaire.

Il apporte un katana, soit un long sabre japonais dont la lame mesurait 76,9 centimètres, un pantalon noir de jogging, des bottes de cuir noires, un kimono et un masque noir.

«Il veut changer l’opinion des autres à son égard. Il souhaite utiliser la violence, parce que ça démontre une supériorité envers autrui. Monsieur voulait être un agent du chaos, a déclaré Me Godin. Il veut démontrer son courage en faisant des actes que les autres ne feraient pas, donc il veut tuer des gens.»

Arrivé à Québec, Carl Girouard circule avec son véhicule, pour finalement aller se stationner en face du Château Frontenac. Il entame alors un «périple meurtrier et sème la terreur sur son passage», selon la Couronne.

Carl Girouard avait verbalisé dès 2014 «ce qu’il voulait faire, comment il allait le faire et quelles étaient les choses qu’il devait accomplir avant de commettre ces gestes», a poursuivi Me Godin.

Par exemple, Carl Girouard a des tattoos et mentionne qu’il doit se faire détatouer avant de passer à l’acte. Le 31 octobre 2020, il est détatoué. Il voulait également agir avant l’âge de 25 ans; au moment de l’attaque, il en a 24.

Carl Girouard est accusé de deux meurtres au premier degré et de cinq tentatives de meurtre. 

Le procès portera essentiellement sur la condition mentale de l’accusé le soir des événements, a souligné le juge Grenier dans ses directives d’avant-procès.

«L’admission la plus importante dans cette affaire, c’est que M. Girouard est l’auteur des homicides, a-t-il dit. Vous aurez à évaluer la preuve qui sera faite et déterminer sa responsabilité.» 

Selon Me Godin, les jurés devront faire preuve de «gros bon sens» et de «discernement» dans leur analyse pour déterminer si Carl Girouard pouvait distinguer le bien du mal.

«Si oui, s’il est capable de faire cette distinction-là entre le bien et le mal, il est responsable», a-t-il déclaré.

Premiers témoins

Le premier témoin appelé à la barre, Hugo Mercier Villeneuve, est psychoéducateur au centre de formation pour adultes fréquenté par Carl Girouard en 2014.

Il rencontre Carl Girouard une première fois le 11 décembre, alors que l’accusé vient de rédiger un texte morbide dans lequel il semble scénariser son crime. Le mandat est d’évaluer sa dangerosité.  

L’accusé lui parle alors de son besoin de se démarquer des autres, et d’un costume qu’il garde sous clé chez lui (une épée, un coton ouaté, des souliers, des pantalons et un masque) qui va l’aider à réaliser son projet.

Contre-interrogé par la défense, M. Mercier Villeneuve a reconnu que des propos de Carl Girouard avaient pu être «incongrus». Ce dernier s’inquiétait notamment de la présence dans la salle de micros et de pistolets Taser.

M. Mercier Villeneuve se rappelle s’être demandé «si ce ne serait pas mieux un suivi en santé mentale». 

Carl Girouard a été référé au travailleur social Charles-André Bourdua, qui l’a rencontré à neuf reprises. Dès le début, il parle de «tuer des gens avec une épée (…) de façon aléatoire», a témoigné lundi M. Bourdua. 

Le jeune homme «souhaite être vu, reconnu, surtout faire les manchettes». Mais il précise au travailleur social que son projet n’est pas mûr; il doit d’abord changer d’épée et se faire détatouer pour être «pur».

Au fil des rencontres, «l’intensité» du projet de Carl Girouard diminue. Avant sa rencontre de pré-évaluation en psychiatrie, il évoque finalement l’idée d’aller sur un toit en brandissant son épée. 

Le témoignage de M. Bourdua se poursuivra mardi.

Sélection du jury 

Les 12 jurés, huit femmes et quatre hommes, ont été sélectionnés lundi matin en moins d’une heure. En pleine sixième vague de COVID-19, le juge s’est assuré qu’ils étaient tous adéquatement vaccinés.

Une dame a été dispensée par la cour parce qu’elle n’était pas vaccinée.

L’avocat de la défense, Me Pierre Gagnon, a indiqué pour sa part qu’un expert psychiatre et la mère de l’accusé témoigneront en défense, de même qu’au moins un agent correctionnel.

Le procès, qui se tient au palais de justice de Québec, doit durer environ quatre semaines.

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