Une loi pour combattre l’esclavage moderne et le travail des enfants, une priorité

Marie Woolf, La Presse Canadienne
Une loi pour combattre l’esclavage moderne et le travail des enfants, une priorité

OTTAWA — Le ministre fédéral du Travail Seamus O’Regan affirme que le gouvernement libéral planche sur une loi qui rendrait les entreprises canadiennes imputables de ne pas recourir au travail forcé ou à l’exploitation d’enfants à l’étranger.

En entrevue, le ministre O’Regan a dit préparer un large projet de loi qui obligerait les entreprises et les différentes branches du gouvernement à scruter en profondeur leur chaîne d’approvisionnement dans le but de protéger les travailleurs.

Selon le ministre, ce genre de projet de loi bénéficierait d’un grand nombre d’appuis parmi les élus libéraux et néo-démocrates.

La nouvelle loi forcerait les compagnies canadiennes à s’assurer qu’aucun de leurs produits ni même aucune composante ne soient fabriqués dans des ateliers de misère qui exploitent des enfants ou forcent leur main-d’œuvre à effectuer de nombreuses heures dans de mauvaises conditions pour des salaires dérisoires.

Pour Seamus O’Regan, il s’agit d’une «urgence» et il se fait une «priorité» de trouver la meilleure manière de rédiger ce projet de loi.

«Il y a deux éléments qui nous intéressent. D’abord, il doit y avoir une obligation de transparence dans la chaîne d’approvisionnement des entreprises. L’autre porte sur la vérification diligente, les obliger à vérifier», a-t-il développé.

Le ministre étudie d’ailleurs les textes de quatre projets de loi privés déposés à la Chambre des communes qui partagent des objectifs semblables.

L’un de ces projets de loi privés a été soumis à l’origine par le député libéral John McKay avant d’être repris par son collègue Marcus Powlowski.

Ce dernier a déclaré qu’il était important que le Canada «fasse sa part» pour combattre le travail forcé. Il a d’ailleurs souligné que de nombreux autres États avaient déjà adopté des lois en la matière.

Le NPD a aussi déposé deux projets de loi similaires alors qu’un autre déposé par la sénatrice Julie Miville-Dechêne est actuellement à l’étude par le Parlement.

Le ministre O’Regan dit ne pas avoir encore déterminé s’il préférait déposer un tout nouveau projet de loi au nom du gouvernement ou s’il allait chercher à modifier un texte déjà existant.

«Nous avons quatre projets de loi privés. Nous avons l’embarras du choix, a-t-il reconnu. Alors nous devons prendre le temps d’étudier chacun d’entre eux.»

M. O’Regan se réjouit également de bénéficier d’un fort mouvement d’appui au sein de la Chambre des communes pour faire un grand ménage dans la chaîne d’approvisionnement.

C’est le premier ministre Justin Trudeau qui lui a précisément donné ce mandat au moment de le nommer ministre à la suite de l’élection générale de l’été dernier.

Le travail des enfants loin des regards

Un rapport du Sous-comité des droits internationaux de la personne de la Chambre des communes a recommandé au gouvernement canadien d’inciter les entreprises à scruter les pratiques de leur chaîne d’approvisionnement en matière de travail forcé.

D’après ce document, 4,3 millions d’enfants étaient exploités dans des installations de travail forcé en 2016. Un nombre que l’Organisation internationale du travail a décrit comme une sous-estimation.

Selon le sous-comité, le travail des enfants intervient au plus bas de la chaîne d’approvisionnement, loin des regards des inspecteurs, acheteurs et consommateurs. En Asie du Sud et Asie du Sud-Est, les enfants sont notamment exploités dans la fabrication de vêtements, la pêche et la transformation de produits de la mer.

Ces enfants seraient ainsi privés d’éducation et travailleraient dans des conditions dangereuses incluant la présence de produits toxiques ou l’exposition à des températures extrêmes.

Dans d’autres cas, des travailleurs sont confinés à leur lieu de travail ou des familles entières sont réduites à la servitude et au travail forcé pour rembourser des dettes.

Rocio Domingo Ramos, de l’organisme Anti-Slavery International, soutient que le Canada accuse du retard sur d’autres juridictions comme la France, l’Allemagne et la Norvège, qui disposent toutes de lois obligeant les entreprises à s’assurer que leurs produits ne sont pas fabriqués par du travail forcé.

D’après le président et directeur général de Vision mondiale Canada, Michael Messenger, les «liens canadiens avec le problème mondial du travail des enfants et du travail forcé continuent de s’amplifier».

Il dit avoir bon espoir que le Canada rattrape les autres pays dans la lutte contre ce fléau.

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