Tuerie en N.-É.: le tueur avait attiré l’attention de la police dix ans auparavant

Keith Doucette, La Presse Canadienne
Tuerie en N.-É.: le tueur avait attiré l’attention de la police dix ans auparavant

HALIFAX — Un nouveau document dévoilé dans le cadre de l’enquête sur la tuerie de Portapique montre que le tireur qui a abattu 22 personnes en Nouvelle-Écosse avait été sur le radar de la police jusqu’à dix ans auparavant.

Le rapport déposé mardi indique que Gabriel Wortman avait fait l’objet d’enquêtes policières à au moins deux reprises, voire trois.

En juin 2010, le détachement de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) de Moncton, au Nouveau-Brunswick, avait été contacté par l’oncle du tireur. Glynn Wortman a dit au policier Len Vickers que son neveu, qui vivait dans la région de Halifax, avait menacé de tuer ses parents. Plus tard dans la journée, l’agent Vickers a informé le sergent Cordell Poirier, de la Police régionale de Halifax, qu’il avait également reçu une plainte du père de Wortman, Paul, au sujet d’une menace de mort de la part de son fils.

Le rapport de l’agent Poirier indique que lui et un autre policier se sont rendus au domicile du tueur, à Dartmouth, en Nouvelle-Écosse, où ils ont parlé à sa conjointe, Lisa Banfield, à 3 h 25 du matin.

Le document indique que Mme Banfield a dit aux policiers que Wortman dormait. Elle a aussi dit qu’il avait été bouleversé par une lettre qu’il avait reçue la veille concernant une longue bataille juridique avec ses parents au sujet de la propriété. L’agent Poirier a demandé à Mme Banfield s’il y avait des armes dans la maison; elle a dit non.

Le policier a ensuite vérifié dans le Registre canadien des armes à feu s’il y avait des armes possibles et a signalé que s’il «possède des armes, elles ne sont pas enregistrées». Le document indique aussi que Wortman n’avait jamais demandé de permis d’armes à feu.

Le rapport de l’agent Poirier indique qu’il a finalement parlé au téléphone à Gabriel Wortman, qui lui a dit qu’il avait un fusil à plomb et deux mousquets antiques inutilisables accrochés au mur de son chalet à Portapique.

L’agent Poirier a déclaré avoir fermé le dossier le 26 août 2010, après qu’il n’ait pas pu entrer en contact avec le père de Wortman.

Encore en 2011

Une deuxième menace, cette fois contre la police, a suscité un avertissement du Service de police de Truro, en Nouvelle-Écosse, près d’un an plus tard. Le 4 mai 2011, le Service de renseignements criminels de la Nouvelle-Écosse a publié un bulletin de sécurité au sujet de Wortman: le caporal Greg Densmore prévenait ses collègues que Wortman voulait «tuer un flic».

La note était basée sur les informations d’une source anonyme qui a déclaré à la police que Wortman était en possession d’au moins une arme de poing et de plusieurs fusils, qui étaient stockés dans un compartiment derrière la cheminée de sa maison de campagne à Portapique.

L’agent Poirier, de la Police régionale de Halifax, a pris note du bulletin qui, selon lui, représentait une menace réaliste.

Il a indiqué qu’il avait parlé à l’agent Densmore, l’auteur du bulletin, et au père de Wortman avant de contacter la GRC à Bible Hill, où l’agent John McMinn, superviseur, a déclaré qu’il n’était pas au courant de cette note. L’agent Poirier a déclaré avoir fourni à M. McMinn son rapport de 2010, y compris des informations sur le véhicule personnel de Wortman.

Le document indique que le superviseur McMinn a effectué une recherche dans la base de données, mais il n’ajoute aucun détail supplémentaire.

Puis en 2013

Le troisième incident concerne un rapport déposé à la police le 6 juillet 2013 par une ancienne voisine de Wortman à Portapique. Brenda Forbes a déclaré à la commission d’enquête qu’elle avait fait part de ses convictions concernant la présence d’armes illégales lors d’une plainte concernant un incident de violence conjugale impliquant Lisa Banfield.

Cependant, les recherches dans les dossiers de la GRC à la suite de la tuerie de 2020 indiquent que les policiers qui ont répondu avaient pris des «notes minimales» à l’époque. Une grande partie de l’information avait depuis été purgée, et les enquêteurs de la GRC ont finalement conclu que l’incident était «en dehors des paramètres de l’enquête» sur la tuerie.

Un courriel de la GRC du 9 juin 2020 a également indiqué qu’il «semble y avoir une divergence» dans les souvenirs de Mme Forbes concernant son appel à la police, et ajoute qu’il n’y avait aucune trace d’un «incident domestique» le jour décrit par la voisine. 

Mme Forbes a ensuite déclaré à la commission d’enquête, le 19 août 2021, que la police ne l’avait jamais rappelée au sujet de sa plainte et qu’ils n’avaient pas enregistré leur conversation lorsqu’elle leur avait parlé.

Un arsenal acquis aux États-Unis

D’autre part, le document offre également des détails sur l’arsenal du tireur à son domicile de Portapique.

Il montre que des proches des deux côtés de sa famille et d’autres, y compris des voisins et des personnes qui avaient travaillé sur sa propriété, avaient vu ses armes. Le document publié mardi indique clairement que Wortman n’hésitait pas à dire aux gens qu’il avait obtenu certaines de ses armes aux États-Unis.

Lisa Banfield a déclaré aux enquêteurs de la commission qu’il possédait «des fusils Rambo et de style militaire» et qu’il avait acheté ses armes de poing aux États-Unis et les avait ramenées au Canada cachées à l’arrière de son camion.

Lorsque le tireur a été abattu par la police alors qu’il faisait le plein d’une voiture volée au nord de Halifax, il avait plusieurs armes en sa possession.

Le document indique que la police a récupéré un pistolet Glock 23, un pistolet Ruger P89, un fusil semi-automatique Colt Carbine 5.56, un fusil semi-automatique Ruger Mini-14 et une arme de poing Smith & Wesson modèle 5947, qui appartenait à la policière de la GRC Heidi Stevenson, tombée sous les balles du tireur peu de temps auparavant.

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