Tuerie en N.-É.: les habitants ont encore besoin d’aide deux ans après

Michael MacDonald et Keith Doucette, La Presse Canadienne
Tuerie en N.-É.: les habitants ont encore besoin d’aide deux ans après

HALIFAX — Deux ans après qu’un homme déguisé en gendarme a tué 22 personnes en Nouvelle-Écosse, des personnes en deuil se présentent toujours pour obtenir de l’aide du programme de services aux victimes de la province, a indiqué mardi un responsable du gouvernement lors d’une enquête publique.

Kim Burton, une responsable du ministère de la Justice, a rapporté que dans les semaines qui ont suivi la fusillade de masse des 18 et 19 avril 2020, le ministère a eu du mal à faire participer les gens au programme, qui propose des conseils et d’autres services de soutien.

«Le défi demeure qu’il y a beaucoup de Néo-Écossais et beaucoup de Canadiens… que nous n’avons pas encore rejoints», a indiqué Mme Burton.

Mme Burton a expliqué que les victimes d’actes criminels sont généralement aiguillées vers le programme à mesure que les affaires les concernant progressent dans le système de justice pénale. Mais, dans ce cas où le tireur a été tué par la police, le ministère a dû tendre la main aux communautés touchées du nord et du centre de la Nouvelle-Écosse.

Environ un mois après la tragédie, le ministère a mis en place des soi-disant centres de services dans quatre communautés de la Nouvelle-Écosse : Portapique, Masstown, Shubenacadie et Wentworth.

«À l’époque, je me souviens que notre clientèle était inconnue, a-t-elle déclaré. Nous nous appuyions sur d’autres agences ou sur l’autoréférence.»

Mme Burton a ajouté que les services aux victimes avaient été contactés par une personne cherchant de l’aide plus tôt cette semaine, et elle a dit que d’autres devraient le faire dans les mois à venir.

«Il y a des membres de la communauté qui ont été rejoints au cours des trois derniers mois et ont dit : “Je pense que je suis prêt pour de l’aide maintenant”, a rapporté Mme Burton. Cela pourrait être leur processus de guérison, mais certains ont dit : “Je voulais que les familles et les personnes les plus touchées soient aidées en premier.”»

Le mois dernier, l’enquête a publié un rapport provisoire indiquant que bon nombre des personnes et des familles les plus touchées par la tragédie n’avaient pas encore reçu le soutien dont elles avaient besoin.

«Par exemple, une carte de commentaires laissée lors d’une journée portes ouvertes de la Mass Casualty Commission à l’automne 2021 indiquait : “Nous avons plus que jamais besoin d’un conseiller en deuil et en traumatisme”», indique le rapport.

«Ce thème a été réitéré par de nombreux répondants à notre enquête en ligne… en février et mars 2022. Un répondant a écrit : “Il semble que personne ne comprenne ce que nous avons traversé… Notre communauté a désespérément besoin de plus de soutien en santé mentale.”»

La commission a encouragé les agences gouvernementales et non gouvernementales à agir rapidement pour fournir du soutien supplémentaire en matière de santé mentale, de traumatisme et de deuil.

Des services déjà prolongés

Dana Bowden, directrice des services aux victimes du ministère de la Justice, a déclaré que les centres de services étaient initialement mis en place pour deux semaines, fonctionnant six jours par semaine de 10 h à 19 h.

Mais le besoin était si grand que les centres ont été maintenus ouverts jusqu’en août 2020, date à laquelle les sites de Shubenacadie et de Masstown ont dû fermer, car tous deux étaient dans des écoles. Les deux autres sites sont restés ouverts deux jours par semaine jusqu’en janvier 2021.

À Portapique, où 13 personnes ont été abattues dans la nuit du 18 avril 2020, une caravane a été installée à côté du centre communautaire, où des conseils étaient disponibles.

Christine Blair, maire de la municipalité où la plupart des meurtres ont eu lieu, a souligné qu’un manque de soutien à Colchester s’est développé pour les personnes souffrant encore de chagrin et de traumatismes, ce qui peut entraîner une augmentation de l’anxiété et de la maladie mentale.

«Nous ne réalisons tout simplement pas à quel point la souffrance est étendue, et elle doit encore être traitée, a-t-elle dit. Beaucoup a été fait, et il reste encore beaucoup à faire.»

Mme Blair a ajouté qu’une équipe spéciale devait se rendre dans les communautés pour offrir un soutien.

Tom Taggart, député de la circonscription de Colchester North, qui comprend Portapique, a complété que l’approche d’équipe est une bonne idée. Mais il a souligné que des services de santé mentale plus spécifiques devraient également être proposés.

«Cet (événement) a changé de nombreuses vies pour toujours, a souligné M. Taggart. Ce n’est pas censé arriver à Portapique… mais c’est arrivé, et ça a changé toute notre vie, et nous ne pouvons jamais l’oublier.»

Des répartiteurs en arrêt de travail

Les superviseurs du centre de communications opérationnelles de la GRC en Nouvelle-Écosse qui ont travaillé avec les répartiteurs du 911 lors de la tuerie d’avril 2020 affirment que la moitié du personnel est maintenant en arrêt de travail.

Bryan Green, commandant par intérim de la «Station de transmissions opérationnelles» de la Gendarmerie royale du Canada (GRC), déclarait lundi à la commission d’enquête qu’avant la tuerie, 50 employés travaillaient à temps plein dans ce service.

Or, M. Green a déclaré qu’il n’y avait plus aujourd’hui que 24 employés à temps plein travaillant à la répartition des appels au 911 pour la GRC de la Nouvelle-Écosse.

Il a déclaré que la plupart des absences étaient «dues à Portapique», là où les tueries ont commencé le samedi soir du 18 avril. M. Green croit que si certains de ces postes sont techniquement occupés par des personnes «en congé de maladie», il ne sait pas si ces employés reviendront un jour.

Un enquêteur de la commission a demandé à M. Green si lui et son personnel avaient été suffisamment soutenus après cette tragédie qui a fait 22 morts, les 18 et 19 avril 2020. Il a répondu qu’il se sentait bien soutenu, mais qu’on aurait peut-être pu en faire plus pour éviter de perdre autant d’employés.

Kirsten Baglee, une superviseure du même centre de communications, qui était de l’équipe du matin le dimanche 19 avril, avec M. Green, a déclaré que l’ampleur de la tuerie était plus grande que ce que n’importe quel membre du personnel aurait pu imaginer.

Elle a dit que c’est avec des événements comme celui-là que «des carrières peuvent être brisées».

Cette dépêche a été rédigée en partie avec l’aide financière des Bourses de Meta et de La Presse Canadienne pour les nouvelles.

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