Une entreprise montréalaise découvre une énorme fuite de méthane en Russie

Stéphane Blais, La Presse Canadienne
Une entreprise montréalaise découvre une énorme fuite de méthane en Russie

MONTRÉAL — L’entreprise montréalaise GHGSat, qui a présentement six satellites dans l’espace pour détecter les émissions de méthane sur Terre, aurait observé la plus grande fuite de méthane jamais découverte.

L’observation remonte au 14 janvier,et près de 90 tonnes de méthane (CH4) auraient été rejetées, chaque heure, par la mine Raspadskya, dans l’oblast de Kemerovo, en Russie, selon GHGSat.

Le méthane est environ 80 fois plus puissant comme gaz à effet de serre que le CO2 et selon le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), réduire les émissions mondiales de méthane est une étape cruciale dans la lutte contre le changement climatique.

Or, si le taux total de rejet de la mine russe était maintenu au cours d’une année, la mine aurait émis 764 000 tonnes de méthane ― suffisamment pour alimenter 2,4 millions de foyers et serait l’équivalent des émissions de CO2 produites par cinq centrales électriques au charbon de taille moyenne, selon les estimations de GHGSat.

Stéphane Germain, chef de la direction de GHGSat, a expliqué à La Presse Canadienne que cette mine de charbon est «une source qui émet fréquemment du méthane avec un ordre de grandeur qui est assez important».

Selon lui, les émissions détectées à Raspadskaya ont été libérées intentionnellement, par mesure de sécurité, car le méthane peut s’accumuler et s’enflammer avec des conséquences potentiellement mortelles.

En 2010, 91 personnes sont mortes lors d’explosions de méthane à la mine Raspadskya.

«Il existe des technologies pour capturer le méthane plutôt que le ventiler», mais «les bonnes pratiques ne se font pas partout malheureusement», a souligné M. Germain en faisant référence aux technologies qui permettent de capter le méthane et de le brûler comme combustible, ce qui réduit son impact sur le réchauffement climatique.

GHGSat a alerté l’exploitant de la mine Raspadskaya de ses découvertes, mais n’a reçu aucune réponse. L’opérateur de la mine n’a pas non plus répondu à une demande de commentaire de l’Associated Press.

Manfredi Caltagirone, qui dirige l’Observatoire international des émissions de méthane du Programme des Nations unies pour l’environnement, a déclaré à l’Associated Press qu’il n’était au courant d’aucun rejet plus important de méthane provenant d’une mine de charbon.

«Si cet événement est le résultat d’une accumulation de méthane qui a ensuite été libéré en une seule fois au lieu de plusieurs jours, l’impact environnemental serait le même que si un panache plus petit devait être libéré en permanence pendant plusieurs jours», a déclaré M.  Caltagirone.

«Mais du point de vue de la sécurité, c’est inquiétant», a-t-il précisé, citant les récentes explosions de mines en Pologne qui ont tué 13 personnes.

Débusquer les tricheurs

Les États et les grandes entreprises doivent se munir d’instruments de mesure précis pour atteindre leurs engagements de réduction des GES et GHGSat se concentre sur la mesure du méthane.

Récemment, l’Agence internationale de l’énergie a déclaré que de nombreux pays sous-déclaraient considérablement leurs émissions de méthane.

Les données recueillies par les satellites de l’entreprise dont le siège est sur le boulevard Saint-Laurent permettent, entre autres choses, de «débusquer les tricheurs» et de s’assurer que les pays et les entreprises soient honnêtes et transparents concernant la quantité de méthane qu’ils émettent.

GHGSat partage notamment ses données avec l’Observatoire international des émissions de méthane (IMEO), un organisme qui relève de l’ONU.

«La transparence mondiale dans l’émission des gaz à effet de serre est maintenant une réalité, on le voit avec nos propres satellites», a indiqué Stéphane Germain, en ajoutant que son entreprise «est capable de trouver les grosses fuites et les grosses sources de méthane partout au monde tous les jours, et c’est important pour la lutte contre les changements climatiques».

Le chef de la direction de GHGSat est d’avis que d’exposer au public les grands émetteurs de méthane encourage les grands industriels et les pays à se doter de meilleures pratiques.

En novembre dernier à la conférence de Glasgow sur le climat, une centaine de pays se sont engagés à réduire de façon radicale leurs émissions de méthane. C’est d’ailleurs à l’occasion de la COP26 que le gouvernement fédéral a annoncé une aide de 20 millions $ à GHGSat.

― Avec des informations de l’Associated Press

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