La surenchère provoquée par des vedettes pour devenir propriétaires minoritaires des Sénateurs d’Ottawa pourrait propulser la concession de la LNH vers de nouveaux sommets, tout en permettant à celles-ci de protéger leur fortune.
Des experts admettent qu’il peut être étonnant pour des amateurs de hockey d’apprendre que des célébrités telles que Ryan Reynolds, Snoop Dogg et possiblement The Weeknd soient intéressées à investir dans ce projet, mais ils rappellent que ce genre d’opportunité se présente très rarement.
«Quand on parle de sport professionnel, on parle d’un système similaire à celui d’un cartel. Il n’y a que 32 équipes, donc 32 sièges», a expliqué le professeur spécialisé en gestion du sport à l’Université Brock Michael Naraine.
«Des équipes comme les Sénateurs d’Ottawa, malgré le fait qu’ils n’ont jamais gagné la coupe Stanley et qu’ils ne performent pas si bien que ça sur la patinoire, suscitent tout de même la convoitise. C’est le genre d’opportunité qui pousse les célébrités à vouloir devenir propriétaires de concessions sportives», a-t-il poursuivi.
Naraine a souligné que l’arrivée d’une vedette dans le giron des Sénateurs pourrait permettre à la concession ontarienne d’être plus visible dans des marchés non traditionnels.
Reynolds, qui s’est associé à un groupe spécialisé dans le développement de projets immobiliers intéressé à déposer une offre d’achat de plus de 1 milliard $US, a exprimé sa volonté de créer une série télévisée portant sur l’équipe ottavienne à l’image de celle qu’il a développée avec sa boîte de production qui s’intitule «Welcome to Wrexham». Celle-ci porte sur l’équipe de soccer galloise Wrexham AFC, dont il est copropriétaire.
Le conseil d’administration de ‘Senators Sports & Entertainment’ a enclenché le processus de mise en vente des Sénateurs en novembre dernier, à la suite du décès du propriétaire Eugene Melnyk. Ce dernier a laissé la concession de la LNH en héritage à ses filles, Anna et Olivia.
La date limite pour signifier aux Sénateurs un intérêt dans l’achat de l’équipe a été établie au 15 mai.
Snoop Dogg, un grand amateur de hockey, a déclaré qu’il utiliserait ses parts dans les Sénateurs afin de développer le hockey aux États-Unis, surtout auprès des jeunes afro-américains.
«Ç’a créerait de l’effervescence, ce qui en retour attirerait de nouveaux partisans, de nouveaux commanditaires, et plus de visibilité. Le bassin de partisans ne serait plus limité (à la région de la capitale nationale), mais s’étendrait au reste du Canada, et même aux quatre coins du monde», a mentionné Naraine.
«Si vous êtes un partisan fini des Sénateurs depuis les années 1990, alors vous adoreriez savoir qu’un jour, peut-être, un chandail des Sénateurs d’Ottawa pourrait se retrouver dans un film de la série Deadpool», a-t-il souligné.
L’économiste du sport de l’Université Concordia Moshe Lander a rappelé que détenir des parts dans une concession sportive est une façon sécuritaire pour une célébrité d’investir, en plus de lui permettre la plupart du temps de faire fructifier ses avoirs. Il a souligné que Melnyk avait acheté les Sénateurs — qui évoluent dans un marché «relativement modeste» de la LNH, selon Lander — pour à peine 92 millions $US il y a une vingtaine d’années.
«Cette équipe a toujours compté sur des joueurs interchangeables, anonymes. C’est la définition de la modestie. Et pourtant, la valeur de la concession a été multipliée par 10 en 20 ans», a évoqué Lander.
«Quand une célébrité arrive dans le portrait, alors celle-ci a la capacité de monétiser la valeur des parts dans l’équipe au-delà de la simple valeur marchande de l’équipe», a-t-il poursuivi.
Cette opportunité est d’autant plus attrayante en raison des négociations en cours entre les Sénateurs et la Commission de la capitale nationale pour le développement d’un projet immobilier comprenant un nouvel amphithéâtre sur les plaines LeBreton, juste à l’ouest du centre-ville d’Ottawa.
«Comment faire fructifier votre investissement dans une équipe de hockey si elle n’aspire pas à la conquête de la coupe Stanley chaque année? Ce que nous avons appris depuis vingt ans, c’est que les concessions sportives ont cette capacité unique de pouvoir faire débloquer des discussions pour des terrains très convoités qui ne le seraient pas autrement», a mentionné Naraine.
«Il y a de toute évidence une volonté populaire dans la région de la capitale nationale d’ériger un nouvel amphithéâtre au centre-ville d’Ottawa», a-t-il dit.
Lander a ajouté que l’offre provenant du groupe de Reynolds «répond à tous les critères» de la LNH, puisqu’il possède l’expérience nécessaire «pour susciter de l’intérêt pour le sport, au-delà de la simple expérience de regarder un match».
«C’est ce qu’il a accompli avec cette équipe de soccer de cinquième division (Wrexham) que personne, à l’extérieur de ce marché, n’aurait connu autrement. Soudainement, tout le monde se passionne pour cette aventure très réelle à la ‘Ted Lasso’», a résumé l’économiste, en référence à l’émission de télévision mettant en vedette un Américain qui tente de relancer une équipe de soccer britannique.
«Du point de vue de la LNH, ils vont se dire: ‘Excellent, nous allons compter sur un propriétaire qui créera du contenu pour nous, qui a démontré qu’il est en mesure de créer du contenu qui intéressera des gens qui autrement n’auraient aucun intérêt pour la chose’», a-t-il conclu.