La députée caquiste de Jean-Talon, Joëlle Boutin, démissionne

Thomas Laberge, La Presse Canadienne
La députée caquiste de Jean-Talon, Joëlle Boutin, démissionne

QUÉBEC — Une autre tuile s’abat sur le gouvernement de François Legault: la députée de Jean-Talon, Joëlle Boutin, quitte la politique moins d’un an après avoir été réélue. Une élection partielle devrait donc être déclenchée dans les six prochains mois.

La députée en a fait l’annonce mercredi après-midi à son bureau de comté. Mme Boutin a dit que sa réflexion avait débuté il y a quelques mois, mais a assuré que c’était après l’élection. «Je me suis présentée avec conviction et avec mon coeur», a-t-elle soutenu.

Elle a indiqué qu’elle avait fait beaucoup de sacrifices professionnels et familiaux en tant que députée. «Dans les dernières années, j’ai choisi de passer trop peu de temps avec mes enfants afin de servir mes concitoyens», a-t-elle dit, ajoutant toutefois qu’elle ne regrettait rien.

Mme Boutin a précisé qu’elle n’avait ses enfants qu’une semaine sur deux, et qu’elle ne les voyait presque pas pendant ces périodes.

Questionnée à savoir en quoi ses considérations familiales avaient changé entre la dernière élection et aujourd’hui, elle a répondu: «ce n’est pas différent. C’était difficile, mais il me restait des choses à réaliser dans le comté. Des dossiers que j’ai réglés. […] Je voulais en régler le plus possible sur ma petite  »check list »», a-t-elle expliqué.

Mme Boutin quitte ses fonctions officiellement le 31 juillet. Elle a décidé d’accepter un poste dans le secteur privé à compter du mois d’août. Mme Boutin n’a pas donné de détails sur son nouvel emploi, mais a indiqué qu’elle avait reçu l’offre «récemment».

La députée démissionnaire a remercié le premier ministre François Legault et a rendu hommage à son leadership, notamment pendant la pandémie. Elle l’a rencontré mardi en soirée pour lui annoncer sa décision.

«Je remercie la députée de Jean-Talon, Joëlle Boutin, pour son travail des dernières années au service des Québécois. Merci d’avoir fait partie de la grande famille de la CAQ. Joëlle était une collègue très appréciée du caucus! Je lui souhaite bon succès dans ses projets futurs», a écrit le premier ministre sur Facebook.

Durant le point de presse, elle a rappelé plusieurs réalisations de son parti dans Jean-Talon, dont la phase trois de la promenade Samuel-De Champlain. Or, Mme Boutin était absence lors de cette annonce il y a deux semaines. «Malheureusement, bien que cette annonce majeure ait été dans mon comté, je ne pouvais être présente, car je suis en vacances avec mes enfants», a-t-elle écrit sur Facebook à ce moment.

Recul sur le troisième lien: «une décision responsable»

Le recul du gouvernement Legault sur le troisième lien a provoqué beaucoup de remous au sein du caucus caquiste. Après cette décision, le premier ministre avait rencontré ses députés de la région de Québec et de Chaudière-Appalaches pour tenter de calmer la grogne.

Mercredi, Joëlle Boutin a assuré que cette histoire n’avait pas pesé dans la balance au moment de prendre sa décision de démissionner.

«Personnellement, je pense que le premier ministre a pris la décision qu’il devait prendre. Une décision responsable. […] Les gens de Jean-Talon n’étaient pas les plus fervents partisans du troisième lien, donc personne ne m’a critiqué à cet égard», a-t-elle soutenu.

Plusieurs médias ont rapporté que Mme Boutin avait été déçue de ne pas avoir été nommée au conseil des ministres. Lors de son annonce, elle a assuré que le fait de ne pas avoir de poste de ministre n’a pas eu d’impact sur sa décision de partir.

Avant son départ, Mme Boutin était adjointe parlementaire du ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon.

Elle n’a pas fermé la porte a un éventuel retour en politique.

Une chaude lutte à prévoir

Après une première tentative infructueuse en 2018, Joëlle Boutin a finalement été élue en 2019 lors d’une élection partielle après la démission de l’ancien ministre libéral Sébastien Proulx. Elle avait obtenu 43 % des votes.

Mme Boutin a été réélue en 2022, mais avec un score plus faible (33 %). C’est le solidaire Olivier Bolduc qui est arrivé en deuxième place.

Ce dernier est d’ailleurs déjà en réflexion pour se lancer de nouveau dans la future élection partielle. «J’ai commencé à réfléchir à cela [mercredi] matin. C’est évident que j’ai envie de poursuivre le travail de terrain colossal qu’on a accompli dans les dernières années, mais je suis papa maintenant, mon fils a 4 mois et j’ai besoin de consacrer du temps à ma vie familiale. Ma décision n’est pas prise encore», a-t-il indiqué par texto à La Presse Canadienne.

La directrice des communications de Québec solidaire, Stéphanie Guévremont, a indiqué qu’il était trop tôt pour savoir quel candidat les membres solidaires allaient choisir pour cette circonscription.

Le Parti québécois n’a pas non plus choisi son candidat. «Nous serons prêts et nous incarnerons une réelle alternative pour les citoyens de Jean-Talon, qui auront l’occasion de choisir un parti cohérent et un candidat ou une candidate du Parti québécois en qui ils pourront avoir confiance», a indiqué le député péquiste Joël Arseneau.

Le chef conservateur Éric Duhaine n’a pas répondu à la question de La Presse Canadienne à savoir s’il allait se présenter dans Jean-Talon.

«La CAQ craque à Québec. Elle perd des plumes. De très bons éléments quittent. Les électeurs de Jean-Talon ont maintenant l’occasion d’envoyer un message clair quant aux mensonges de la CAQ au sujet du 3e lien. Ils ont également l’opportunité de réitérer que la population de Québec s’oppose à la construction d’un inutile tramway dont on ignore toujours le prix», a-t-il écrit sur Facebook.

Le Parti libéral a simplement indiqué qu’il aillait annoncer son candidat en temps et lieu.

Historiquement, la circonscription de Jean-Talon était un château fort libéral jusqu’à l’arrivée de Mme Boutin.

Un décret qui ordonne la tenue d’une élection partielle doit être pris par le gouvernement au plus tard six mois à partir du départ d’un député. Selon le moment de prise du décret, la période électorale aura une durée de 33 à 39 jours, indique Élections Québec. Le coût estimé d’une élection partielle est de 585 000 $.

Selon l’agrégateur de sondages QC125, on peut s’attendre à une chaude lutte dans Jean-Talon.

«Définitivement une des circonscriptions les plus intrigantes au Québec. Avec un vote divisé et un candidat local de qualité, n’importe quel des partis représentés à l’Assemblée nationale pourrait gagner et je ne serais pas surpris», a écrit le créateur de QC125 , Philippe J. Fournier, sur Twitter.

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