L’itinérance atteint des niveaux inégalés à Saint-Jean

Valérie Legault vlegault@canadafrancais.com

L’itinérance atteint des niveaux inégalés à Saint-Jean
Alexandra Thibault et Jean-François Pomerleau souhaitent agrandir Le Spot en vue d'une fréquentation accrue cet hiver. (Photo : (Photo Le Canada Français - Jessyca Viens-Gaboriau))

Le dénombrement des personnes en situation d’itinérance visible au Québec réalisé en octobre 2022 fait état de deux fois plus de sans-abris en Montérégie qu’il y a quatre ans. Ce n’est que la pointe de l’iceberg. Au centre de jour Le Spot, on a recensé 118 personnes différentes depuis le mois de mai. C’est 42% de la fréquentation depuis l’ouverture de la ressource, en 2021.

Chaque fois qu’elle met ses statistiques à jour, Alexandra Thibault se demande si elle a la berlue. Sa dernière compilation l’a stupéfaite. La coordonnatrice du Spot constate un afflux considérable. Les 118 personnes différentes qui ont fréquenté l’ancienne Taverne des sports depuis ce printemps en sont pour la plupart à leur premier épisode d’itinérance.

« Ce ne sont plus seulement que des sans-abris qui sont dans la rue depuis longtemps. Il y en a qui ont vécu une séparation et ne sont pas capables de se reloger, décrit-elle. D’autres sont en arrêt de travail. Il y a aussi plus de femmes qu’avant. »

Pas de solutions

La crise du logement complique énormément les choses pour Mme Thibault et son équipe d’intervention. « Avant, on trouvait une solution pour les nouveaux venus et on ne les revoyait plus, dit la coordonnatrice. On a beaucoup moins de moyens qu’avant pour les aider à s’en sortir. Il n’y a pas de logements abordables. C’est quasiment impossible de les aider à se trouver un appartement. »

La consommation de drogue et les problèmes de comportement guettent les nouveaux sans-abris qui perdent espoir de s’en sortir. « Au moins, nous leur offrons des repas et un endroit sécuritaire où ils sont écoutés », résume Alexandra Thibault.

Invité à s’adresser aux membres de l’Union des municipalités du Québec la semaine dernière, le ministre responsable des Services sociaux, Lionel Carmant, a annoncé une enveloppe de 20 M$ pour répondre aux besoins immédiats en itinérance. « Je n’ai encore aucune idée du montant, mais il paraît qu’on va avoir de bonnes nouvelles », se réjouit Jean-François Pomerleau, directeur de la maison des jeunes Le Dôme, qui chapeaute le centre de jour pour sans-abris.

Complet

La nouvelle tombe à point, car M. Pomerleau anticipe un achalandage accru l’hiver prochain. Cet été, Le Spot a accueilli 30 à 40 personnes par jour en moyenne. Il y en a presque autant la nuit. Il faut aménager le sous-sol et ça presse. « On est loin des huit personnes dans le bunker au parc Gerry-Boulet. Le sous-sol n’est pas un luxe, mais une nécessité. On ne peut pas arrêter ce service-là », avertit-il. Il est déjà en train de recueillir des soumissions. « On va enfin avoir des douches. Je peux le confirmer », annonce-t-il.

Le directeur du Spot rêve du jour où il n’aura plus à se soucier du financement du centre de jour. La halte de nuit a été menacée deux fois de fermer ses portes à cause du manque de financement. Jean-François Pomerleau demeure optimiste. Son organisme a obtenu un pont budgétaire de 10 000$ de la Ville de Saint-Jean-sur-Richelieu jusqu’au 22 octobre pour maintenir en vie la halte de nuit en attendant la future subvention du ministère de la Santé.

Sommet

La mairesse suppléante de Saint-Jean-sur-Richelieu, Mélanie Dufresne, a assisté au Sommet sur l’itinérance de l’UMQ, la semaine dernière. « On va continuer de mettre de la pression sur le gouvernement du Québec, affirme-t-elle. Il y a un manque à gagner de 1,4 M$ à Saint-Jean-sur-Richelieu pour lutter contre l’itinérance. On a tous les outils qu’il nous faut. Maintenant, ça nous prend les sous. »

Elle cite en exemple le modèle finlandais qui a été présenté aux congressistes. Celui-ci encourage les promoteurs immobiliers à inclure des unités pour les sans-abris dans leurs projets d’appartements locatifs. Les itinérants sont ensuite accompagnés par des intervenants et les services sociaux pour assurer le succès de leur réintégration sociale.

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