L’avocate de Grenon plaide qu’il n’avait pas prémédité le meurtre de Guylaine Potvin

La Presse Canadienne
L’avocate de Grenon plaide qu’il n’avait pas prémédité le meurtre de Guylaine Potvin

SAGUENAY, Qc — L’avocate de Marc-André Grenon, accusé du meurtre au premier degré de Guylaine Potvin, au Saguenay en 2000, a déclaré au jury que son client admettait l’avoir tuée, après s’être introduit par effraction dans son appartement, mais il nie toute préméditation dans le meurtre.

Me Karine Poliquin a également soutenu que si un contact sexuel a eu lieu, il se serait produit après le décès de l’étudiante de 19 ans. Elle a donc soumis aux jurés que les preuves au procès soutenaient un scénario alternatif plus plausible de meurtre au deuxième degré, et non de meurtre au premier degré.

Cet argument a été présenté mercredi après-midi lors des plaidoiries finales au procès de Grenon, accusé d’avoir agressé sexuellement et tué Guylaine Potvin, en avril 2020, dans l’appartement de l’étudiante à Jonquière, aujourd’hui un arrondissement de Saguenay.

Le Code criminel définit le meurtre au premier degré comme un meurtre «commis avec préméditation et de propos délibéré». Mais un meurtre est aussi du «premier degré» lorsque la mort est causée «en commettant ou tentant de commettre une agression sexuelle», entre autres infractions.

Les meurtres au premier et au deuxième degré sont tous les deux passibles automatiquement d’une peine d’emprisonnement à perpétuité. Mais dans le cas d’un meurtre au premier degré, il n’y a aucune possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans, alors que dans le cas de meurtre au deuxième degré, une libération conditionnelle est possible après 10 ans de prison.

Mercredi, un problème technique avec la plateforme utilisée pour diffuser le procès a empêché les personnes extérieures à la salle d’audience de voir la présentation de Me Poliquin en direct, et La Presse Canadienne n’a obtenu un enregistrement audio que plus tard.

Me Poliquin, qui n’a appelé aucun témoin à la barre lors du procès, a soutenu mercredi que Grenon était entré dans l’appartement de Guylaine Potvin pour commettre un cambriolage et qu’il l’avait tuée lors d’une altercation physique.

Selon l’avocate, la Couronne n’a pas pu prouver hors de tout doute raisonnable que Grenon avait agi avec préméditation ou qu’il avait agressé sexuellement la victime avant sa mort.

Elle a souligné que Grenon ne pouvait pas savoir si Guylaine Potvin serait seule dans son appartement, car elle vivait avec des colocataires qui allaient et venaient fréquemment. L’avocate a aussi souligné que l’accusé était passé devant la cuisine sans y prendre un couteau, et qu’il n’y avait aucune preuve qu’il avait sur lui des armes ou des objets – comme de la corde – pour mener à bien une agression préméditée.

Me Poliquin a admis que son client avait pris une boîte de préservatifs dans un tiroir d’une commode dans une autre pièce et qu’il avait touché le corps de la victime, qui était morte. Mais elle n’a pas précisé la nature de ce geste. Selon elle, le fait que Grenon ait pris les préservatifs dans une autre pièce suggère qu’il a fouillé les tiroirs à la recherche d’objets à voler.

Les traces d’ADN

On avait appris plus tôt au procès que l’ADN de Grenon avait été retrouvé à plusieurs endroits sur le corps de la victime, notamment sous ses ongles, autour de sa région génitale et sur un T-shirt qu’elle portait. Son ADN a aussi été retrouvé sur la boîte de préservatifs et sur une ceinture à proximité de la victime.

Me Poliquin, citant le témoignage d’un pathologiste, a déclaré qu’il était impossible d’être certain que les blessures de la victime étaient survenues avant sa mort plutôt que peu de temps après. Elle a soutenu que les preuves ADN ne disent rien sur la façon dont ces traces ont été laissées sur le corps de la victime.

La Couronne avait fait valoir plus tôt dans ses plaidoiries finales que les preuves recueillies sur les lieux du crime suggéraient que Grenon avait agressé sexuellement Guylaine Potvin dans son lit, avant de la tuer.

Le procureur Pierre-Alexandre Bernard a déclaré qu’il n’y avait aucune preuve d’une bagarre ailleurs dans l’appartement, ce qui suggérait que la victime aurait été agressée pendant son sommeil, plutôt qu’en surprenant un voleur lors d’une tentative de cambriolage qui aurait mal tourné.

On a aussi appris au procès que de l’ADN masculin avait été prélevé sur les lieux du crime en 2000, mais il n’y avait à l’époque aucune correspondance dans la base de données criminelle, ce qui explique pourquoi aucune arrestation n’a eu lieu pendant plus de 20 ans.

Grenon a été soupçonné en 2022, lorsque l’ADN trouvé sur les lieux du crime a été saisi cette fois dans une base de données qui analyse les chromosomes Y d’échantillons inconnus et suggère des correspondances potentielles avec des patronymes.

Lorsque le nom de famille «Grenon» est sorti du lot, des enquêteurs de la Sûreté du Québec ont suivi le suspect jusqu’à un cinéma et ont récupéré un verre et des pailles qu’il avait jetées dans une poubelle. L’ADN prélevé sur les pailles s’est avéré correspondre à l’ADN de la scène du crime, tout comme un échantillon d’ADN prélevé directement sur Grenon après son arrestation à Granby en 2022, a-t-on appris au procès.

Le juge François Huot, de la Cour supérieure, donnera lundi ses dernières directives au jury, qui sera ensuite isolé jusqu’à ce qu’il rende son verdict.

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