Assurance-médicaments: le gouvernement réclame un traitement «expéditif» au Sénat

Michel Saba, La Presse Canadienne
Assurance-médicaments: le gouvernement réclame un traitement «expéditif» au Sénat

OTTAWA — Après avoir pressé fortement sur l’accélérateur afin que son projet de loi sur l’assurance-médicaments franchisse toutes les étapes législatives de la Chambre des communes, le gouvernement Trudeau réclame désormais que le Sénat l’étudie promptement.

«Ils auront essentiellement le mois de juin avec le projet de loi. J’espère donc qu’ils parviendront à le faire adopter de manière expéditive», a déclaré le ministre de la Santé et parrain du projet de loi C-64, Mark Holland, mardi, à son arrivée à la réunion du cabinet.

Son porte-parole, Christopher Aoun, a plus tard indiqué à La Presse Canadienne que le gouvernement «espère» que le projet de loi reçoive la sanction royale d’ici la fin de la session, mais a nié qu’il en fait la demande aux sénateurs puisque ce ne serait «pas approprié».

Le projet de loi, qui a franchi lundi soir l’étape de l’étude en comité grâce à une motion visant à limiter les débats, est de retour devant la Chambre des communes d’où il devrait vraisemblablement sortir au plus tard la semaine prochaine et prendre aussitôt la route de la chambre haute du Parlement.

Mardi, M. Holland a indiqué aux journalistes avoir discuté avec «de nombreux sénateurs» et leur avoir demandé un processus rapide.

Le projet de loi, présenté en février, trace la voie vers un régime universel d’assurance-médicaments qui couvre des médicaments sur ordonnance et des produits connexes destinés à la contraception ou au traitement du diabète.

Devant le comité de la Chambre des communes qui étudiait le projet de loi, M. Holland a précisé la semaine dernière que le gouvernement fédéral était disposé à ajouter d’autres médicaments à la liste des médicaments couverts par son programme d’assurance. Selon lui, la liste actuelle représente un «minimum absolu».

Le projet de loi prévoit que le financement est conditionnel à la signature d’accords bilatéraux qui élargissent la couverture existante d’un régime d’assurance-médicaments public.

À ce sujet, M. Holland a déclaré qu’il est «absolument essentiel» dans le cadre des négociations avec les provinces que le projet de loi ait la légitimité que lui confère son adoption par la Chambre des communes.

«Ces conversations se déroulent bien, mais elles ne peuvent pas être vraiment animées tant que nous n’avons pas la volonté élue de la Chambre», a-t-il dit.

Le ministre a cependant prévenu qu’«il faudra un certain temps» pour négocier chacun des accords.

Le Bloc votera contre

L’adoption de ce projet de loi ne fait aucun doute étant donné qu’il a l’appui du Nouveau Parti démocratique (NPD). La formation en avait fait l’un des principaux éléments de l’entente «de soutien et de confiance» qui permet aux libéraux de se maintenir au pouvoir.

Le Bloc québécois, qui se fait un devoir de défendre les champs de compétence des provinces et qui exige que le Québec ait un droit de retrait sans conditions et avec pleine compensation, a laissé entendre plutôt explicitement mardi qu’il votera contre le projet de loi.

«Je serais très surpris qu’on vote en faveur d’un projet de loi qui est l’institutionnalisation d’une ingérence par un gouvernement qui n’a pas les compétences ou dont le tout petit, tout petit, tout petit et très docile partenaire n’a pas non plus les compétences», a déclaré le chef bloquiste, Yves-François Blanchet, dans le foyer des Communes.

Appelé à clarifier la manière dont ses troupes voteront, M. Blanchet a invité la presse parlementaire à «lire dans mon langage».

Quant à savoir si le message que cela envoie aux diabétiques et aux femmes est embêtant, il a répondu que «c’est ce que la politique est capable d’avoir de plus malhonnête».

«Les services en santé sont offerts par l’État québécois. L’État canadien dit: “L’argent dont tu as besoin, je vais le garder. Soit je vais le garder parce que je gère tellement mal que j’ai 40 milliards $ de déficit, soit que je vais le garder parce que je vais te forcer à accepter mes conditions dans ton champ de compétence”», a-t-il déclaré.

Les bloquistes ont échoué lundi soir dans leur tentative de faire adopter un amendement qui visait à permettre que des paiements soient faits à une province ou à un territoire même si Ottawa n’a pas conclu d’entente.

L’amendement a été jugé non recevable par le président du comité. Les libéraux et le député néo-démocrate, qui forment une majorité, ont appuyé la décision de la présidence lorsqu’elle a été contestée. Les conservateurs sont les seuls à s’y être opposés.

Le chef conservateur Pierre Poilievre n’a toujours pas dévoilé comment ses troupes voteront sur le projet de loi à l’étape de la troisième lecture.

Dans une entrevue sur les ondes de Radio-Canada il y a quelques semaines, il ne s’était pas non plus engagé à conserver le programme s’il est porté au pouvoir – pas plus que celui de soins dentaires ou de services de garde d’enfants –, mais a mis en doute leur efficacité.

– Avec des informations d’Émilie Bergeron

Partager cet article
S'inscrire
Me notifier des
guest
0 Commentaires
Inline Feedbacks
Voir tous les commentaires