Femmes autochtones disparues: la cheffe de l’APN déplore le peu de progrès

La Presse Canadienne
Femmes autochtones disparues: la cheffe de l’APN déplore le peu de progrès

OTTAWA — À l’occasion du cinquième anniversaire du rapport de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, la cheffe nationale de l’Assemblée des Premières Nations (APN) fustige tous les niveaux de gouvernement pour ce qu’elle appelle la lenteur des progrès visant à mettre fin à la crise.

Seuls deux des plus de 150 appels à l’action destinés aux peuples des Premières Nations ont été mis en œuvre depuis 2019, affirme Cindy Woodhouse Nepinak.

Et ce, malgré les appels constants des défenseurs de tous les niveaux de gouvernement à un financement accru pour le logement des Autochtones, la justice et les programmes destinés aux personnes LGBTQ+ qui, selon eux, assureraient la sécurité des femmes et des filles.

«Il reste un chemin long et sinueux à parcourir pour lutter et prévenir toutes les formes de violence basée sur le genre», a-t-elle déclaré lundi matin.

«Mais ensemble, avec tous les Canadiens, nous gardons espoir de pouvoir y parvenir étape par étape.»

L’enquête de 2019 a conclu que les femmes autochtones sont 12 fois plus susceptibles d’être portées disparues ou assassinées que leurs homologues non autochtones, et a lancé un total de 231 appels à l’action pour aider à freiner l’épidémie.

Le premier ministre Justin Trudeau a déclaré dans un communiqué que le rapport d’enquête rend compte des «réalités tragiques auxquelles sont confrontées les femmes, les filles et les personnes 2ELGBTQI+ autochtones au Canada».

M. Trudeau a parlé des actions de son gouvernement pour pallier ce problème. Il a ainsi abordé son association avec le gouvernement du Manitoba dans le cadre de projets visant à rechercher les victimes d’un tueur en série dans une décharge de Winnipeg et le projet de système d’alerte Robe rouge, qui diffuserait des alertes publiques lorsqu’une femme ou une fille autochtone, une personne bispirituelle autochtone ou une personne issue de la diversité de genre autochtone disparaît.

«En ce jour solennel, et tous les jours, nous renouvelons notre engagement à avancer sur le chemin de la réconciliation», a promis M. Trudeau dans le communiqué.

Le rapport final était le point culminant des témoignages de plus de 2380 membres de familles, survivants, experts et gardiens des savoirs recueillis sur deux ans pour comprendre la crise et trouver des solutions.

Les membres des familles ont parlé du traumatisme intergénérationnel et des impacts de la pauvreté comme facteur aggravant, tandis que les gardiens des savoirs ont souligné comment les femmes, à cause de la colonisation, ont été éloignées de leurs rôles traditionnels.

«Les mesures visant à mettre fin à ce génocide et à y remédier ne doivent pas être moins monumentales que la combinaison de systèmes et d’actions qui ont permis de maintenir la violence coloniale pendant des générations», indique le rapport.

«Pas acceptable pour notre peuple»

Mme Woodhouse affirme que l’inaction des gouvernements est un échec qui n’est «pas acceptable pour notre peuple», et elle espère que cela ne sera pas non plus acceptable pour les Canadiens.

Elle espère que cette situation n’est pas acceptable pour les Canadiens non plus.

La cheffe de l’APN appelle les gouvernements et leurs agences à apporter des changements significatifs basés sur la justice et le respect des droits de la personne, en pensant aux survivantes et à leurs familles.

Duane Aucoin, représentant du conseil 2SLGBTQ+ de l’Assemblée des Premières Nations pour la région du Yukon, a souligné à quel point «peu de progrès» ont été réalisés pour sa communauté en particulier.

«Il y a 32 appels à la justice pour les personnes (bispirituelles), mais aucun n’a été mis en œuvre», a déclaré M. Aucoin après avoir parlé de la hausse des crimes haineux, de ce qu’il a décrit comme des politiques anti-LGBTQ+ dans certaines provinces et de ses propres expériences en matière de discrimination.

Le Nouveau Parti démocratique a fait écho à des préoccupations similaires, affirmant dans un communiqué de presse lundi qu’il manquait un financement durable à long terme.

«Le budget de cette année a consacré davantage au vol de voitures qu’aux (Femmes, filles et personnes 2ELGBTQI+ autochtones disparues et assassinées)», indique le communiqué. «Évidemment, ce n’est pas une priorité sérieuse pour ce gouvernement.»

La députée néo-démocrate Leah Gazan, qui représente la circonscription de Winnipeg-Centre, a déclaré que l’inaction envoie un «message très clair» sur la priorité accordée par le gouvernement aux femmes, aux filles et aux personnes bispirituelles autochtones.

«J’appelle donc le gouvernement libéral à cesser de parler», a-t-elle déclaré.

«Ils disent beaucoup de belles choses, mais là c’est grave. Des personnes perdent la vie.»

Le ministre des Relations Couronne-Autochtones, Gary Anandasangaree, a déclaré que même si les progrès ne sont peut-être pas aussi rapides que les membres de la communauté l’espéraient, son gouvernement reste déterminé à résoudre ces problèmes.

Il a contesté l’affirmation de l’Assemblée des Premières Nations selon laquelle seulement deux appels à l’action ont été menés à terme depuis 2019. Sur les 215 recommandations relevant de la compétence du gouvernement fédéral, 107 ont été «avancées», a-t-il soutenu.

Lorsqu’on lui a demandé ce que cela signifie, le ministre a évoqué la Commission de vérité Qikiqtani, une initiative inuite qui vise à enquêter sur le meurtre de chiens de traîneau entre 1950 et 1970. Il a également rappelé les excuses officielles présentées par l’ancienne ministre des Relations Couronnes-Autochtones Carolyn Bennett.

«Mon message est que nous y parviendrons. Nous (vous) sommes très reconnaissants de nous accueillir dans des espaces profondément personnels, profondément douloureux», avait-elle déclaré.

«Nous n’allons pas vous tourner le dos.»

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