Une mère témoigne à l’enquête du coroner sur la mort de son fils sans-abri à Montréal

Morgan Lowrie, La Presse Canadienne
Une mère témoigne à l’enquête du coroner sur la mort de son fils sans-abri à Montréal

MONTRÉAL — Plus de trois ans après la mort de son fils, Suzanne Chemaganish ne comprend toujours pas comment on a pu le laisser mourir dans le froid, à l’extérieur d’un refuge pour sans-abri, dans une grande ville comme Montréal.

Mme Chemaganish a déclaré à l’enquête de la coroner mercredi que son fils Raphaël André avait grandi en forêt avec sa famille innue dans le nord du Québec et qu’il était habitué au froid. Mais elle précise que dans son village, on ne laisse personne dehors en plein hiver. «Quand quelqu’un frappe à la porte, on ouvre et on le laisse entrer.»

La coroner Stéphanie Gamache préside l’enquête sur le décès de Raphaël André, originaire de Matimekush-Lac John, près de la frontière avec le Labrador. Il avait 51 ans lorsqu’il est mort, en janvier 2021, dans une toilette chimique près d’un refuge pour sans-abri de Montréal qu’il fréquentait, dans le quartier Milton-Parc.

Ce décès est survenu après que le gouvernement du Québec a imposé un couvre-feu pour freiner la propagation de la COVID-19. Le refuge habituel de M. André avait aussi suspendu ses services de nuit en raison d’un problème de plomberie et d’une éclosion du virus.

Après sa mort, une clinique juridique représentant les personnes en situation d’itinérance a obtenu de la cour une ordonnance qui exemptait les sans-abri du couvre-feu provincial. Le gouvernement a alors accepté d’officialiser cette exemption.

L’enquête de la coroner Gamache, qui a débuté en mai, a entendu jusqu’ici des dizaines de témoins, dont des policiers, des travailleurs de la santé et des services sociaux et des dirigeants autochtones.

Mme Chemaganish a témoigné mercredi aux côtés du frère de M. André, Ghislain, ainsi qu’une autre membre de la famille qui traduisait de l’innu pour elle.

La mère a déclaré à la coroner qu’elle espérait que l’enquête aboutirait à davantage de places et à un meilleur traitement pour les personnes en situation d’itinérance, soulignant qu’elle avait visité le refuge où séjournait son fils et y avait vu des lits pliants sans draps.

Elle et le frère de la victime se sont demandé pourquoi il n’y avait pas assez de refuges à Montréal et comment les gens pouvaient manger à leur faim. «Montréal est grand, pourquoi n’arrivent-ils pas à leur trouver une maison ?», a-t-elle demandé.

La coroner Gamache était d’accord avec la mère sur la nécessité de plus de services, mais elle lui a rappelé que plus de 108 000 personnes avaient bénéficié de la tente Raphaël-André, un refuge d’appoint installé au square Cabot, au centre-ville de Montréal.

«Cela montre à quel point Raphaël a touché les gens», a déclaré la coroner.

La maman a exprimé sa gratitude pour l’enquête et les efforts de la coroner pour améliorer les conditions des itinérants. «Elle croyait être seule», a déclaré son interprète.

L’enquête de la coroner devrait se terminer plus tard ce mois-ci.

Partager cet article
S'inscrire
Me notifier des
guest
0 Commentaires
Inline Feedbacks
Voir tous les commentaires