Les démocrates partagés entre soutenir Joe Biden ou tirer la sonnette d’alarme

Stephen Groves, The Associated Press
Les démocrates partagés entre soutenir Joe Biden ou tirer la sonnette d’alarme

La performance désastreuse du président Joe Biden dans le débat présidentiel s’est répercutée dans tout le Parti démocrate, obligeant les législateurs à faire face à une crise qui pourrait bouleverser l’élection présidentielle et changer le cours de l’histoire américaine, en plus de soulever des questions quant au destin de la vice-présidente Kamala Harris.

Le président démocrate a indiqué qu’il n’avait pas l’intention d’abandonner la course contre Donald Trump, malgré le déroulement du débat qui a remis sur la table les questionnements quant à l’âge de M. Biden et sa capacité à exercer ses fonctions.

Le représentant Lloyd Doggett, du Texas, est devenu mardi le premier démocrate en fonction au Congrès à appeler Joe Biden à se retirer de la course, soutenant que celui-ci «a l’occasion d’encourager une nouvelle génération de dirigeants parmi lesquels un candidat peut être choisi pour unir (le) pays à travers un processus ouvert et démocratique».

«Sachant que, contrairement à Trump, le premier engagement du président Biden a toujours été envers notre pays, et non envers lui-même, j’espère qu’il prendra la décision douloureuse et difficile de se retirer. Je lui demande respectueusement de le faire», a soutenu M. Doggett, âgé de 77 ans.

Certains autres démocrates du Congrès ont exprimé ces derniers jours leur vive inquiétude non seulement sur la performance de leur leader lors du débat de 90 minutes la semaine dernière, mais également sur le niveau de transparence que son équipe a offert sur sa santé mentale.

Mardi, sur la chaîne d’information MSNBC, le représentant Jamie Raskin, un éminent démocrate du Maryland, a qualifié de «cible mouvante» la question de savoir si Joe Biden restera candidat à la présidentielle. «Il faut que cela aille vite», a-t-il ajouté.

Certains craignent que les faiblesses du président puissent freiner l’enthousiasme des électeurs potentiels, créant un effet d’entraînement qui nuirait aux démocrates alors qu’ils tentent de maintenir tant bien que mal une majorité au Sénat et de reprendre le contrôle de la Chambre.

Même si plusieurs démocrates n’ont pas appelé au retrait du président, ils ont également présenté la situation durement: si Joe Biden continue, il perdra.

«La vérité, je pense, c’est que Biden va perdre face à Trump», a mentionné la représentante démocrate Marie Gluesenkamp Perez à une chaîne de télévision affiliée à ABC. «Je sais que c’est difficile, mais je pense que des dégâts ont été causés par ce débat.»

Vague de soutien au président

Jusqu’à présent, les principaux dirigeants démocrates ont pour la plupart soutenu le président dans leurs déclarations publiques.

De nombreux alliés de Joe Biden ont reproché aux médias d’être obsédés par les capacités mentales de ce dernier, arguant que l’accent devrait plutôt être mis sur le bilan de Donald Trump, qui a refusé d’accepter les résultats des élections de 2020 qu’il a perdues face à son adversaire et qui a menti à plusieurs reprises.

«Il n’y a pas eu de discussions entre les hauts dirigeants pour autre chose que de s’assurer que nous continuons à articuler au peuple américain une vision convaincante de l’avenir en ce qui concerne les questions d’importance autour de l’économie», a déclaré le leader démocrate à la Chambre des représentants, Hakeem Jeffries, aux journalistes lundi à Pittsburgh.

Le chef de la majorité au Sénat, Chuck Schumer, un démocrate de New York, s’est exprimé sur le réseau social X après le débat, affirmant que les électeurs avaient le choix entre «quatre années supplémentaires de progrès, ou quatre années supplémentaires d’attaques contre nos droits fondamentaux et notre démocratie».

Le représentant James Clyburn, un démocrate de Caroline du Sud qui a aidé Joe Biden à remporter l’investiture démocrate en 2020, a exhorté son parti la semaine dernière à «maintenir le cap». Mardi, ce dernier a ajouté qu’il soutiendrait la vice-présidente Kamala Harris si Joe Biden se retirait.

L’avenir de Kamala Harris

La vice-présidente Kamala Harris a lancé sa troisième collecte de fonds depuis le débat la semaine dernière, en concédant devant quelques dizaines de donateurs à San Francisco que le président n’était pas au sommet de sa forme durant celui-ci. Cependant, a-t-elle ajouté, «le résultat de ces élections ne peut être déterminé en prenant en compte un seul jour du mois de juin».

Le moment ne pourrait guère être plus délicat pour Mme Harris, âgée de 59 ans, qui est la première femme, noire et personne d’origine sud-asiatique à occuper le poste de vice-présidente. Bien que certains démocrates la désignent comme une successeure logique à Joe Biden si celui-ci se retire, d’autres dressent des listes de remplaçants potentiels qui ne l’incluent pas du tout.

Chad Griffin, membre du comité des finances nationales de la campagne, a déclaré que la Maison-Blanche avait la chance d’avoir une vice-présidente «dure à cuire» et «prête à défendre le président et à parler des enjeux de cette élection».

«C’est une équipe, a-t-il soutenu. Et nous voyons de plus en plus l’autre moitié de cette équipe.»

Cependant, les cotes de popularité de Mme Harris sont faibles et elle est une cible fréquente des républicains, qui disent qu’elle attend dans les coulisses au cas où M. Biden ne serait pas en mesure de terminer un deuxième mandat. «Votez Joe Biden aujourd’hui, obtenez Kamala Harris demain», mentionnait une publicité républicaine.

Seuls 39 % des adultes américains ont une opinion favorable de Mme Harris, ce qui correspond aux 40 % de Joe Biden, selon un sondage AP-NORC réalisé en juin. Cependant, sa note défavorable est de 49 %, contrairement à 57 % pour M. Biden. De plus, 12 % des répondants ont déclaré qu’ils ne connaissaient pas suffisamment Mme Harris pour avoir une opinion sur elle.

Si Joe Biden se retire, un large éventail de démocrates sont prêts à tenter leur chance à la Maison-Blanche, notamment le gouverneur de la Californie Gavin Newsom, le gouverneur de l’Illinois J.B. Pritzker et la gouverneure du Michigan Gretchen Whitmer.

Cependant, Mme Harris présente des avantages évidents. Selon les règles de financement des campagnes électorales, elle pourrait facilement avoir accès à l’argent collecté pour la réélection de son collègue. Elle possède également une expérience difficile à acquérir en matière de politique étrangère, après avoir parcouru le monde pour le compte de la Maison-Blanche et rencontré des dizaines de dirigeants mondiaux.

Lors d’une entrevue avec l’Associated Press l’année dernière, cette dernière a rejeté l’idée de remplacer le président affirmant que «Joe Biden ira bien, donc cela ne se concrétisera pas».

Cependant, elle a déclaré que chaque vice-président devait être prêt à intervenir si nécessaire. «Je ne suis pas différente», avait signalé Mme Harris.

Partager cet article
S'inscrire
Me notifier des
guest
0 Commentaires
Inline Feedbacks
Voir tous les commentaires