Les Syriens votent lundi lors des élections législatives

Albert Aji et Abby Sewell, The Associated Press
Les Syriens votent lundi lors des élections législatives

Les Syriens votaient lundi pour élire les membres d’un nouveau parlement lors d’élections qui ne devraient pas réserver de surprises, mais qui pourraient ouvrir la voie à un amendement constitutionnel visant à prolonger le mandat du président Bashar Al-Assad.

Ce vote est le quatrième en Syrie depuis les manifestations antigouvernementales massives de 2011 et la répression brutale des forces de sécurité qui ont dégénéré en une guerre civile continue. Les élections surviennent aussi alors qu’une crise économique s’empare du pays, alimentant les manifestations dans le sud.

Les élections législatives syriennes de 2024 excluent le nord-ouest de la Syrie contrôlé par les rebelles et le nord-est du pays dirigé par les Forces démocratiques syriennes, soutenues par les États-Unis et dirigées par les Kurdes. Le nombre d’électeurs admissibles n’a pas non plus été annoncé et, contrairement aux élections présidentielles, les millions de Syriens de la diaspora – dont le nombre a explosé depuis la guerre civile – ne sont pas qualifiés pour voter pour les législateurs.

Les pays occidentaux et les détracteurs du président Al-Assad affirment que les élections dans les zones contrôlées par le gouvernement en Syrie ne sont ni libres ni équitables.

Cette année, 1516 candidats approuvés par le gouvernement sont en lice pour les 250 sièges de l’Assemblée du peuple. Quelque 8151 bureaux de vote ont été installés dans 15 circonscriptions électorales situées dans les zones contrôlées par le gouvernement, et les résultats devraient être annoncés lundi soir ou le lendemain.

Lors du dernier tour des élections en 2020, les résultats ont été retardés de plusieurs jours en raison de problèmes techniques, selon des responsables. Le parti Baas du président Al-Assad a remporté 166 sièges, en plus de 17 autres partis alliés, tandis que 67 sièges ont été attribués à des candidats indépendants.

Détérioration de l’économie

Le scrutin a lieu alors que l’économie syrienne continue de se détériorer après des années de conflit, de sanctions menées par l’Occident, de la pandémie de COVID-19 et de la diminution de l’aide due à la lassitude des donateurs.

Pendant ce temps, la valeur de la monnaie nationale du pays par rapport au dollar américain a atteint des niveaux plus bas, déclenchant une inflation alimentaire et pétrolière. Le gouvernement a également partiellement annulé son programme de subventions il y a près d’un an, tout en doublant les salaires du secteur public et des retraites.

Les électeurs ont déclaré à l’Associated Press que remédier à l’économie en difficulté de la Syrie était une question clé.

«Nous espérons que notre confiance dans ces nouveaux législateurs apportera du bien au pays et améliorera les conditions», a déclaré Ahmad al-Afoush, âgé de 40 ans, après avoir voté à Damas.

Shirine al-Khleif espère que le nouveau parlement prendra des mesures proactives pour améliorer la situation en Syrie.

«Je ne veux pas dire que les prédécesseurs n’étaient pas bons. Nous voulons juste que les choses s’améliorent», a affirmé l’ingénieure de 47 ans.

Dans la province méridionale de Soueida, à majorité druze, où des manifestations antigouvernementales ont lieu régulièrement depuis près d’un an en raison de la misère économique, de nombreuses personnes ont appelé au boycottage des élections. Des vidéos mises en ligne par Suwayda24, un collectif médiatique militant local, et d’autres personnes montraient des manifestants saisissant les boîtes de scrutin d’un camion pour tenter de les empêcher d’atteindre les bureaux de vote.

Ailleurs, la campagne a été discrète, les candidats se concentrant principalement sur des slogans généraux tels que l’unité nationale et la prospérité.

Des résultats prévisibles

Vladimir Pran, conseiller indépendant pour les processus politiques et électoraux de transition, a déclaré que la partie compétitive du processus électoral syrien intervient avant le début du scrutin, lorsqu’une liste votée des candidats du parti Baas est envoyée au commandement central du parti, leur permettant de se présenter aux élections.

«Les élections sont en réalité déjà terminées (…) avec la fin du processus primaire», a-t-il expliqué. Une fois la liste du parti Baas établie, «vous pourrez vérifier la liste et les résultats, et vous verrez que littéralement tous seront au Parlement».

Le nombre de titulaires figurant sur la liste définitive cette année était relativement faible, ce qui suggère un remaniement au sein du parti Baas.

Maroun Sfeir, consultant en processus électoraux et politiques de transition, a déclaré que les 169 candidats présentés par le seul parti Baas dépassent la marge de 167 députés nécessaire pour proposer un amendement constitutionnel, protéger le président d’être accusé de trahison et d’opposer son veto à la législation.

En outre, 16 candidats de partis alliés au Baas se présentent également sur la même liste, a-t-il indiqué. «Il ne vous manque que trois députés pour obtenir les trois quarts du parlement, ce qui est nécessaire pour (adopter) un amendement constitutionnel.»

Même si cela laisse 65 places ouvertes aux candidats indépendants, M. Sfeir a dit qu’il ne fallait pas s’attendre à ce qu’ils présentent un véritable bloc d’opposition.

«Ils sont tous prévérifiés (…) pour garantir qu’ils sont tous loyaux ou sans aucune menace», a-t-il indiqué.

Alors que le président Al-Assad est confronté à des limites de mandat qui mettraient fin à sa présidence en 2028, le prochain parlement devrait tenter d’adopter un amendement constitutionnel pour prolonger son mandat.

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