OTTAWA — L’organisme choisi par Google pour distribuer aux médias d’information canadiens les 100 millions $ par année promis a rendu public son modèle de gouvernance, qui, selon lui, se concentre sur la durabilité, l’équité et l’innovation au sein de l’industrie.
Le Collectif canadien de journalisme a soumis cette semaine au CRTC la structure du conseil d’administration qui supervisera finalement l’allocation des fonds de Google. Ce cadre de gouvernance a été rendu public mercredi.
Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) avait demandé ces informations dans le cadre des consultations publiques visant à appliquer la Loi sur les nouvelles en ligne, qui oblige les «géants du web» à conclure des accords avec les médias d’information canadiens pour l’utilisation de leur contenu.
Le collectif a eu peu de temps pour développer le cadre de gouvernance en vertu de cette loi qui est surveillée de près par d’autres pays souhaitant mettre en œuvre quelque chose de semblable, notamment les États-Unis.
Il appartiendra ultimement au CRTC de déterminer si le plan du nouvel organisme sans but lucratif répond à ses attentes. Si le modèle de gouvernance est jugé satisfaisant, le CRTC accordera à Google une exemption à la Loi sur les nouvelles en ligne.
Il s’agit d’une étape cruciale alors que l’industrie du journalisme s’unit pour garantir que l’argent soit distribué équitablement, quels que soient le modèle économique et les intérêts personnels de chaque média individuel.
Un autre collectif, dirigé celui-là par de grands médias d’information, n’avait pas été retenu par Google.
Représentation des grands et petits médias
Le Collectif canadien de journalisme précise que son conseil d’administration sera composé de 19 personnes: huit membres représentant les éditeurs, huit membres représentant les radiodiffuseurs et trois membres indépendants.
Les exigences pour les 19 postes consistent notamment à garantir la représentation des grands et petits médias, des entreprises émergentes, des organismes à but non lucratif et des groupes minoritaires autochtones, noirs et racisés, francophones et de langue officielle.
Le modèle de gouvernance comprend également deux conseils distincts, qui formuleraient des recommandations au nom des éditeurs et des radiodiffuseurs, ainsi qu’un comité exécutif qui nommerait des conseillers sans droit de vote au conseil d’administration.
CBC/Radio-Canada, qui bénéficie d’une garantie allant jusqu’à 7 millions $ provenant de cette cagnotte, aura droit à un siège au conseil d’administration et au comité exécutif, mais son représentant siégera en tant qu’observateur sans droit de vote.
Le collectif a également l’intention de nommer un ombudsman auprès duquel le public et le conseil d’administration pourront exprimer leurs préoccupations, ainsi qu’un comité de règlement des différends qui aurait le pouvoir d’enquêter sur les griefs.
«La structure de gouvernance de haut niveau proposée vise à mettre en œuvre la loi et les règlements en promouvant la durabilité, l’équité et l’innovation dans l’écosystème canadien de l’information», a soutenu Jean La Rose, porte-parole et administrateur par intérim du conseil d’administration du collectif, dans un communiqué.
La structure de gouvernance permettra à chaque membre d’avoir une représentation égale et englobera tous les types d’organismes de presse, petits et grands, urbains et ruraux, a expliqué M. La Rose.
Exemption à la loi
Google a accepté l’an dernier de maintenir les nouvelles sur son moteur de recherche et de verser aux médias d’information canadiens 100 millions $ par année, indexés sur l’inflation, afin d’être exemptés de la Loi sur les informations en ligne.
Une fois que Google aura obtenu cette exemption, l’entreprise devra remettre dans les 60 jours l’argent au collectif, qui élira ensuite son conseil d’administration et distribuera l’argent aux médias admissibles.
«Notre soumission (au CRTC) est la première étape pour décrire comment le collectif établira des politiques et des procédures qui répondront aux objectifs et maintiendront les normes les plus élevées d’intégrité, d’indépendance, de transparence et de responsabilité», a déclaré M. La Rose.
«Notre structure de gouvernance comprend des rôles et des dirigeants généraux et indépendants pour favoriser la confiance du public canadien.»
Cette structure continuerait d’être façonnée tout au long des consultations menées par le CRTC et grâce à l’engagement des parties prenantes, a déclaré le collectif.
Il promet également de soutenir les médias d’information émergents, les petits marchés et les modèles commerciaux innovants, tout en garantissant l’équité dans le secteur.
«À mesure que l’environnement de l’information numérique et les comportements des consommateurs évoluent, aucun modèle commercial existant ne devrait être représenté de manière disproportionnée au détriment de l’innovation, de la durabilité et de la portée géographique», indique le mémoire soumis au CRTC.
Le collectif a été fondé en mai par un groupe intérimaire d’éditeurs et de diffuseurs qui représentent notamment l’information francophone, communautaire et autochtone, ainsi que des médias qui représentent spécifiquement les Canadiens noirs et sous-représentés.
Choisi pour ses valeurs communes
Google a choisi ce Collectif canadien de journalisme pour gérer son fonds, affirmant dans un blogue le mois dernier que ses principes étaient conformes aux siens. Ces principes comprennent la diversité, une structure de gouvernance solide, un haut niveau de transparence et l’assurance qu’autant de financement que possible irait aux médias d’information.
Plus tôt cette année, Google a lancé un appel ouvert aux médias d’information qui souhaiteraient recevoir une compensation en vertu de la Loi sur les nouvelles en ligne, et environ 1500 médias l’ont demandée.
Le collectif examinera éventuellement toutes ces demandes et distribuera les fonds aux médias d’information qui répondent aux critères énoncés dans la loi et les règlements.
L’argent sera distribué proportionnellement en fonction du nombre de journalistes à temps plein employés par les entreprises de presse.