OTTAWA — Le gouvernement libéral affirme que des mesures visant à surveiller et à évaluer les menaces d’ingérence étrangère feront partie de toutes les futures élections partielles fédérales, et pas seulement des élections générales.
Le ministre de la Sécurité publique, Dominic LeBlanc, a déclaré lundi que le «Groupe de travail sur les menaces en matière de sécurité et de renseignements visant les élections» surveillera tout signe d’ingérence lors des deux élections partielles annoncées pour le 16 septembre — l’une dans LaSalle-Émard-Verdun, à Montréal, et l’autre à Winnipeg, au Manitoba.
Le Groupe de travail, créé en 2019 pour protéger le processus électoral fédéral, est composé de représentants du Service canadien du renseignement de sécurité, de la Gendarmerie royale du Canada, d’Affaires mondiales Canada et du Centre de la sécurité des télécommunications — l’agence canadienne de cyberespionnage.
Le Groupe de travail a déjà une certaine expérience dans la surveillance d’élections complémentaires, tenues cette année et en 2023.
Pendant les campagnes électorales pour les deux élections complémentaires de septembre, le groupe fournira des évaluations du renseignement à un comité de sous-ministres. À son tour, ce comité informera et conseillera les ministres chargés de lutter contre l’ingérence étrangère et de protéger les institutions démocratiques, a indiqué le ministre LeBlanc dans un communiqué.
Des voies de communication «continuent d’être établies» avec les représentants des différents partis politiques pour assurer que «des échanges puissent avoir lieu, au besoin, au cours de la période de l’élection partielle», ajoute le communiqué.
Le Groupe de travail produira également un rapport classifié et un rapport non caviardé sur son évaluation globale de toute tentative d’ingérence étrangère lors d’une élection partielle.
Le rapport classifié sera mis à la disposition du premier ministre, des ministres concernés, du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, ainsi que des représentants désignés des partis possédant l’habilitation de sécurité appropriée.
Situation différente dans une partielle
Le processus des élections complémentaires diffère toutefois de celui des élections générales, lorsque le cabinet fédéral assume un rôle de «gardien» limité à des fonctions de routine et non controversées.
En vertu d’un protocole mis en place en 2019 pour les élections générales, une annonce publique serait faite si un comité de hauts fonctionnaires déterminait qu’un incident – ou une accumulation d’incidents – menaçait la capacité du Canada à tenir un vote libre et équitable.
Ces hauts fonctionnaires membres du Protocole public en cas d’incident électoral majeur reçoivent des informations de sources comme le Groupe de travail sur les menaces en matière de sécurité et de renseignements visant les élections.
Aucune annonce de ce type n’a été faite lors des élections générales de 2019 ou de 2021. Les libéraux ont été réélus avec des mandats minoritaires, tandis que les conservateurs formaient l’opposition officielle.
Mais dans un rapport récent, un organisme national de surveillance de l’espionnage a conclu que le Groupe de travail et le comité de hauts fonctionnaires «n’avaient pas été conçus pour s’attaquer convenablement à l’ingérence étrangère traditionnelle d’origine humaine».
Le rapport de l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement souligne que le Groupe de travail se concentre sur les activités de menace pendant la période électorale, mais «que l’ingérence étrangère a aussi lieu entre ces périodes».
Peu de temps pour enquêter
«Contrairement aux opérations ponctuelles ou aux campagnes de grande envergure (notamment la désinformation en ligne menée à grande échelle), le renseignement sur l’ingérence étrangère traditionnelle dans les élections se veut plutôt granulaire et spécifique, et s’intéresse davantage aux activités que des particuliers mènent dans certaines circonscriptions», lit-on dans le rapport de l’Office de surveillance.
«L’évaluation de l’incidence de ces activités au niveau des circonscriptions nécessite de recevoir et d’analyser continuellement tout le renseignement pertinent, ce qui est particulièrement difficile compte tenu de la brève période durant laquelle une élection se déroule.»
De même, une caractéristique essentielle de l’ingérence étrangère traditionnelle est qu’elle se produit sur le long terme et ne se limite pas aux seules périodes électorales, souligne l’organisme de surveillance. Même si le groupe de travail fonctionne en permanence, sa capacité et son rythme opérationnel sont réduits en dehors des périodes électorales «normales».
Les conclusions de l’agence de surveillance des activités de renseignement font suite à un rapport intermédiaire d’une commission d’enquête fédérale, qui a conclu que l’ingérence étrangère de la Chine n’avait pas affecté les résultats globaux des élections générales de 2019 et de 2021.
Dans son rapport, la juge Marie-Josée Hogue a estimé que même s’il était possible que les résultats dans un petit nombre de circonscriptions aient été affectés par de l’ingérence étrangère, cela ne pouvait être affirmé avec certitude.