Les salons funéraires mettent en garde contre les avis de décès piratés

Cassidy McMackon, La Presse Canadienne
Les salons funéraires mettent en garde contre les avis de décès piratés

HALIFAX — Des directeurs funéraires de l’ensemble du pays mettent en garde les familles endeuillées contre les sites internet qui republient des avis de décès à des fins lucratives.

Jim Bishop, le directeur d’un salon funéraire de Fredericton, au Nouveau-Brunswick, dit avoir remarqué un nombre croissant de clients qui se plaignent d’avis de décès modifiés comportant parfois des erreurs publiés sur des sites comme Echovita.

M. Bishop reproche à ces entreprises de s’emparer de renseignements glanés sur les sites des salons funéraires ou des journaux pour les republier sur le leur, en y ajoutant l’option pour acheter des fleurs ou des chandelles numériques. Il ajoute que cette collecte de données pose «un problème moral» parce qu’elle profite des avis de décès sans la permission des familles.

«Quand les gens font une recherche sur Google à partir du nom d’une personne, ils ne réalisent pas toujours qu’ils ne se retrouvent pas sur le site d’un salon funéraire. Ils se retrouvent sur le site d’une autre entreprise. Ils pensent que c’est sur le nôtre, mais ce n’est pas le cas.»

Depuis la mi-juillet, une dizaine de personnes l’ont prévenu que les avis de décès d’un proche avaient été récupérés.

Selon le Registraire des entreprises du Québec, Echovita est établi à Québec.

Selon Jeff Weafer, le président de l’Association des services association des services funéraires du Canada, cette pratique pose un problème, car la rédaction d’un avis de décès est souvent la dernière chance d’une famille de raconter l’histoire d’un être cher. Qu’un site récupère sans sa permission un avis de décès peut être comparé à une violation de vie privée pendant une période difficile.

«Pour les familles, le deuil s’exprime en partie par l’histoire de leur père, de leur frère, de leur mère qu’elles veulent raconter fièrement. C’est très thérapeutique, qu’on le fasse par l’entremise d’un avis de décès ou d’un message sur Facebook», mentionne-t-il.

Le Bureau d’éthique commerciale, une agence non gouvernementale établie dans plusieurs villes en Amérique du Nord, n’a pas donné d’accréditation à Echovita. Selon le site internet du BEC, cinq plaintes ont été déposées contre cette entreprise. L’une d’entre elles reprochait en 2022 à Echovita d’être «une entreprise d’hameçonnage» pour avoir publié des versions modifiées, mais non autorisées, d’un avis de décès, causant une grande détresse au sein de la famille endeuillée.

À l’époque, un responsable non identifié d’Echovita avait répondu que l’avis de décès avait été retiré de son site et s’était excusé de l’erreur commise tout en défendant le droit de l’entreprise à diffuser des renseignements déjà publiés sur internet.

D’autres erreurs similaires ont été signalées, peut-on constater sur le site du Bureau d’éthique commerciale.

Deux plaintes ont également été déposées auprès de la Bereavement Authority of Ontario, une société à qui le gouvernement provincial ontarien a confié le soin d’administrer les dispositions de la la sur les services de funérailles, d’inhumation et de crémation, l’une en février 2021, l’autre en février de cette année.

Les porte-parole d’Echovita ont refusé de donner une entrevue à La Presse Canadienne. Dans une déclaration transmise par courriel, un relationniste a mentionné que si une personne endeuillée remarquait une erreur dans un avis de décès, elle peut demander directement une correction sur le site internet. Il n’a toutefois pas précisé les méthodes de vérification de l’entreprise.

Echovita prétend que la republication d’avis de décès se justifie, car il s’agit du partage d’une information déjà diffusée dans l’espace public.

En 2019, l’actuel président d’Echovita, Paco Leclerc, était l’un des responsables d’un site internet aujourd’hui disparu, Afterlife, qui avait été condamné par la Cour fédérale à verser 20 millions $ en dommages pour l’utilisation non autorisée d’avis de décès et de photo.

Selon le jugement, «la preuve établit qu’Afterlife a associé les œuvres originales à un produit ou à un service, même si le lien entre les deux n’était pas très important, en ajoutant la vente d’annonces, de fleurs et de bougies aux pages affichant les articles nécrologiques.»

Afterlife a ensuite déclaré faillite.

MM. Bishop et Weafer recommandent aux familles endeuillées de demander à toute entreprise tierce de retirer les avis de décès non autorisés sur leur site ou de contacter le bureau de protection du consommateur provincial. Tous deux disent souhaiter l’adoption de règles plus sévères pour contrer les sites qui piratent des avis de décès. L’Association des services association des services funéraires du Canada dit toujours attendre «une réponse significative» des parlementaires fédéraux.

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