Des scientifiques ont découvert une exoplanète qui pourrait peut-être abriter la vie

Caroline Chatelard, La Presse Canadienne
Des scientifiques ont découvert une exoplanète qui pourrait peut-être abriter la vie

MONTRÉAL — Une équipe internationale, dont font partie des chercheurs de l’université McGill, a récemment découvert ce qui pourrait être une seconde Terre. Gliese 12b, située à 40 années-lumière, présente une taille très similaire à celle de la Terre, avec des températures tempérées, et porte l’espoir d’une présence éventuelle d’eau sous forme liquide. Et en astronomie, qui dit «eau» dit «vie». Gliese 12b pourrait potentiellement accueillir une forme de vie. Locale, ou importée.

«Nous ne sommes pas encore en mesure de détecter une forme de vie», précise rapidement Vigneshwaran Krishnamurthy pour modérer les espoirs. L’astronome et ingénieur aérospatial à l’Institut spatial Trottier de McGill explique que l’équipe à laquelle il appartient doit encore tenter de détecter si cette planète a une atmosphère.

«Si cette planète n’a pas de nuages, rien qui puisse refléter les rayons du soleil, les températures devraient être de 50 à 70 degrés Celsius. Ce sont les températures que nous nous attendons à trouver, détaille-t-il. Mais s’il y a des nuages, cela peut baisser jusqu’à nos températures modérées.» De ces températures semblables aux nôtres dépend la possibilité que de l’eau sous forme liquide puisse exister à la surface de l’exoplanète.

L’autre élément important est la composition de l’éventuelle atmosphère de Gliese 12b. M. Krishnamurthy nous rappelle la recette de la vie. «Il faut de l’eau, de l’oxygène, des molécules complexes dans l’atmosphère, pas juste de l’hydrogène, de l’hélium. Il faut aussi quelque chose de plus lourd, comme le dioxyde de carbone, le méthane.»

Fait curieux, si tous les ingrédients nécessaires à la vie sont présents et que la recette a porté ses fruits, un ingrédient supplémentaire devrait apparaître dans l’atmosphère, une biosignature que l’on connaît tous: le méthane. «Il y a une énorme quantité de méthane dans notre atmosphère qui est produit par les formes de vie, explique l’astronome. Donc s’il n’y a aucune forme de vie, la production de méthane ne devrait pas être aussi élevée que dans notre atmosphère.»

Dans le cas de Gliese 12b, la technologie actuelle ne permet pas de détecter ne serait-ce que des microbes, encore moins des humains ou des extraterrestres, rappelle Vigneshwaran Krishnamurthy. L’étude de l’atmosphère par l’équipe que mènent les chercheurs japonais Masayuki Kuzuhara et Akihiko Fukui, ne confirmera pas l’existence d’une forme de vie, insiste-t-il, mais ouvrira seulement le champ des possibles, à savoir si Gliese 12b pourrait éventuellement abriter ou accueillir la vie telle que nous la connaissons.

Étoile, ma naine étoile

Le soleil autour duquel se trouve Gliese 12b joue un rôle non négligeable dans l’importance de cette découverte. Gliese 12, qui a donné son nom peu mélodieux à Gliese 12b, est ce qu’on appelle une naine rouge. Il s’agit d’une étoile plus petite et moins chaude que notre Soleil.

De ce fait, la distance nécessaire entre une planète et Gliese 12 pour que les températures ne soient ni trop chaudes ni trop froides pour qu’elle abrite de l’eau sous forme liquide est plus réduite par rapport à celle nécessaire dans notre système solaire. L’intérêt est qu’il faut donc seulement 12 jours à Gliese 12b pour faire le tour de son étoile, quand il en faut 365 à notre Terre.

Cette différence permet aux scientifiques d’observer l’exoplanète tous les 12 jours, car ils ont besoin qu’une planète se trouve devant son étoile, dans leur ligne de mire, pour pouvoir l’étudier. «Si on a besoin d’observer cinq fois Gliese 12b, ça ne prend que deux mois», se réjouit M. Krishnamurthy. «Pour une planète comme la Terre, la même chose prendrait cinq ans.»

Outre la perspective de trouver un endroit ou relocaliser l’humanité, comme l’a dépeint Christopher Nolan dans son film «Interstellaire», une planète similaire à la Terre telle que Gliese 12b permettrait de mieux comprendre notre propre monde.

Le point que soulève M. Krishnamurthy, c’est que nous avons, grâce à la géologie et à la chimie des minéraux, des données sur la planète Terre telle qu’elle était il y a plusieurs millions d’années et son évolution. Ce que nous n’avons pas c’est un point de comparaison. «Nous ignorons si le chemin qu’a pris la Terre est le chemin que toute planète (aux caractéristiques similaires) aurait pris, continue l’astronome. Comprendre un objet très similaire à la Terre, qui a une atmosphère qui peut avoir évolué différemment, pourrait nous donner une idée de comment les autres planètes ont évolué, et même combler les trous dans notre compréhension de la Terre.»

De plus, Gliese 12b rentre dans la course aux exoplanètes habitables directement en première position. «La Terre est la seule planète que nous connaissions actuellement qui possède tous les ingrédients pour abriter la vie», mentionne le chercheur. Les scientifiques du monde entier n’ont encore trouvé aucune planète abritant la vie jusqu’à présent ni aucune preuve prouvant qu’une autre planète possède tous les éléments nécessaires pour accueillir la vie.

La communauté scientifique n’a que quelques exoplanètes candidates à une vérification de leur atmosphère pour y chercher des traces de biosignature. Cependant, aucune ne coche autant de cases que Gliese 12b. Une exoplanète, pour constituer une Terre 2.0, doit d’abord avoir la bonne distance par rapport à son étoile pour que les températures soient comparables aux nôtres, pointe le scientifique. Elle doit aussi avoir une taille et une masse similaires à la Terre pour que la gravité n’attire pas trop de gaz à sa surface.

Ces seuls critères réduisent le nombre d’exoplanètes potentiellement habitables à une centaine, tout au plus, sur les quelque 5500 dont nous ayons connaissance. La présence d’une atmosphère et sa composition viennent ensuite.

Le fait que Gliese 12b ne soit qu’à un jet de pierre interstellaire est la cerise sur le gâteau, car elle est à ce jour la potentielle Terre 2.0 la plus proche de nous et donc la première à explorer quand la technologie le permettra. L’expatriation sur Gliese 12b n’est pas pour demain. Même si la technologie évolue de plus en plus vite, il faudra encore du temps avant de trouver le moyen de voyager jusque dans un autre système solaire. Un voyage qui ne serait pas des moindres puisque se rendre sur Gliese 12b prendrait environ 4000 ans.

L’équipe à l’origine de la découverte se trouve pour l’instant à l’étape de faire des demandes auprès des grandes agences spatiales, comme la NASA ou l’Agence spatiale canadienne, afin de pouvoir utiliser l’an prochain leurs télescopes pour observer de très précisément l’atmosphère Gliese 12b.

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