L’intelligence artificielle pourrait détecter la fibrillation auriculaire

Jean-Benoit Legault, La Presse Canadienne
L’intelligence artificielle pourrait détecter la fibrillation auriculaire

MONTRÉAL — Un algorithme d’intelligence artificielle est en mesure de détecter avec une grande précision la survenue future de fibrillation auriculaire à partir d’un simple électrocardiogramme, indique une étude réalisée récemment par des chercheurs de l’Institut de cardiologie de Montréal.

La fibrillation auriculaire (FA) est la forme la plus courante d’arythmie soutenue, mais elle est souvent asymptomatique. Sans traitement, elle augmente de façon marquée le risque d’accident vasculaire cérébral, de déclin cognitif et de démence.

«Il y a tellement d’informations cachées sur l’électrocardiogramme que même l’œil d’un expert n’est pas capable de voir que le patient va développer une arythmie quelconque», a expliqué le docteur Rafik Tadros, qui est cardiologue-arythmologue et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en génétique cardiovasculaire translationnelle à l’ICM.

«Et donc l’intelligence appliquée à l’électrocardiogramme nous permet en fait d’extraire toutes les données de l’électrocardiogramme et prédire d’une façon assez précise, de façon spectaculaire en fait, la survenue de fibrillation auriculaire dans le futur.»

L’utilisation de cet algorithme représenterait donc un progrès majeur dans la détection précoce de la FA et la prévention de ses complications, a-t-on expliqué par voie de communiqué.

Le docteur Tadros et ses collègues ont utilisé près d’un million d’électrocardiogrammes provenant de quelque cent mille patients de l’Institut de cardiologie pour «enseigner» à l’outil d’intelligence artificielle à détecter une fibrillation auriculaire incidente. La précision de l’outil a ensuite été confirmée auprès d’une deuxième cohorte dans un hôpital américain.

«Ça nous démontre que le modèle est vraiment efficace, pas seulement pour la population de l’ICM, mais aussi au-delà», a dit le docteur Tadros.

L’étude indique aussi que l’apprentissage profond offre des performances supérieures pour la prédiction de la fibrillation auriculaire comparativement aux prédicteurs cliniques traditionnels et à la prédiction génétique.

Le docteur Tadros et ses collaborateurs sont maintenant à discuter du déploiement clinique de leur outil, ce qui pourrait survenir assez rapidement. Une fois l’outil déployé, ce sont les ECG de tous les patients qui se présentent à l’ICM, peu importe leur problème de santé, qui seront analysés à la recherche de signes d’une fibrillation auriculaire présente ou à venir.

«C’est le même principe, par exemple, que pour le dépistage du cancer du sein ou du cancer du colon, a expliqué le docteur Tadros. Initialement c’est asymptomatique, puis si on le détecte précocement, on peut prévenir les complications.»

Les patients identifiés par l’outil d’IA pourraient alors être soumis à une surveillance étroite de leur ECG pendant deux semaines, avec un appareil qu’ils porteraient en tout temps, pour détecter la fibrillation auriculaire intermittente, a-t-il ajouté.

La fibrillation auriculaire touche plus de 2 % de la population âgée de 65 ans, un pourcentage qui grimpe à 10 % chez les 80 ans et plus.

L’étude a été menée par le docteur Gilbert Jabbour, qui est étudiant en recherche, sous la direction du docteur Robert Avram, qui est chercheur en intelligence artificielle et directeur du laboratoire HeartWise.ai, et du docteur Tadros. Tous sont à l’Institut de cardiologie de Montréal.

Les résultats de l’étude ont été publiés par le European Heart Journal. Ils sont basés sur l’analyse de plus d’un million d’électrocardiogrammes provenant de plus de 250 000 patients. Les conclusions ont aussi été présentées le 1er septembre dernier au Congrès européen de cardiologie, à Londres.

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