MONTRÉAL — Air Canada règle les «derniers détails» du plan de réduction de ses activités qu’il mettra en place si les négociations avec ses pilotes ne débouchent pas d’ici la fin de la semaine et qu’un arrêt de travail est déclenché.
Dès dimanche, l’employeur et le syndicat auront la possibilité de déposer un préavis de grève ou de lock-out de 72 heures, ce qui entraînerait un arrêt de travail à compter du milieu de la semaine prochaine.
Dans ce contexte, le transporteur a annoncé lundi être à fignoler les derniers détails de son plan de réduction des activités, qui pourrait être progressivement mis en place dès qu’un préavis de grève ou de lock-out sera déposé, soit potentiellement dimanche.
Par voie de communiqué, l’entreprise montréalaise semblait peu optimiste de parvenir à une entente rapide avec l’Association internationale des pilotes de ligne (ALPA), soutenant que les deux parties restent «très éloignées».
Le président et chef de la direction d’Air Canada, Michael Rousseau, a soutenu que pour éviter une impasse, l’ALPA devra modérer ses revendications salariales. Selon lui, les demandes du syndicat «dépassent largement la moyenne des hausses salariales au Canada».
Il a ajouté qu’Air Canada ferait tout pour «protéger nos clients d’un arrêt de travail de plus en plus probable», mais que l’entreprise pourrait «prendre la décision extrêmement difficile d’amorcer l’arrêt ordonné des services d’Air Canada».
«Nous sommes conscients des inconvénients que cette situation pourrait causer à nos clients, et nous en sommes désolés. Cependant, un arrêt ordonné est la seule option responsable à notre disposition», a poursuivi M. Rousseau
Les 5400 pilotes d’Air Canada membres de l’ALPA se sont dotés d’un mandat de grève qui a été appuyé à 98 % par les syndiqués.
Les négociations concernant le renouvellement de la convention collective sont en cours depuis juin 2023. Les pilotes réclament de meilleurs salaires, de meilleures prestations de retraite et des améliorations à leur qualité de vie. Leur employeur a qualifié leurs revendications d’excessives.
Selon une source proche des négociations, Air Canada propose une augmentation salariale de 30 % sur quatre ans, ainsi que des améliorations aux avantages sociaux. Cette source a appris que les pilotes demandent des augmentations salariales entre 30 et 60 %.
Les impacts sur les clients
Air Canada a déjà annoncé que ses clients qui ont un vol prévu entre le 15 et le 23 septembre peuvent apporter sans frais des changements à leur réservation, s’ils le souhaitent, ou recevoir un crédit pour un voyage futur. Cette politique sera élargie au besoin, a-t-on fait savoir.
L’entreprise a également pris des arrangements avec d’autres transporteurs afin d’offrir des places à ses clients en cas d’annulation de ses propres vols, mais a prévenu que le nombre de places disponibles avec d’autres transporteurs risque d’être inférieur à la demande.
La compagnie aérienne, qui a déjà commencé à limiter l’acceptation de certaines marchandises dans sa division cargo, a averti que certains services tels que les forfaits vacances pourraient être supprimés dès vendredi.
«Air Canada devrait cesser de menacer de perturber le transport aérien et venir à la table des négociations avec des propositions sérieuses», a indiqué Charlene Hudy, responsable d’Air Canada au sein de l’ALPA, dans un communiqué.
Si tous les vols sont suspendus, Air Canada affirme que la reprise des opérations normales prendrait entre sept et dix jours. Air Canada Express continuerait d’opérer pendant la grève, a précisé la compagnie aérienne.
Air Canada et Air Canada Rouge exploitent en moyenne près de 670 vols quotidiens et transportent plus de 110 000 passagers.
La porte-parole du Bloc québécois en matière de Travail, Louise Chabot, a dénoncé «la stratégie» d’Air Canada, qui semble être, à son avis, de faire monter la pression en annulant des vols. L’objectif serait de se donner un rapport de force de manière à «forcer le gouvernement à agir» même avant qu’il y ait un conflit comme les compagnies de chemin de fer l’ont fait en arrêtant des trains de marchandises.
«Le gouvernement fédéral n’a pas à intervenir là-dedans», a-t-elle martelé en marge de la réunion présessionnelle du caucus du Bloc à Montebello, en Outaouais.
Selon Mme Chabot, un arbitrage exécutoire ou une loi spéciale, même en cas de conflit, sont «inimaginables». «Ça n’aide pas du tout la négociation. Ça aide juste l’employeur à se traîner les pieds et à dire: je ne négocierai pas de bonne foi, je vais laisser aller le conflit, je vais faire monter la pression et le sauveur sera le gouvernement. C’est une entrave, à mon point de vue, au libre droit de négociation», a ajouté Mme Chabot.