NANAIMO — L’ex-gouverneur de la Banque du Canada, Mark Carney, refuse de dire s’il convoite un siège aux Communes, se disant déterminé à conseiller le premier ministre Justin Trudeau pour faire du Canada un partenaire commercial incontournable.
«Ce qui compte pour les Canadiens, soyons honnêtes, n’est pas un parti ni un individu. C’est ce qui se passe sur le terrain. C’est si le pays avance dans la même direction que leurs priorités», a dit l’économiste en mêlée de presse à Nanaimo, en Colombie-Britannique, après avoir rencontré les députés libéraux.
Questionné à savoir s’il croit qu’il ferait un bon politicien, M. Carney a répondu en riant que «ce n’est pas évident».
«Je connais bien l’économie, je connais bien le commerce. Je connais la combinaison des politiques et du commerce afin d’achever les résultats pour les citoyens», a-t-il soutenu.
Celui qui est envoyé spécial des Nations unies pour le financement de l’action climatique a insisté sur l’importance, à ses yeux, de la décarbonisation de l’économie.
«Être un faible émetteur de carbone sera déterminant dans notre capacité de créer des emplois, de vendre nos produits aux États-Unis, en Europe et à travers le monde, croit-il. Nous devons aider nos compagnies à devenir plus compétitives.»
M. Carney est souvent vu comme un potentiel successeur à Justin Trudeau si celui-ci en venait à quitter la chefferie du Parti libéral du Canada.
Le député de Louis-Hébert, Joël Lightbound, admet avoir entendu des électeurs lui dire qu’ils estiment que M. Trudeau doit partir. «On entend ça, c’est sûr, mais moi je ne me suis pas lancé en politique pour ou contre Justin Trudeau. Je me suis lancé en politique pour des valeurs, des valeurs libérales», a-t-il dit. Celui qui se représentera aux prochaines élections a assuré être «très à l’aise dans le Parti libéral actuel».
Le premier ministre a fait savoir à maintes reprises qu’il n’avait nullement l’intention de se retirer.
M. Trudeau a affirmé au courant de l’été qu’il tentait de recruter M. Carney depuis des années pour qu’il joigne les rangs libéraux.
Lundi, le PLC a annoncé que l’économiste conseillerait M. Trudeau sur la croissance économique et la productivité.
M. Carney doit recueillir au cours des prochaines semaines les points de vue de divers Canadiens, dont des hommes d’affaires et des représentants syndicaux. Il doit ensuite fournir des recommandations au Comité de la plateforme du PLC en vue de la prochaine élection générale.
La ministre des Finances, Chrystia Freeland, a salué la contribution que pourra selon elle apporter M. Carney. À son avis, la nomination de l’ex-gouverneur de la Banque du Canada ne discrédite «absolument pas» son travail.
«Moi et Mark, nous sommes des amis de très longue date, a-t-elle dit. Je le respecte énormément et je parle avec Mark souvent. Je pense que c’est vraiment une bonne chose pour le Parti libéral et pour les Canadiens et Canadiennes qu’on aura des conseils de Mark.»
M. Carney estime que le gouvernement de Justin Trudeau a établi des fondations pour le «moment décisif» dans lequel se trouve aujourd’hui l’économie canadienne.
«On a un grand pas de fait, mais de prendre des idées de gens qui veulent contribuer, eh bien oui, c’est toujours bienvenu», a renchéri le ministre de l’Innovation, François-Philippe Champagne.
La ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, dont le nom circule souvent comme une possible candidate à la succession de M. Trudeau, a réfuté l’idée que lui soumettait une journaliste à savoir qu’elle pourrait se sentir menacée par la nomination de M. Carney.
Questionnée sur ce qu’elle a entendu des électeurs au sujet du chef Justin Trudeau, elle a affirmé qu’elle a senti «l’anxiété» et «la frustration» des Canadiens quant à la hausse du coût de la vie.
Plusieurs députés se sont dits intéressés par les conseils que leur partagera M. Carney dans ses nouvelles fonctions.
«Avoir une bonne perspective économique, c’est l’enjeu prioritaire, certainement pour mes concitoyens et moi-même, d’être responsable fiscalement. Je pense que d’avoir M. Carney, ça peut être intéressant», a affirmé Joël Lightbound.
À son avis, il est souhaitable que sa formation politique cherche conseil auprès d’observateurs externes. «C’est un danger quand on commence à s’alimenter exclusivement de ce qui fait notre affaire. C’est bien d’avoir des perspectives variées diverses.»
Le ministre de l’Immigration, Marc Miller, croit aussi que les discussions sur l’économie pourront orienter des décisions qu’il aura à prendre dans les dossiers dont il est responsable.
M. Miller considère de réviser les cibles d’immigration pour les prochaines années. Celles-ci, qui pourraient être réduites, tiendront compte de l’immigration temporaire pour une première fois, plutôt que de seulement fixer un seuil de nouveaux résidents permanents.
«C’est sûr qu’au niveau de l’abordabilité et la réduction du pourcentage de gens qui sont ici de façon temporaire, les annonces qu’on a faites en ce qui a trait aux étudiants internationaux, ça a un impact direct sur la détermination de la Banque du Canada sur le taux d’intérêt», a soutenu le ministre.
Ottawa a signalé en mars qu’il prévoit réduire le nombre de résidents temporaires à 5 % de la population au cours des trois prochaines années, contre 6,2 % au moment de l’annonce.