De l’ancien président Donald Trump au candidat au Sénat de l’Ohio Bernie Moreno, les candidats républicains masculins ont du mal à parler aux électrices, utilisant un langage critiqué comme insensible et condescendant alors qu’ils tentent de gagner le soutien des femmes et de parler de questions qui leur tiennent à cœur.
Lundi soir, M. Trump s’est présenté comme un «protecteur» des femmes, déclarant lors d’un discours en Pennsylvanie, un État clé, qu’il les sauverait de la peur et de la solitude et qu’elles n’auraient plus à penser à l’avortement.
«Vous ne serez plus abandonnées, seules ou effrayées. Vous ne serez plus en danger. (…) Vous n’aurez plus d’anxiété face à tous les problèmes que notre pays connaît aujourd’hui», a promis l’ex-président.
«Vous serez protégées et je serai votre protecteur.»
Lors d’une assemblée publique vendredi, M. Moreno a déploré le fait que l’avortement soit devenu la question décisive pour de nombreuses femmes de banlieue, qualifiant cette notion d’«un peu folle, d’ailleurs, mais surtout pour les femmes qui ont plus de 50 ans».
«Je me dis : « Je ne pense pas vraiment que ce soit un problème pour vous. »»
L’ancienne candidate républicaine à la présidence Nikki Haley a répondu avec exaspération à M. Moreno dans un message sur les réseaux sociaux: «Essayez-vous de perdre l’élection?», a-t-elle demandé. «Je demande pour un ami. #Tonedeaf #DonLemonVibes.» Ce dernier mot-clic était une référence à la suggestion de l’ancien présentateur de CNN Don Lemon pendant la campagne de 2023 selon laquelle Mme Haley, à 51 ans, avait «dépassé son apogée».
Une faiblesse pour les républicains
Ces commentaires soulignent les difficultés du Parti républicain à attirer les femmes, en particulier en ce qui concerne la question de l’avortement. Le problème s’est amplifié depuis que la vice-présidente Kamala Harris a remplacé le président Joe Biden en tête du ticket démocrate.
Les femmes sont apparues comme une faiblesse fondamentale de la campagne Trump, et il est perçu moins favorablement par les femmes que par les hommes. Un sondage AP-NORC du mois de septembre a révélé que plus de la moitié des électeurs inscrits qui sont des femmes ont une opinion plutôt ou très favorable de Mme Harris, tandis qu’environ un tiers seulement ont une opinion favorable de M. Trump.
L’écart entre les sexes – la différence entre la part d’hommes et de femmes qui disent soutenir chaque candidat – a atteint les deux chiffres pour M. Trump et Mme Harris dans plusieurs sondages récents. Cette division a été attribuée, en partie, au rôle de M. Trump dans la nomination des juges de la Cour suprême qui ont annulé le droit constitutionnel à l’avortement – une décision qu’il continue de célébrer lors de ses événements.
«Les femmes seront en bonne santé, heureuses, confiantes et libres. Vous ne penserez plus à l’avortement», a assuré M. Trump, lundi, insistant sur le fait que la question «n’est plus d’actualité», même si les femmes vivant dans les États dirigés par les républicains sont aux prises avec une vague de nouvelles restrictions qui ont poussé les services d’urgence à refuser de traiter les femmes enceintes et qui ont été liées par ProPublica à au moins deux décès évitables.
Au lieu d’aider M. Trump à accroître son attrait auprès des femmes, un tel langage risque de les rebuter, a soutenu Debbie Walsh, directrice du Center for American Women and Politics à l’Eagleton Institute of Politics de l’Université Rutgers.
«Cette idée selon laquelle les femmes doivent être protégées, que les femmes sont en quelque sorte faibles ou vulnérables – ce genre de ton protectionniste et condescendant (…) Je pense que pour plusieurs femmes, cela ne fera qu’ajouter à ce sentiment qu’il ne comprend pas leur vie, qu’il ne comprend pas où elles en sont sur toute une série de questions», a-t-elle soutenu.
De nombreuses femmes, a-t-elle noté, pensent que l’annulation de Roe c. Wade a «mis leur vie en danger».
La promesse de Donald Trump de protéger les femmes est également compliquée par sa longue histoire d’attaques personnelles contre les femmes ainsi que par la conclusion d’un jury l’année dernière selon laquelle il avait agressé sexuellement une chroniqueuse de magazine des décennies plus tôt dans la cabine d’essayage d’un grand magasin. M. Trump a nié ces allégations, ainsi que de nombreuses autres qui ont émergé au fil des ans.
«Ce genre de langage est une preuve supplémentaire que Donald Trump est déconnecté des femmes américaines, a déploré Jennifer Lawless, présidente du département de science politique de l’Université de Virginie. Non seulement le sentiment est paternaliste, mais le fait qu’il ait prononcé ces mots tout en réprimandant simultanément les femmes qui se soucient des droits reproductifs est stupéfiant.»
Les républicains se défendent
L’équipe de campagne de Donald Trump a rejeté les critiques comme venant de voix partisanes et a déclaré que les commentaires de M. Trump reflétaient les principaux problèmes de ses électeurs.
«Le président Trump répond directement aux préoccupations qu’il entend et que notre campagne entend de la part des femmes de tout le pays tous les jours, à leur peur, à la peur très réelle que les femmes ont d’être agressées ou potentiellement violées par des criminels ou des immigrants illégaux qui ont été autorisés à entrer dans ce pays», a déclaré la porte-parole de la campagne de Trump, Karoline Leavitt.
L’équipe de campagne de Kamala Harris a déclaré que les derniers commentaires de M. Trump montraient qu’il essayait de dire aux femmes «ce qu’elles doivent penser et ce qui nous importe».
«Les femmes savent mieux que nous – et nous ne serons pas réduites au silence, écartées, ignorées ou traitées comme des idiotes», a lancé la porte-parole Sarafina Chitika dans un communiqué.
Le porte-parole de Moreno, Reagan McCarthy, a quant à lui déclaré que le commentaire du candidat au Sénat était une plaisanterie.
«Le point de vue de Bernie est que les électrices se soucient autant de l’économie, de la hausse des prix, de la criminalité et de notre frontière sud ouverte que les électeurs masculins, et il est dégoûtant que les démocrates et leurs amis dans les médias de gauche traitent constamment toutes les femmes comme si elles étaient automatiquement des électrices à thème unique sur l’avortement qui n’ont pas d’autres préoccupations sur lesquelles voter», a-t-elle souligné dans une déclaration écrite.
Viser les jeunes hommes, mais aussi les femmes
La campagne Trump a consacré une grande partie de son énergie pour attirer et faire voter les hommes – en particulier les jeunes hommes qui ne votent pas systématiquement aux élections. Il y a eu notamment des apparitions dans des baladodiffusions populaires et lors d’événements sportifs majeurs comme les combats de l’Ultimate Fighting Championship qui ont parfois donné à la campagne une atmosphère de fraternité.
Mais les responsables de la campagne ont longtemps insisté sur le fait qu’ils s’efforçaient également de courtiser les femmes. Ils pensent que l’accent mis par Donald Trump sur la frontière et la criminalité résonne particulièrement bien auprès des femmes, tout comme son accent sur l’économie et sa promesse de faire baisser les prix.
Lors du rassemblement de lundi soir, Donald Trump a déclaré que les femmes étaient dans une situation pire aujourd’hui qu’elles ne l’étaient lorsqu’il était au pouvoir. Il a promis de «régler tout cela et vite».
«Je protégerai les femmes à un niveau jamais vu auparavant. Elles seront enfin en bonne santé, pleines d’espoir, en sécurité et en sûreté. Leur vie sera à nouveau heureuse, belle et formidable. Et c’est un honneur pour moi de le faire», a-t-il promis.