Pas de libération sous caution pour Peter Nygard en attendant l’audition de son appel

Sonja Puzic, La Presse Canadienne
Pas de libération sous caution pour Peter Nygard en attendant l’audition de son appel

TORONTO — L’ancien magnat canadien de la mode Peter Nygard s’est vu refuser la libération sous caution pendant qu’il fait appel de son verdict de culpabilité pour agression sexuelle et de sa peine de 11 ans de prison.

Une juge de la Cour d’appel de l’Ontario a rejeté la demande de libération sous caution, affirmant que le dossier de Nygard en appel semble être «faible» et que l’inculpé présente un risque réel de fuite, puisqu’il fait face à des accusations dans d’autres villes.

«J’ai déterminé que la confiance du public dans l’administration de la justice serait minée par la libération du demandeur en attendant l’audition de l’appel», a écrit la juge Lene Madsen dans sa décision.

Nygard, âgé de 83 ans, a été reconnu coupable l’an dernier à Toronto de quatre chefs d’accusation d’agression sexuelle, à la suite d’allégations de plusieurs femmes datant des années 1980 jusqu’au milieu des années 2000. Il a été condamné en septembre à 11 ans de prison.

Le juge qui a présidé le procès a estimé qu’une fois pris en compte le temps déjà passé en détention préventive, Nygard aurait encore à purger un peu moins de sept années sur sa peine de 11 ans de prison.

Dans la requête d’appel déposée le mois dernier, les avocats de Nygard soutiennent que sa peine est «excessive» et que le juge de première instance a commis plusieurs erreurs de droit, notamment en admettant le témoignage de la psychologue clinicienne Lori Haskell sur les effets du traumatisme.

Les avocats citent le cas du chanteur canadien Jacob Hoggard, dont l’appel de sa condamnation pour agression sexuelle de 2022 contestait également le témoignage de la psychologue Haskell sur la neurobiologie du traumatisme.

La Cour d’appel a plus tard conclu que le juge au procès de Hoggard avait commis une erreur de droit en admettant le témoignage de Mme Haskell, en partie parce qu’il risquait d’être utilisé à mauvais escient par le jury pour raisonner à rebours et l’envers selon lequel les plaignantes avaient subi une agression sexuelle. Mais le comité de trois juges a quand même confirmé la condamnation de Hoggard, parce qu’ils ont conclu qu’il n’y avait pas eu d’erreur judiciaire. Le chanteur tente maintenant de faire appel de cette décision en Cour suprême du Canada.

Dans un procès distinct, qui s’est terminé la semaine dernière, Hoggard a été reconnu non coupable par un jury d’avoir agressé sexuellement une jeune femme dans le nord-est de l’Ontario il y a huit ans.

La juge de la Cour d’appel qui a rejeté la demande de remise en liberté sous caution de Nygard a écrit que, selon elle, il n’y avait qu’un seul argument «juridiquement plausible» soulevé dans sa requête en appel: l’admission au procès du témoignage de la psychologue Haskell.

«Cet appel semble faible»

Les avocats de Nygard soutiennent également que le juge de première instance a commis une erreur en permettant au jury de prendre en compte le témoignage d’une plaignante pour aider à décider si la Couronne avait prouvé sa thèse concernant d’autres plaignantes, et que le juge avait invité le jury à déduire que Nygard avait drogué deux des plaignantes avant de les agresser sexuellement.

«Bien que l’admission du témoignage d’expert au procès soit un motif d’appel défendable, dans l’ensemble, au vu du dossier actuel, cet appel semble faible», a écrit la juge Madsen.

Les avocats de Nygard soutiennent également que son âge et son état de santé fragile justifient une peine de prison plus courte, et qu’il n’a pas été en mesure de soumettre toutes les preuves médicales pertinentes au tribunal avant la condamnation en septembre.

Mais la juge Madsen écrit que les nouveaux rapports médicaux soumis par Nygard «s’appuient largement sur les autodéclarations du demandeur» et que ses besoins en matière de santé ont été «pleinement et complètement pris en compte» au moment de la condamnation en première instance.

La juge Madsen a également soulevé des préoccupations concernant la proposition de Nygard de résider dans une propriété de Winnipeg appartenant désormais à l’un de ses employés pendant sa libération sous caution.

«L’incitation du demandeur à fuir a augmenté avec ses condamnations dans cette affaire et doit être considérée dans le contexte de la multiplicité des accusations graves supplémentaires auxquelles il fait face au Canada et aux États-Unis», a écrit la juge.

Nygard, qui est devenu célèbre après avoir fondé une entreprise de vêtements pour dames à Winnipeg, qui est devenue Nygard International, fait également face à des accusations au Québec, au Manitoba et aux États-Unis.

Il avait été arrêté pour la première fois à Winnipeg en 2020 en vertu de la Loi sur l’extradition, après avoir été accusé de neuf chefs à New York, notamment de trafic sexuel et de racket.

En mai dernier, le plus haut tribunal du Manitoba a rejeté sa demande de révision judiciaire de l’ordonnance d’extradition, estimant qu’il n’y avait aucun motif juridique de s’y opposer.

Aucune des accusations criminelles portées contre Nygard au Québec, au Manitoba ou aux États-Unis n’a été examinée par un tribunal, et il a nié toutes les allégations.

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