OTTAWA — Une mise à jour sur l’impact économique de la tarification fédérale du carbone qui corrige une erreur dans les rapports précédents en vient essentiellement aux mêmes conclusions, a assuré jeudi le directeur parlementaire du budget.
Yves Giroux affirme que son bureau révèle toujours que la grande majorité des ménages canadiens reçoivent plus en remise d’Ottawa qu’ils ne paient pour la redevance fédérale sur les combustibles et la taxe sur les produits et services connexes. Par contre, une fois que les incidences économiques plus larges sont prises en compte, ces gains sont annulés pour la plupart, sauf pour certains salariés à faible revenu.
Le bureau du DPB a reconnu en avril dernier qu’il avait auparavant inclus par erreur dans ses analyses de 2022 et 2023 l’incidence économique de la redevance sur les combustibles pour les grands émetteurs industriels. Or, ces analyses étaient censées se concentrer uniquement sur la taxe à la consommation.
Mais M. Giroux a soutenu jeudi que le tableau global est sensiblement le même dans la mise à jour. «Lorsque nous utilisons les propres chiffres du gouvernement et isolons la taxe sur les carburants elle-même, nous constatons toujours que le ménage moyen est moins bien loti, en prenant en compte l’impact économique.»
Les rapports du DPB à ce sujet sont devenus un élément majeur du débat politique canadien sur la tarification du carbone à la consommation, qui s’applique aux combustibles fossiles achetés par les ménages et les petites entreprises et organisations. La tarification fédérale s’applique à toutes les provinces à l’exception du Québec et de la Colombie-Britannique, qui ont leur propre régime.
Le ministre fédéral de l’Environnement, Steven Guilbeault, dont le gouvernement soutient que cette politique est un moyen d’encourager la réduction de la pollution, a déclaré jeudi que le nouveau rapport du DPB était «très clair»: les Canadiens obtiendraient plus de remises que ce qu’ils paient.
Mais les conservateurs fédéraux promettent de l’éliminer. Ils ont laissé entendre dans leur propre déclaration que le rapport confirmait que la tarification du carbone «appauvrissait les Canadiens».
Variations entre provinces
La nouvelle analyse du DPB, qui porte sur les huit provinces qui utilisent le prix fédéral du carbone, indique que la plupart des ménages se porteront mieux au cours de l’exercice 2030-31 que ne le laissaient entendre les estimations précédentes. Le rapport estime également que l’effet global sur le déficit budgétaire sera plus faible.
Les chiffres varient considérablement d’une province à l’autre. En Ontario, par exemple, le DPB estime maintenant que le ménage moyen obtiendra 331 $ de plus en rabais que ce qu’il paie, contre 202 $ dans les analyses précédentes. Mais en Saskatchewan, ce montant passe de 699 $ à 1205 $.
Si l’on tient compte de l’incidence économique globale, de la baisse attendue des profits des secteurs à forte consommation d’énergie à la baisse des revenus d’emploi et d’investissement, la nouvelle analyse prévoit que les répercussions seront moins importantes. En Ontario, par exemple, l’impact négatif pour le ménage moyen a été révisé à la baisse, passant de 1820 $ à 903 $.
Le rapport de jeudi révèle également que davantage de personnes à faible revenu bénéficieraient d’un coup de pouce global. En examinant cinq groupes de revenus également répartis, les nouveaux chiffres suggèrent que les deux quintiles gagnant le moins d’argent éviteraient un impact négatif, tandis que les analyses précédentes suggéraient que seuls ceux du quintile le plus bas seraient épargnés.
Le DPB avait été critiqué pour le fait que ses analyses ne tiennent pas compte des impacts économiques possibles du changement climatique causés par des émissions plus élevées ni des avantages des investissements verts.
«Examiner le coût du changement climatique et l’intégrer dans le calcul serait une tâche beaucoup plus complexe», a déclaré M. Giroux lors d’un point de presse jeudi. «Cela nous placerait dans le rôle d’arbitre entre ce qui est bénéfique et ce qui coûte plus cher – ce qui est beaucoup plus complexe et ne relève généralement pas de notre mandat.»
Impacts sur l’économie
Pour la première fois, le rapport de jeudi comprenait des estimations gouvernementales concernant l’impact sur l’économie canadienne par rapport aux émissions réelles réduites par la tarification du carbone à la consommation et par l’industrie.
Les grands émetteurs paient la taxe sur une partie de ce qu’ils émettent réellement plutôt que de payer une surtaxe sur le carburant qu’ils achètent pour fonctionner, et les réductions d’émissions par mégatonne qui en résultent sont «considérablement moins coûteuses», a souligné M. Giroux.
Les chiffres suggèrent qu’en 2030, la tarification du carbone à la consommation réduirait le produit intérieur brut réel de 0,7 %, tout en réduisant les émissions de 13 mégatonnes. La tarification industrielle réduirait le PIB de 0,2 %, mais réduirait de 49 mégatonnes supplémentaires.
Le ministre Guilbeault a défendu l’importance des deux politiques. «Aucune mesure seule ne nous permettra d’atteindre nos objectifs de 2030. Nous avons besoin de tout», a-t-il déclaré, faisant référence au plan du gouvernement visant à réduire les émissions de carbone d’au moins 40 % par rapport aux niveaux de 2005.
Le DPB a d’abord relevé l’erreur dans ses analyses de 2022 et 2023 dans une note non publiée sur son site internet. Le bureau a été critiqué lorsque l’information a été rendue publique.
Les libéraux ont déclaré que le bureau était coupable d’un manque de transparence. M. Giroux a accusé le gouvernement d’empêcher la publication de chiffres qui prouveraient que son analyse restait largement exacte. Et les conservateurs ont profité de ses commentaires pour suggérer que les libéraux muselaient un agent indépendant du Parlement.
M. Giroux a par la suite clarifié ses commentaires, affirmant qu’on lui avait demandé de ne pas partager l’ensemble des données réelles, mais qu’on ne lui avait pas demandé de ne pas parler publiquement. Le gouvernement a finalement publié les données brutes, au moment même où les conservateurs déposaient une motion à la Chambre des communes exigeant leur publication.
Le résultat de cette controverse – le rapport de jeudi – est que les Canadiens ont maintenant une idée plus claire et plus précise de l’effet de la tarification du carbone, a déclaré Dave Sawyer, économiste principal à l’Institut canadien du climat.
«Cette mise à jour confirme que la tarification du carbone peut entraîner des réductions substantielles des émissions dans les plus grands secteurs industriels du Canada sans compromettre la compétitivité et sans imposer de coûts importants aux ménages», a-t-il déclaré.