Vers un retour de la convergence souverainiste?

Thomas Laberge, La Presse Canadienne
Vers un retour de la convergence souverainiste?

QUÉBEC — Alors que le Parti québécois (PQ) trône en première place des intentions de vote, son chef Paul St-Pierre Plamondon, martèle qu’il tiendra un référendum dans un premier mandat même si les appuis à la souveraineté stagnent. Dans ce contexte, serait-il temps de rouvrir les négociations pour une convergence indépendantiste entre le PQ et Québec solidaire (QS)? Marc Desnoyers, un ancien vice-président péquiste, affirme que oui. Et il publie ces jours-ci le livre «PQ et QS : des frères ennemis ?» pour faire prévaloir son point de vue.

Bien des choses éloignent le PQ et QS à l’heure actuelle. Lors de son Conseil national à Jonquière en mai dernier, le chef parlementaire solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois, a dit qu’il ne fallait pas «laisser Paul St-Pierre Plamondon transformer ce beau et grand projet qui est l’indépendance du Québec en un référendum contre l’immigration».

Marc Desnoyers l’admet: ce genre de déclaration ne fait rien pour rapprocher les deux formations souverainistes. Malgré tout, l’auteur pense que la convergence entre les deux «frères ennemis» est essentielle pour accéder à l’indépendance. Il est toutefois bien conscient des défis. «Je n’ai jamais prétendu que ce serait un chemin de roses», lance-t-il en entrevue avec La Presse Canadienne.

«Si QS et le PQ étaient d’accord sur tout, ils seraient dans le même parti et on ne parlerait pas de convergence. Dans le mouvement souverainiste, il y a des tendances sur le nationalisme qui sont différentes et qui s’expriment de manière opposée et virulente», poursuit le militant péquiste de longue date.

Il rappelle que l’Action démocratique du Québec de Mario Dumont a rejoint le camp du Oui en 1995, même si la formation politique était bien différente du PQ.

«Le mouvement souverainiste, il y a un centre, une droite, une gauche, et c’est à travers le rassemblement de ses différentes tendances qu’il va être capable d’atteindre ses objectifs», soutient Marc Desnoyers.

Autopsie d’un échec

Dans son essai, Marc Desnoyers nous entraîne dans les coulisses des négociations houleuses de la plus récente tentative de convergence indépendantiste et montre les raisons de son échec. Il veut aussi mettre en lumière le rôle parfois occulté de la société civile dans cette tentative de convergence.

2011 sera une année de chamboulement pour le mouvement indépendantiste: vague orange qui frappe le Québec; mutinerie au sein du PQ; création d’Option nationale (ON). Le Nouveau Mouvement pour le Québec, une organisation souverainiste, est aussi fondé.

En 2014, des souverainistes se regroupent lors du congrès destiNation et le Conseil de la souveraineté du Québec devient les Organisations unies pour l’indépendance du Québec (OUI Québec). C’est d’ailleurs ce dernier groupe qui chapeautera la négociation pour une «feuille de route» indépendantiste avec le PQ, QS, ON et le Bloc québécois.

Les discussions ont bien failli déboucher, mais l’entente a avorté à la dernière minute. À qui la faute? Marc Desnoyers fait peser la responsabilité sur les deux principaux partis indépendantistes, QS et le PQ.

Tout d’abord, QS, où des «luttes internes entre factions rivales» entraînent une «série de cafouillages» qui finissent par avoir raison de l’entente.

Ce débat s’est cristallisé lors d’un congrès solidaire en 2017, notamment avec les propos de la militante Dalila Awada qui a affirmé que «pour les communautés racisées au Québec, l’ennemi est double. Il s’incarne à la fois dans le néolibéralisme et dans le racisme. Le Parti québécois, aujourd’hui, porte en lui ces deux bêtes».

«Je pense que QS a vraiment un blâme à prendre. (…) Ils ont envoyé une lettre d’excuses aux négociateurs et aux autres partis pour s’excuser sincèrement de la manière dont ça s’est passé. Ils l’ont reconnu eux-mêmes cette part d’erreur là», explique Marc Desnoyers en entrevue

Quant à la responsabilité du PQ, l’auteur cible davantage ses «orientations politiques». «Le Parti québécois, dans les décennies précédant la convergence, a grandement louvoyé sur son option fondamentale», explique-t-il. Dans son livre, il cite d’ailleurs l’ancien premier ministre Jacques Parizeau qui affirme qu’avec cette approche le PQ «finit par passer pour des hypocrites».

Les cicatrices de cet échec ne sont pas encore totalement refermées. Malgré tout, Marc Desnoyers croit qu’il est impératif que QS et le PQ entament des discussions sur la convergence le plus tôt possible.

«Moi, je pense que ça va contribuer à donner de la visibilité et de la crédibilité à l’option souverainiste. (…) L’histoire récente démontre que quand il y a une conversation publique sur la question de la souveraineté, les appuis peuvent monter et ça favorise la cohésion du mouvement souverainiste», explique-t-il.

Que fait-on avec la CAQ?

L’auteur reconnaît que plusieurs embûches se dressent sur le chemin de la convergence. Le PQ et QS ne s’entendent pas sur les questions identitaires et un pessimisme est encore présent en raison du précédent échec.

Il y a aussi la Coalition avenir Québec (CAQ) qui vient brouiller les cartes quant aux appuis à l’indépendance, puisque bien des souverainistes y ont trouvé refuge, malgré la posture officiellement fédéraliste (quoique nationaliste) de François Legault. Selon le dernier sondage Léger, 37 % des électeurs caquistes pourraient voter «Oui» à un prochain référendum.

Malgré tout, l’auteur ne croit pas nécessaire d’inviter la CAQ à participer aux prochaines discussions sur la convergence.

«Les indépendantistes qui appuient la CAQ, on va les convaincre en faisant un mouvement souverainiste qui est plus fort et qui est plus proche de prendre le pouvoir», soutient-il.

***

Marc Desnoyers, «PQ et QS : des frères ennemis ? Histoire de la convergence indépendantiste», Somme toute, 232 pages, date de sortie : 22 octobre 2024

Partager cet article
S'inscrire
Me notifier des
guest
0 Commentaires
plus ancien
plus récent plus voté
Inline Feedbacks
Voir tous les commentaires