Le gang Bishnoi est craint depuis des années au Canada, selon des experts

Fakiha Baig, La Presse Canadienne
Le gang Bishnoi est craint depuis des années au Canada, selon des experts

Selon un conseiller municipal de Richmond, en Colombie-Britannique, les membres présumés d’un gang indien et son chef font trembler les membres de la diaspora sud-asiatique au Canada depuis des années.

Selon Kash Heed, le gang Bishnoi, dirigé par Lawrence Bishnoi, a acquis une certaine notoriété et suscité la peur chez les Canadiens d’origine indienne bien avant que la GRC ne l’accuse cette semaine d’avoir orchestré des crimes violents sur le sol canadien.

Selon la GRC, des diplomates indiens auraient communiqué au gouvernement indien des informations sur les séparatistes sikhs au Canada et de hauts fonctionnaires indiens auraient ensuite transmis ces informations au gang Bishnoi.

«La réputation de (Lawrence Bishnoi) le précède», a déclaré M. Heed, également ancien procureur général de la Colombie-Britannique et ancien chef de la police de West Vancouver, lors d’une entrevue.

«Il s’agit d’un individu enclin à la violence en Inde. Il y a quelques années, le gang Bishnoi a commencé à faire parler de lui et les gens s’en sont inquiétés. Beaucoup de membres de la diaspora connaissent Lawrence Bishnoi et ses activités (en Inde).»

Lundi, le gouvernement fédéral a expulsé six diplomates indiens après que la GRC a déclaré avoir des preuves crédibles que des agents indiens ont joué un rôle dans des crimes, y compris l’assassinat de citoyens canadiens et de l’extorsion.

«Ce que nous avons vu, du point de vue de la GRC, c’est l’utilisation d’éléments du crime organisé et cela a été publiquement attribué et revendiqué par un groupe du crime organisé en particulier, qui est le groupe Bishnoi», a affirmé la commissaire adjointe de la GRC, Brigitte Gauvin, lors d’une conférence de presse lundi.

«Nous pensons que ce groupe est lié à des agents du gouvernement indien.»

L’Inde a insisté sur le fait qu’elle n’avait pas reçu de preuves de l’implication du gouvernement et a ordonné à six diplomates canadiens de quitter l’Inde.

M. Heed a déclaré qu’il ne pouvait pas spéculer sur la façon dont le gang et les diplomates pourraient être impliqués dans des crimes, y compris l’assassinat l’année dernière de l’activiste Hardeep Singh Nijjar, chef du Guru Nanak Sikh Gurdwara à Surrey, en Colombie-Britannique.

Mais il a souligné que les cas d’extorsion violente liés à Bishnoi ont été bien documentés par les enquêteurs canadiens et indiens au cours des dernières années.

Ritesh Lakhi est d’accord. Ce journaliste indien, qui était reporter pour une émission de radio en Colombie-Britannique avant de s’installer en Inde, a couvert la montée en puissance du gang.

«Des bains de sang impliquant des membres du gang Bishnoï se produisent depuis des années en Inde. Aujourd’hui, ce phénomène de gangs a attiré l’attention du monde entier», a-t-il déclaré en entrevue.

En décembre 2023, la police d’Abbotsford, en Colombie-Britannique, a annoncé qu’elle enquêtait sur des extorsions impliquant des membres aisés de la communauté sud-asiatique. Les suspects auraient des liens avec Bishnoi.

Plus tôt cette année, la police de l’Ontario et celle de l’Alberta ont déclaré qu’elles enquêtaient sur des systèmes d’extorsion similaires, dont certains ont donné lieu à des tirs de balles sur des entreprises.

M. Heed dit connaître un homme d’affaires de Colombie-Britannique qui a perdu 3 millions $ à la suite de menaces proférées par des personnes qui prétendaient être des membres du gang Bishnoi.

La National Investigation Agency, l’agence indienne de lutte contre le terrorisme, a déclaré en 2023 que Lawrence Bishnoi dirigeait son «groupe de la terreur depuis des prisons situées dans différents États» de l’Inde et par l’intermédiaire d’un associé au Canada.

Selon M. Lakhi, le gangster est né dans l’État du Pendjab, dans le nord de l’Inde, et s’est plongé dans la violence alors qu’il étudiait le droit. Il a été impliqué dans des combats de rue et des incendies criminels avec d’autres leaders étudiants au sujet de la politique universitaire.

Au cours d’une rixe, le cousin de Lawrence Bishnoi a été assassiné et on pense que Bishnoi a abattu le tueur pour se venger un an plus tard.

Lawrence Bishnoi a également continué à commettre des délits moins graves, notamment des incendies criminels et des extorsions, et a fait des allers-retours en prison. Selon M. Lakhi, il partageait des cellules avec des membres de gangs notoires et il a fini par prendre la tête d’un groupe qui avait perdu son chef.

Protégé par le gouvernement indien?

Lawrence Bishnoi est en prison depuis 2015. Les accusations portées contre lui continuent tout de même de s’accumuler. Il est accusé d’avoir orchestré de violentes extorsions avec un téléphone portable alors qu’il était derrière les barreaux.

«Cela peut être interprété comme l’un des facteurs qui accréditent la théorie selon laquelle l’État indien pourrait protéger Lawrence Bishnoi», a avancé M. Lakhi.

Selon lui, Lawrence Bishnoi a récemment gagné en notoriété en menaçant de tuer des célébrités indiennes bien-aimées, des personnalités politiques et des chefs d’entreprise.

Selon M. Lakhi, le gang Bishnoi a revendiqué la semaine dernière la responsabilité de l’assassinat d’un homme politique de haut rang dans la capitale financière de l’Inde, Mumbai, avant une élection d’État cruciale.

En 2022, Lawrence Bishnoi a été accusé d’être à l’origine de la violente fusillade du rappeur pendjabi Sidhu Moose Wala, qui a brièvement vécu au Canada.

Selon M. Lakhi, M. Bishnoi avait déjà à l’époque étendu son réseau au Canada, notant que le frère d’un allié en Inde s’était installé en Colombie-Britannique et avait aidé à recruter des Indiens vulnérables.

Un document du tribunal de 2021 indique qu’un étudiant qui s’installait au Canada avec un permis en 2017 a demandé l’asile parce qu’il avait été contacté et qu’on lui avait demandé de rejoindre le gang et de vendre de la drogue.

Le document indique que l’étudiant a été battu par des membres du gang Bishnoi avant son départ pour le Canada. Sa demande a été rejetée.

M. Heed a entendu parler d’autres cas de gangsters canadiens n’ayant aucun lien avec Bishnoi et faisant référence au groupe en raison de la peur que son nom suscite.

«Et maintenant, la GRC a considérablement rehaussé le profil (de Bishnoi) ici au Canada», a-t-il déclaré.

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