QUÉBEC — Le français recule «dans la plupart des domaines de la vie sociale» au Québec depuis le début des années 2000. Une situation «particulièrement préoccupante» au travail et dans la culture, qui va perdurer «à moins de changements structurels», selon une série d’études du commissaire à la langue française Benoît Dubreuil.
Depuis 1997, on voit une diminution de 11 % de «la population parlant exclusivement ou en général le français au travail».
Le commissaire Dubreuil indique que, sans être le seul facteur, l’immigration est un «point important» dans le déclin du français.
«La probabilité de parler principalement le français au travail est plus faible chez les personnes issues de l’immigration, et est encore moins élevée chez les anglophones», peut-on lire dans son rapport.
«Sur le marché du travail, c’est très inégal. On voit plusieurs secteurs où le français a perdu parfois 10 points, parfois 15 points au cours des dernières années. On est beaucoup dans le domaine de la finance, du multimédia et des services professionnels», a énuméré le commissaire Benoît Dubreuil, en point de presse jeudi.
La langue dans laquelle les jeunes vont étudier va avoir une incidence sur la langue parlée au travail. La probabilité d’utiliser le français au travail est de 88 % pour un diplômé qui a fait ses études secondaires, collégiales et universitaires en français.
«Cette probabilité diminue à 59,3 % pour celui qui a fait ses études universitaires en anglais, et à 32,4 % pour celui qui fait toutes ses études postsecondaires dans cette langue.»
On ajoute que, de «façon générale, les personnes issues de l’immigration sont moins susceptibles d’étudier en français et de travailler en français par la suite».
Bien qu’on indique que la «plupart» des 18-34 ans «préfèrent travailler en français et ont des attitudes plutôt favorables au français», on affirme que «la plupart des jeunes anglophones préfèrent travailler en anglais et plusieurs d’entre eux hésiteraient à postuler pour un emploi exigeant des compétences avancées en français».
Culture
La consommation de la culture québécoise est également affectée, selon les études présentées par le commissaire. Il y a une diminution de 8 % de la «part de la population consommant la culture surtout en français».
«On voit des reculs qui sont extrêmement importants du côté de la musique, de l’audiovisuel et du jeu vidéo. On a vraiment besoin de trouver des solutions», a dit le commissaire.
Selon Benoît Dubreuil, il est possible de «grandir dans plusieurs endroits au Québec», sans jamais être «en contact avec des contenus culturels québécois».
«L’absence du référent commun, ça me préoccupe beaucoup», a-t-il ajouté.
Le rapport affirme qu’il y a une «asymétrie entre les francophones, qui sont relativement nombreux à utiliser l’anglais de manière prédominante dans leur vie culturelle, et les anglophones, dont seul un faible pourcentage utilisent principalement le français».
L’anglicisation sort de Montréal
Sans surprise, la baisse du français est particulièrement importante à Montréal. «Dans la région de Montréal, le recul de l’usage prédominant du français au travail suit la baisse de la proportion de francophones», écrit-on.
Le commissaire note aussi que l’anglicisation sort de la métropole québécoise. «Il y a un processus de suburbanisation de l’ouest de l’île qui se déploie vers Vaudreuil.» C’est d’ailleurs à Vaudreuil-Soulanges où le français a le plus reculé avec une baisse de 16 %.
La situation à Gatineau est également préoccupante, car «les francophones utilisent moins le français qu’auparavant».