MONTRÉAL — On constate actuellement une recrudescence des pneumonies dites «atypiques», surtout chez les enfants d’âge scolaire et les adolescents, prévient un expert qui précise qu’il ne s’agit probablement que de la pointe de l’iceberg.
«Je ne voudrais pas que les gens pensent que c’est une infection épeurante ou une épidémie ou une crise de santé publique, a précisé le docteur Jesse Papenburg, un spécialiste des maladies infectieuses à l’Hôpital de Montréal pour enfants. Mais il reste qu’en ce moment, ça met de la pression sur nos salles d’urgence et il y a eu des hospitalisations.»
Les pneumonies dites «atypiques» sont causées par des bactéries qui ne causent habituellement pas de pneumonies et qui n’ont pas tendance à provoquer une accumulation de pus, a-t-il expliqué.
La présentation de la maladie sera donc différente de celle d’une pneumonie bactérienne typique.
Plutôt qu’une maladie aiguë accompagnée d’une forte fièvre et d’une détresse respiratoire, la pneumonie atypique progressera plus lentement avec des symptômes peut-être un peu moins intenses, comme une toux persistante, un sentiment généralisé de fatigue et une fièvre modeste. Certains cas pourront toutefois être suffisamment graves pour nécessiter une hospitalisation.
Les pneumonies atypiques se résorberont habituellement par elles-mêmes, a dit le docteur Papenburg, même s’il existe des antibiotiques pour combattre les bactéries qui en sont responsables.
«Mais c’est important pour le clinicien de faire la distinction parce que ce ne sont pas les mêmes antibiotiques qui fonctionnent (que pour une pneumonie typique)», a-t-il expliqué.
Il est donc crucial pour les médecins de savoir qu’il y a en ce moment une incidence accrue de pneumonie atypique, a ajouté le docteur Papenburg, puisque la présentation inhabituelle de la maladie pourrait entraîner une erreur de diagnostic.
L’administration des mauvais antibiotiques, en plus d’être inutile, pourrait contribuer au phénomène inquiétant de l’antibiorésistance.
«Quand on prescrit des antibiotiques, on veut être certain qu’il y a une bonne probabilité qu’on va réussir à traiter l’organisme qui cause l’infection, a dit le docteur Papenburg. Mais le médecin ne peut pas nécessairement savoir en voyant le patient, sur le champ, de quelle bactérie il s’agit, ou même s’il s’agit d’une bactérie ou d’un virus.»
Le bon diagnostic passera donc par une évaluation de différents facteurs, comme les résultats de la radiographie, le contexte épidémiologique ou même l’âge du patient, a-t-il précisé. On sait par exemple que la pneumonie atypique circule principalement parmi les enfants d’âge scolaire et les adolescents, alors que les enfants de moins de deux ans sont plus à risque d’une pneumonie classique.
On constate des éclosions dans des milieux clos comme les écoles, a dit le docteur Papenburg, parce que la pneumonie atypique est plus contagieuse que les pneumonies causées par les bactéries habituelles, mais moins contagieuse que les infections virales qui peuvent dégénérer en pneumonie virale.
«Elle se situe quelque part entre les deux, a-t-il dit. C’est une maladie qui peut quand même bien se transmettre dans les bonnes circonstances.»
On constate ainsi en ce moment «une transmission communautaire très importante» dans la région de Montréal, «et on le ressent dans nos cliniques ambulatoires et dans nos salles d’urgence», a-t-il ajouté.
«Ce qu’on voit en ce moment dans les hôpitaux pédiatriques, c’est la pointe de l’iceberg, a prévenu le docteur Papenburg. On voit des cas plus sévères, (…) même certains cas qui ont été admis aux soins intensifs. Nous vivons en ce moment une éclosion importante, mais on voit des éclosions (comme celle-ci) aux trois à sept ans, donc ce n’est pas hors du commun. Mais ça faisait longtemps qu’on n’avait pas vu autant de cas.»
Cette éclosion survient au moment où la saison des infections respiratoires est à nos portes, a-t-il rappelé. Il ne faudrait donc pas que les parents inquiets se précipitent vers les salles d’urgence après 24 heures de fièvre et de toux.
«Ça va compliquer la donne, a dit le docteur Papenburg. Il va y avoir d’autres causes de fièvre et de toux qui vont devenir très importantes.»
Il se réjouit à ce titre que le Québec et l’Ontario soient les deux seules provinces canadiennes à offrir, dès la naissance, une vaccination contre le virus respiratoire syncytial qui fait tant jaser. Ce vaccin, a-t-il dit, réduit de 80 % le risque d’hospitalisation des nourrissons pour une infection au VRS. La vaccination est aussi offerte aux bébés de moins de huit mois dont la condition médicale le justifie.
La vaccination contre la grippe est aussi offerte gratuitement aux tout-petits de plus de six mois, a rappelé le docteur Papenburg en conclusion.