VANCOUVER — L’association des employeurs a déclaré dans un communiqué que le lock-out en réponse à la grève commencerait à 16 h 30 lundi et se poursuivrait jusqu’à nouvel ordre, mais qu’il n’affecterait pas les opérations céréalières ou de croisière.
«La grève de la section locale 514 du ILWU a déjà commencé à avoir un impact sur les opérations portuaires de la Colombie-Britannique et l’activité de grève peut facilement s’intensifier, y compris un retrait complet de la main-d’œuvre sans préavis», ont souligné les employeurs pour expliquer leur décision de mettre en lock-out les membres du syndicat.
La section locale 514 a répondu par courriel que ses membres étaient allés travailler normalement à 8 heures du matin lundi, mais qu’une interdiction des heures supplémentaires avait été mise en place et que les travailleurs «refuseraient de participer aux changements technologiques dans le cadre de leurs mesures de grève limitées».
Une déclaration du syndicat, lundi, en réponse au lock-out indique que les employeurs ont «délibérément et de manière irresponsable» réagi de manière excessive à l’interdiction des heures supplémentaires, qui visait à relancer des négociations au point mort qui durent depuis près de deux ans.
Dans le communiqué, le président de la section locale 514, Frank Morena, a qualifié le lock-out des employeurs d’«effort clair pour forcer le gouvernement fédéral à intervenir».
Prenant la parole au Parlement lundi, le ministre fédéral du Travail, Steven MacKinnon, a réitéré qu’il avait parlé avec les employeurs et le syndicat pendant le week-end et les a exhortés à trouver une solution. «C’est leur responsabilité, et ils doivent faire le travail nécessaire pour obtenir une entente», a soutenu M. MacKinnon.
Les commentaires du ministre font suite aux questions du député néo-démocrate Matthew Green. «Cette tentative flagrante de manipuler ce gouvernement libéral pour porter atteinte aux droits des travailleurs est une attaque scandaleuse contre la libre négociation collective», a fait valoir M. Green au Parlement.
L’association des employeurs a cependant assuré que la seule raison pour laquelle le lock-out a été déclenché était la grève du syndicat.
M. Morena a déclaré que les négociateurs du syndicat sont «prêts à reprendre les négociations dès que la BCMEA se présentera».
Offre finale des employeurs
Les deux parties se sont rencontrées pour des pourparlers sous médiation la semaine dernière, et la section locale 514 a accusé les employeurs de ne pas s’être présentés le dernier jour des pourparlers prévus jeudi.
«Depuis l’expiration de notre contrat le 31 mars 2023, les membres de notre syndicat tentent de parvenir à une nouvelle convention collective et ont été plus que patients face à la provocation de la BCMEA, qui se poursuit aujourd’hui avec un lock-out à grande échelle», a insisté M. Morena dans un communiqué lundi.
Le syndicat a publié son avis de grève jeudi dernier en réponse à une «offre finale» présentée par les employeurs la veille; selon l’association, cette offre prévoit une augmentation salariale de 19,2 % sur quatre ans.
«L’offre finale de la BCMEA au syndicat représente notre meilleur effort pour régler le conflit et aller de l’avant avec une entente qui reconnaît les compétences et les efforts de 730 contremaîtres qui travaillent dur, et de leurs familles, tout en garantissant que les ports de la côte ouest restent fiables et stables pour les nombreux clients et partenaires de la chaîne d’approvisionnement qui y font des affaires», a indiqué l’association dans une lettre adressée mercredi au président de la section locale 514, Frank Morena.
L’association a également déclaré que l’offre comprendrait une augmentation de 16 % des prestations de retraite, des jours fériés reconnus supplémentaires et un montant forfaitaire moyen de 21 000 $ pour les employés admissibles, qui comprend le salaire rétroactif depuis l’expiration de la convention collective.
«Malgré la décision regrettable de la section locale 514 de déstabiliser la chaîne d’approvisionnement du Canada, l’offre globale de la BCMEA reste ouverte jusqu’à son retrait», a déclaré l’association des employeurs lundi.
Dans sa réponse dimanche, le syndicat a déclaré que l’offre des employeurs ne répondait pas à l’une des principales préoccupations des travailleurs: une exigence de dotation en personnel qui répond à la mise en œuvre de l’automatisation portuaire dans des installations telles que le terminal à conteneurs Centerm de DP World, à Vancouver.
La section locale 514 soutient que les employeurs ont «demandé au syndicat d’accepter que les dispositions relatives aux changements technologiques du Code canadien du travail qui s’appliquent à tous les travailleurs syndiqués au niveau fédéral soient supprimées dans un nouveau contrat de travail», une demande que M. Morena a qualifiée de «ridicule».
«L’idée que notre syndicat renonce à des dispositions du Code canadien du travail qui protègent non seulement la section locale 514 mais tous les travailleurs canadiens est absolument scandaleuse», a estimé dimanche M. Morena dans un communiqué.
Le leader syndical a également déclaré que les employeurs avaient informé le syndicat que s’il rejetait son offre finale présentée mercredi, ils supprimeraient des sections de la convention collective existante – y compris la rétroactivité sur les salaires ainsi que des améliorations aux avantages sociaux.
Les employeurs, en réponse aux commentaires de M. Morena, ont contesté un certain nombre de points soulevés par le dirigeant syndical.
L’association a déclaré que son offre finale correspondait non seulement à une entente conclue l’année dernière avec les débardeurs pour mettre fin à un conflit qui comprenait un gel de 13 jours dans les ports de la Colombie-Britannique, mais comprenait également des «éléments supplémentaires» spécifiquement destinés aux membres de la section locale 514.
«La BCMEA n’exige aucune concession du syndicat dans son offre finale, et l’offre finale ne supprime aucun élément de la convention collective existante», ont déclaré les employeurs.
Inquiétudes pour les conséquences sur l’industrie
L’interruption de travail à Vancouver, le plus grand port du Canada, a suscité l’inquiétude des dirigeants politiques et des chefs d’entreprise.
Dans une déclaration écrite conjointe, la première ministre de l’Alberta, Danielle Smith, et le ministre des Transports, Devin Dreeshen, ont appelé le gouvernement fédéral à «intervenir d’urgence par l’arbitrage exécutoire» dans les conflits futurs, tout en améliorant «sa stratégie de gestion des relations de travail» dans les secteurs des transports réglementés par le gouvernement fédéral.
«Ces ports exportent chaque jour pour environ 50 millions de dollars de produits de base clés de l’Alberta, notamment des produits agricoles, énergétiques et liés à la fabrication», indique le communiqué. «Un arrêt de travail prolongé perturbera le mouvement de ces produits, retardera d’autres réseaux de transport, comme le rail et le camionnage, et nuira aux économies de l’Alberta et du Canada.»
Le président de l’Association canadienne de l’industrie de la chimie, Bob Masterson, a déclaré dans un communiqué que «ce niveau d’incertitude met encore plus à mal la réputation du Canada en tant que partenaire commercial fiable», tandis que Fertilizer Canada a exhorté le gouvernement à légiférer pour modifier les dispositions de service qui obligeraient à continuer pendant une grève ou un lock-out dans le secteur du débardage.
«Nous sommes une fois de plus sur le point de perdre l’accès à un corridor commercial essentiel», a déploré la présidente de Fertilizer Canada, Karen Proud, dans le communiqué, soulignant les perturbations survenues plus tôt cette année lorsque les deux principaux chemins de fer canadiens ont fermé en raison de conflits de travail.
«L’engrais potassique sera l’un des produits les plus durement touchés», a-t-elle déclaré. «Nous demandons à la BC Maritime Employers Association et à l’International Longshore and Warehouse Union Canada de trouver une solution et d’éviter un arrêt catastrophique.»