Une frappe aérienne israélienne dans le nord de la bande de Gaza a fait au moins 20 morts, principalement des femmes et des enfants, ont indiqué mardi des responsables palestiniens, alors que les habitants fuyaient l’assaut israélien.
Certains ont dit qu’ils avaient à peine mangé, l’aide étant coupée depuis des semaines dans la partie la plus isolée et la plus gravement détruite du territoire palestinien.
Israël mène depuis des semaines une offensive dans l’extrémité nord de la bande de Gaza, affirmant qu’elle vise les combattants du Hamas qui se sont regroupés dans cette région.
Les Nations unies ont déclaré qu’Israël n’avait pas autorisé l’entrée de nourriture et d’autres fournitures dans la zone au nord de la ville de Gaza depuis le début de l’assaut, même si des dizaines de milliers de personnes y sont toujours. L’administration américaine de Joe Biden a vivement critiqué cette décision, prévenant que les lois américaines pourraient l’obliger à limiter l’aide militaire à Israël si davantage d’aide humanitaire n’était pas autorisée à entrer.
L’attaque de lundi soir a touché une maison où plusieurs familles déplacées s’étaient réfugiées, dans la ville de Beit Lahiya, près de la frontière avec Israël, selon Hossam Abu Safiya, le directeur de l’hôpital Kamal Adwan, récemment attaqué et à peine fonctionnel, qui a reçu les victimes.
L’armée israélienne a déclaré avoir ciblé un entrepôt d’armes à partir duquel un militant avait opéré, et que «de nombreuses mesures ont été prises pour atténuer le risque de blesser des civils».
Parmi les morts, on retrouve huit femmes et six enfants, selon une liste fournie par le service d’urgence du ministère de la Santé de Gaza. Des frappes distinctes ailleurs dans la bande de Gaza, tôt mardi, ont tué 10 autres personnes, selon les responsables de la santé.
Des dizaines de Palestiniens sont sortis de Beit Lahiya mardi – principalement des femmes et des enfants – traînant des sacs à dos et des cartables avec leurs effets personnels. Ils sont entrés dans la ville de Gaza par une rue où tous les bâtiments avaient été complètement rasés ou fortement endommagés.
«Nous sommes venus pieds nus. Nous n’avons pas de sandales, pas de vêtements, rien. Nous n’avons pas d’argent. Il n’y a ni nourriture ni boisson», a raconté Huda Abu Laila. «Nous avons faim. La faim nous a tuées. Nous avons été assiégées pendant un mois sans eau ni nourriture», a poursuivi la vieille femme décharnée, avant d’éclater en sanglots.
Um Nidal Abu Laila, une autre femme fuyant Beit Lahiya, a déclaré que des corps de Palestiniens tués lors de l’assaut gisaient dans les rues. «Personne n’est en mesure de les récupérer», a-t-elle indiqué.
Sous les décombres
L’agence de défense civile de Gaza a dit avoir reçu des informations faisant état de personnes vivantes coincées sous les décombres de bâtiments détruits par les troupes israéliennes à Beit Lahiya, mais elle n’a pas pu envoyer d’équipes pour les secourir. L’agence a déclaré que l’armée avait empêché ses équipes d’opérer dans la zone au cours des deux dernières semaines. Le ministère palestinien de la Santé à Gaza a déclaré qu’aucune ambulance ne fonctionnait actuellement au nord de la ville.
Deux patients âgés, dont l’un était atteint d’un cancer, sont morts alors qu’ils tentaient de quitter Beit Lahiya en attendant de franchir un poste de contrôle militaire israélien, a indiqué le Croissant-Rouge palestinien.
L’armée avait ordonné l’évacuation complète de Beit Lahiya, de la ville voisine de Beit Hanoun et du camp de réfugiés urbain de Jabaliya.
Pourtant, l’ONU a estimé la semaine dernière qu’environ 100 000 personnes y restaient, même après que des dizaines de milliers d’entre elles aient fui le mois dernier, lors de la dernière vague de déplacements au sein du territoire assiégé. Environ 90 % des 2,3 millions d’habitants ont fui pendant les 13 mois de guerre, souvent à plusieurs reprises.
L’armée israélienne est revenue dans plusieurs zones de la bande de Gaza, à plusieurs reprises, après des opérations précédentes, alors que le Hamas continue de mener des attaques éclair contre les troupes et de tirer des roquettes occasionnelles sur l’État hébreu.
Les trois hôpitaux desservant la zone sont en grande partie inaccessibles en raison des combats, et les ambulances ont cessé de fonctionner. Les troupes israéliennes ont attaqué l’hôpital Kamal Adwan le mois dernier, affirmant que des militants du Hamas y étaient hébergés, des allégations démenties par les responsables de la santé palestiniens.
L’offensive a fait craindre aux Palestiniens qu’Israël ne mette en œuvre un plan de reddition ou de famine pour le nord de la bande de Gaza proposé par d’anciens généraux. En vertu de ce plan, les civils seraient expulsés, l’aide serait interrompue et toute personne restante serait considérée comme un combattant.
L’armée israélienne a nié avoir reçu de tels ordres, mais le gouvernement n’a pas dit s’il adoptait une partie ou la totalité du plan.
Une tente de réfugiés
Tôt mardi, une frappe israélienne a touché une maison dans le quartier de Tufah à Gaza, tuant deux enfants et leurs parents, selon les services d’urgence du ministère de la Santé. Deux autres enfants ont été blessés, a-t-il ajouté.
À Al-Zawaida, dans le centre de la bande de Gaza, une frappe a touché une tente où une famille déplacée s’était réfugiée, tuant quatre personnes, dont une mère et ses deux enfants, selon l’hôpital des Martyrs d’Al-Aqsa, dans la ville voisine de Deir el-Balah. Une autre frappe a touché une maison à Deir el-Balah, tuant deux personnes, a indiqué l’hôpital. Un journaliste de l’Associated Press a compté les corps à la morgue de l’hôpital.
L’armée israélienne affirme qu’elle ne cible que les combattants et les accuse de se cacher parmi les civils. Elle commente rarement les frappes individuelles, qui tuent souvent des femmes et des enfants.
La guerre a commencé lorsque des combattants dirigés par le Hamas ont attaqué le sud d’Israël le 7 octobre 2023, tuant quelque 1200 personnes, principalement des civils, et en prenant 250 autres en otage. Une centaine de captifs se trouvent toujours dans la bande de Gaza, dont environ un tiers seraient morts.
L’offensive de représailles d’Israël a tué plus de 43 000 Palestiniens, selon le ministère de la Santé de la bande de Gaza, qui ne fait pas de distinction entre civils et combattants dans son bilan, mais affirme que plus de la moitié des personnes tuées étaient des femmes et des enfants.