Le juge qui supervise la proposition de règlement avec les cigarettiers est optimiste

Paola Loriggio, La Presse Canadienne
Le juge qui supervise la proposition de règlement avec les cigarettiers est optimiste

TORONTO — Le juge en chef de la Cour supérieure de l’Ontario estime que les questions en suspens concernant le règlement à l’amiable de 32,5 milliards $ proposé entre trois grands cigarettiers et leurs créanciers devraient pouvoir être résolues au cours des prochains mois.

Le juge Geoffrey Morawetz a maintenant rendu publics les motifs qui l’ont mené à approuver à l’audience, la semaine dernière, une motion prévoyant que les représentants des créanciers examinent et votent en décembre prochain sur la proposition de règlement.

L’une des sociétés, JTI-Macdonald, avait déclaré la semaine dernière qu’elle s’opposait à la proposition de règlement dans sa forme actuelle et elle a demandé au tribunal de reporter la date du vote jusqu’à ce que plusieurs problèmes soient résolus.

Les deux autres sociétés, Rothmans, Benson & Hedges et Imperial Tobacco Canada, ne se sont pas opposées à la motion, mais elles ont déclaré qu’elles conservaient le droit de contester éventuellement la proposition.

La proposition de règlement annoncée le mois dernier prévoit 24 milliards $ pour les provinces et les territoires qui veulent récupérer les coûts des soins de santé liés au tabagisme, et environ 6 milliards $ pour les fumeurs du Canada et leurs proches. Si le règlement proposé est accepté par une majorité de créanciers, il passera ensuite à l’étape suivante: une audience pour obtenir l’approbation du tribunal, provisoirement prévue pour le début de l’année prochaine.

Dans une décision écrite publiée lundi, le juge Morawetz soutient qu’il est clair que tous les problèmes n’avaient pas été résolus à ce stade des procédures. Il souligne notamment les «problèmes en suspens» entre les sociétés concernant leurs parts respectives du montant total, ainsi que le débat sur le statut de créancier d’une des entreprises affiliées de JTI-Macdonald.

Pour que les créanciers votent sur une proposition, le tribunal doit être convaincu que ce plan n’est pas «voué à l’échec» ni au stade de l’acceptation des créanciers ni au stade de l’approbation par le tribunal, a-t-on entendu la semaine dernière devant le tribunal.

Or, constate le juge, les avocats représentant les plaignants dans deux actions collectives au Québec, ceux représentant les fumeurs dans le reste du Canada et 10 des 13 provinces et territoires ont exprimé leur soutien à la proposition.

Bien que JTI-Macdonald ait soutenu que ses préoccupations n’avaient pas été prises en compte, l’avocat de cette société «a reconnu que les problèmes n’étaient pas insolubles», a écrit le juge Morawetz.

«À ce stade-ci, je ne suis pas en mesure de conclure que les plans sont voués à l’échec», a-t-il écrit dans ses motifs. «Il existe un certain nombre de problèmes en suspens entre les parties, mais il n’y a aucun problème qui, à mon avis, ne puisse pas être résolu.»

Une longue saga

Le règlement proposé est l’aboutissement de plus de cinq ans de négociations dans ce que le juge Morawetz a qualifié d’une des «procédures d’insolvabilité les plus complexes de l’histoire du Canada».

En 2015, un juge de la Cour supérieure du Québec avait d’abord ordonné aux trois entreprises de payer environ 15 milliards $ dans le cadre de deux actions collectives impliquant des Québécois qui avaient commencé à fumer entre 1950 et 1998 et qui sont tombés malades ou sont devenus dépendants à la cigarette — ainsi que leurs héritiers.

Ce jugement historique a été confirmé par la Cour d’appel du Québec en 2019, ce qui a incité les cigarettiers à demander la protection des tribunaux contre leurs créanciers, en Ontario.

Toutes les procédures judiciaires contre les entreprises, y compris celles intentées par les gouvernements provinciaux, ont été suspendues pendant les négociations. Cette ordonnance a maintenant été prolongée jusqu’à la fin janvier 2025.

Au total, les entreprises ont dû faire face à des réclamations de plus de 1000 milliards $, selon les documents judiciaires.

En octobre de l’année dernière, le tribunal a demandé au médiateur dans l’affaire, l’ancien juge en chef de l’Ontario Warren Winkler, et aux contrôleurs nommés pour chaque entreprise d’élaborer un projet de règlement global, avec la contribution des entreprises et des créanciers.

Un an plus tard, ils ont proposé un plan qui comprendrait des paiements initiaux ainsi que des paiements annuels basés sur le revenu net après impôt des entreprises et tout remboursement d’impôt, selon les documents judiciaires.

Les contrôleurs estiment qu’il faudrait environ 20 ans aux entreprises pour payer la totalité du montant, selon les documents judiciaires.

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