OTTAWA — Les enjeux frontaliers entre le Canada et les États-Unis ont été centraux dans la première réunion «fructueuse» du comité du conseil des ministres fédéraux sur les relations avec les Américains.
La vice-première ministre, Chrystia Freeland, qui préside le groupe de travail, a insisté vendredi sur cette priorité et sur les préoccupations des Canadiens quant à la frontière canado-américaine.
«Contrôler notre frontière, savoir qu’on est vraiment un pays souverain qui contrôle notre frontière, c’est fondamental pour la sécurité des Canadiens et Canadiennes partout au pays», a déclaré, au terme de la réunion, celle qui a piloté des négociations avec le président désigné des États-Unis, Donald Trump, durant son premier mandat.
Le candidat républicain sorti vainqueur des élections américaines de mardi a fait campagne en promettant l’expulsion de millions d’immigrants illégaux.
Cela survient dans le contexte où le Canada vient d’annoncer une baisse significative des niveaux d’immigration, tant pour les nouveaux arrivants venant sur une base temporaire que pour ceux voulant obtenir la résidence permanente.
Le premier ministre Justin Trudeau a tenu un discours similaire, vantant le système d’immigration canadien comme étant «robuste» et qui «fonctionne selon les règles».
«On est prêts à pouvoir assurer de continuer de protéger l’intégrité de nos frontières, de travailler avec les Américains, en temps et lieu», a-t-il dit au cours d’un passage à Vancouver.
La ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, estime que «les Canadiens ont confiance dans (le) système d’immigration».
«Mais c’est à nous de travailler pour maintenir cette confiance-là. C’est pour ça que nous avons diminué les seuils d’immigration de 20 % et c’est pourquoi c’est une priorité», a-t-elle soutenu.
Mme Freeland a affirmé que cela est loin d’être un hasard si le vice-président du comité qu’elle préside est le ministre de la Sécurité publique, Dominic LeBlanc. Elle a aussi noté que la ministre de l’Immigration, Marc Miller, fait partie du groupe.
«Nous avons un plan et nous travaillons à l’élaborer davantage», a ajouté Mme Freeland en précisant qu’elle n’était pas prête à en dévoiler des détails.
Un peu plus tôt, Mme Joly avait aussi évoqué un tel «plan» sans en dresser les contours.
M. Miller ne s’est pas présenté devant les journalistes, vendredi. Il n’était pas non plus présent en Chambre, au cours de la période des questions, pour répondre aux interventions du Bloc québécois interpellant le gouvernement sur les préoccupations concernant la migration en provenance des États-Unis.
La leader parlementaire adjointe du Bloc, Christine Normandin, reproche aux libéraux de Justin Trudeau de ne pas vouloir agir tant qu’une crise migratoire ne sera pas déjà installée.
«Est-ce que c’est vraiment de la peur mal placée que de vouloir éviter d’autres chemins Roxham?», a-t-elle lancé en faisant référence au passage de fortune situé en Montérégie qui était auparavant utilisé par des migrants pour entrer au Canada de façon irrégulière dans le but d’ensuite y demander l’asile.
Le ministre du Travail, Steven MacKinnon, a accusé le Bloc de vouloir faire peur aux Canadiens. «Le Bloc québécois n’arrête pas de vouloir évoquer des scénarios qui ne sont aucunement en jeu. Nos services frontaliers ont un plan, ont toujours eu un plan et vont continuer d’avoir un plan pour assurer la sécurité à notre frontière», a-t-il déclaré.
Le député libéral Francis Drouin a ajouté qu’Ottawa ne divulguait pas les détails opérationnels concernant la Gendarmerie royale du Canada ou l’Agence des services frontaliers pour des raisons de sécurité.
Quoi qu’il en soit, Mme Freeland a noté que les enjeux économiques sont aussi une priorité pour le comité ministériel, alors que M. Trump a promis d’imposer des tarifs douaniers généralisés sur les importations américaines.
La vice-première ministre n’a pas manqué de rappeler l’épisode des tarifs douaniers sur l’acier et l’aluminium, durant la présidence précédente de M. Trump, au cours duquel le Canada a riposté «dollar pour dollar» par des mesures de représailles.
Celle qui est aussi ministre des Finances a souligné avoir rencontré jeudi des dirigeants de l’industrie de l’acier lors d’un passage dans la région de Toronto.
M. Trudeau, de son côté, croit avoir démontré, au cours de la renégociation de l’Accord de libre-échange nord-américain avec la précédente administration Trump, «que la réussite des Américains n’est pas en compétition avec la réussite des Canadiens, mais est complémentaire».
Le groupe de ministres fédéraux dédié aux relations canado-américaines a été ressuscité, plus tôt cette semaine, avec une nouvelle composition. Un tel comité ne s’était pas réuni depuis que Donald Trump a quitté ses fonctions au début de 2021.