Quelques heures après l’élection de Donald Trump à la présidence américaine, le Dr Clayton Alfonso a reçu deux messages de patientes souhaitant remplacer leur stérilet. Les jours suivants, trois femmes se sont renseignées sur la possibilité de se faire ligaturer les trompes.
Ces femmes ont déclaré que la victoire du républicain était la raison pour laquelle elles faisaient ce choix maintenant.
Les demandes de contraception à long terme et de stérilisation permanente ont augmenté dans tout le pays depuis l’élection, ont indiqué des médecins à l’Associated Press.
Les entreprises qui vendent des contraceptifs d’urgence et des pilules abortives disent qu’elles constatent des pics importants de demandes de la part de personnes qui stockent les médicaments.
L’une d’entre elles a constaté une augmentation de 966 % des ventes de contraceptifs d’urgence par rapport à la semaine précédente dans les 60 heures qui ont suivi l’élection.
«J’ai vu une hausse après l’élection de Donald Trump en 2016 et après l’annulation de l’arrêt Roe c. Wade en 2022, mais mes patientes semblent plus effrayées cette fois», a affirmé M. Alfonso, gynécologue-obstétricien à l’Université Duke, en Caroline du Nord.
Même si les antiavortement font pression sur M. Trump pour qu’il impose davantage de restrictions sur les pilules abortives, on ne sait pas exactement ce qui sera fait en matière d’accès aux contraceptifs de toute sorte au cours du second mandat du milliardaire.
En mai, il avait déclaré à une chaîne de télévision de Pittsburgh qu’il était prêt à soutenir une réglementation sur la contraception. Toutefois, après que les médias ont fait état de cette entrevue, il a écrit sur sa plateforme de médias sociaux Truth Social qu’il «n’a jamais plaidé et ne plaidera jamais» en faveur d’une restriction de la régulation des naissances et d’autres contraceptifs.
M. Alfonso a souligné que les femmes sont particulièrement préoccupées par les stérilets, qui ont été attaqués par les opposants à l’avortement, qui estiment que la vie commence lorsqu’un ovule est fécondé.
Les experts affirment que ces dispositifs agissent principalement en bloquant la fécondation, mais qu’ils peuvent aussi rendre plus difficile l’implantation d’un ovule fécondé dans l’utérus.
Une patiente qui a demandé une ligature des trompes mardi a déclaré à M. Alfonso qu’elle ne voulait pas d’enfants et qu’elle était «absolument terrifiée à l’idée d’une grossesse forcée ou de l’impossibilité d’accéder à un moyen de contraception».
La Dre Grace Ferguson, une gynécologue-obstétricienne qui pratique des avortements à Pittsburgh, a indiqué que ses patientes étaient plus nombreuses à programmer la pose d’un stérilet ou à stocker des contraceptifs d’urgence, lui disant d’emblée que c’était «à cause du changement d’administration».
Une patiente, Mara Zupko, a déclaré qu’elle souhaitait obtenir une contraception d’urgence sur ordonnance, car elle est à la limite du poids autorisé pour Plan B, le type de contraception le plus connu en vente libre. Son mari va subir une vasectomie.
«Nous avons toujours hésité sur le fait d’avoir des enfants ou non, mais, comme le monde est devenu de plus en plus effrayant, nous avons réalisé que nous ne voulions pas mettre un enfant dans cet environnement. De plus, il y a des risques pour ma santé», a-t-elle dit.
Un phénomène qui s’accélère
Les femmes se tournent également vers des entreprises qui vendent des contraceptifs d’urgence en ligne ou proposent des pilules abortives (mifépristone et misoprostol) au moyen de la télésanté, un phénomène qui existait déjà avant les élections, mais qui s’est accéléré selon certaines entreprises.
Une étude réalisée en début d’année a montré que le fournisseur de pilules abortives Aid Access a reçu environ 48 400 demandes anticipées de pilules de septembre 2021 à avril 2023, les demandes étant les plus nombreuses juste après la fuite de la nouvelle de l’annulation de l’arrêt Roe c. Wade, mais avant l’annonce formelle.
D’autres recherches ont montré que davantage de femmes se sont fait ligaturer les trompes après l’annulation de l’arrêt Roe c. Wade, les augmentations les plus importantes ayant été enregistrées dans les États qui interdisent l’avortement.
La mifépristone a une durée de conservation d’environ cinq ans et le misoprostol d’environ deux ans, selon Plan C, une organisation qui fournit des informations sur les avortements médicamenteux. Plan B a généralement une durée de conservation de quatre ans.
La société de télésanté Wisp a vu les commandes de pilules abortives grimper de 600 % entre le jour de l’élection et le lendemain. Entre le 6 et le 11 novembre, l’entreprise a enregistré une hausse de 460 % des ventes de ses produits de contraception d’urgence et de régulation des naissances.
Chez Winx Health, qui vend une contraception d’urgence appelée Restart et qui est axée sur la génération Z, les dirigeants ont constaté une augmentation de 966 % des ventes dans les 60 heures qui ont suivi l’élection par rapport à la semaine précédant l’élection.
Les «pilules du lendemain» sont légales dans tous les États, mais la cofondatrice de Winx, Cynthia Plotch, a déclaré que de nombreuses personnes semblent ne pas savoir ce qu’est la contraception d’urgence par rapport aux pilules abortives.
Dans un sondage réalisé en 2023 par l’organisation de recherche sur les politiques de santé KFF, la majorité des personnes interrogées ont affirmé savoir que ces deux choses ne sont pas identiques, mais seulement 27 % ont dit savoir que les pilules contraceptives d’urgence ne peuvent pas mettre fin à une grossesse.
M. Alfonso prévoit toutefois que l’augmentation des pilules contraceptives et abortives pourrait se stabiliser, comme ce fut le cas en 2016 et en 2022. Si la nouvelle administration «ne se concentre pas tout de suite sur les soins de santé, je pense que les gens n’y penseront plus jusqu’à ce que les médias s’en emparent», a-t-il avancé.
