Les tabagies demandent au gouvernement du Québec de créer ACCES Vapotage

Coralie Laplante, La Presse Canadienne
Les tabagies demandent au gouvernement du Québec de créer ACCES Vapotage

MONTRÉAL — Un peu plus d’un an après la mise en place par Québec d’une réglementation interdisant les saveurs dans les produits de vapotage, le Regroupement des tabagies du Québec estime que cette mesure est inefficace. Il demande au ministère de la Santé et des Services sociaux de s’inspirer du programme ACCES Tabac pour créer ACCES Vapotage, et ainsi freiner le commerce illégal de produits avec des saveurs.

Michel Poulin, porte-parole du Regroupement, indique que ses membres disent avoir constaté qu’il est toujours aussi facile pour les consommateurs de cigarette électronique de se procurer des produits avec des saveurs.

«La réalité, après un an, c’est qu’il n’y a pas de diminution (du vapotage) et au contraire, on a développé une nouvelle source de revenus pour les réseaux de contrebande de toutes sortes de choses», a dit M. Poulin.

Il a expliqué que le Regroupement a remarqué qu’il est toujours possible de se procurer des produits illégaux avec des saveurs dans des commerces de produits de vapotage, sur le web ou dans la rue, et que de nombreux jeunes vapotent encore autour des écoles.

M. Poulin a dit que le Regroupement estime que les conséquences pour les contrevenants à la loi ne sont pas assez salées et que les inspections ne sont pas suffisamment fréquentes et efficaces, amenant ainsi les tabagies qui appliquent la loi à être désavantagées.

«C’est pour ça que recommande au gouvernement de s’inspirer de la loi qu’ils avaient fait au niveau d’ACCES Tabac, pour justement augmenter les amendes maximales et minimales, et inciter les municipalités et les forces policières à en faire une priorité», a-t-il soutenu.

Le programme ACCES Tabac (Actions Concertées pour Contrer les Économies Souterraines) a été mis en place en 2001 pour s’attaquer au commerce illégal du tabac. En novembre 2009, la Loi modifiant la Loi concernant l’impôt sur le tabac et d’autres dispositions législatives principalement afin de lutter contre la contrebande de tabac a été adoptée, renforçant le programme ACCES Tabac, qui a fait ses preuves, selon M. Poulin.

«On dit: écoutez, prenez quelque chose qui fonctionne vraiment bien et appliquez-le pour le vapotage. Et vous allez voir, les résultats vont être-là», a soutenu le porte-parole du Regroupement des tabagies.

Le gouvernement du Québec indique sur son site web que l’infraction de «vendre, offrir de vendre ou de distribuer un produit du tabac ou de vapotage comportant une saveur ou un arôme autres que ceux du tabac» s’accompagne d’une amende de 2500 $ à 125 000 $, et de 5000 $ à 250 000 $ en cas de récidive.

Une porte-parole du cabinet du ministre de la Santé, Christian Dubé, a réagi par écrit à la demande du Regroupement.

«L’objectif principal du nouveau règlement est de réduire l’attrait et l’accès des produits de vapotage, notamment par l’élimination des saveurs, pour protéger la santé des Québécois, en particulier celle des jeunes. Les inspecteurs du MSSS (ministère de la Santé et des Services sociaux) font le tour des boutiques pour émettre des constats et des dossiers sont présentement en analyse. Les amendes peuvent atteindre 250 000 $. Tout le monde doit suivre la loi et avoir à cœur la santé des Québécois et de nos jeunes», peut-on lire.

Un meilleur encadrement avant ACCES Vapotage

Pour Flory Doucas, codirectrice et porte-parole de la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac, si ACCES Vapotage n’est pas une mauvaise idée en soit, ce n’est pas ce qui permettrait de répondre aux enjeux actuels qui concernent surtout l’encadrement, plutôt que le respect de la fiscalité dont s’assure actuellement ACCES Tabac.

«Le problème, c’est un manque de conformité. Ce n’est pas la contrebande à laquelle on est habitués avec les produits du tabac, qui étaient essentiellement des produits de contrebande qui venaient des réserves autochtones [qui] étaient un peu instrumentalisées pour faire la distribution de ces produits-là», a-t-elle expliqué.

Elle a également souligné que ce n’est pas le règlement qui interdit les saveurs dans les produits de vapotage qui posent problème, mais bien «la mauvaise foi de l’industrie à se conformer au règlement».

Mme Doucas a indiqué que, dans les boutiques de produits de vapotage, des produits sont étiquetés comme étant à une saveur de tabac, mais leur emballage présente des éléments qui permettent d’informer le consommateur que le produit contient une autre saveur. Par exemple, il peut être écrit «tabac» sur l’étiquette, mais le papier est de couleur orange ou présente une ligne orange pour que le consommateur sache que le produit est en fait à la mangue.

Autre enjeu: le fait que les saveurs ne soient pas interdites dans l’ensemble du pays.

«Ce n’est pas qu’ACCES vapotage est une mauvaise idée, c’est que dans le contexte actuel, (il y a) des commerçants et des fabricants de grandes marques qui font la livraison des produits de vapotage à partir des autres provinces. Il n’y a pas une interdiction fédérale du commerce interprovincial pour les produits de vapotage, alors que c’est le cas au niveau des produits du tabac», a expliqué Mme Doucas.

Elle a indiqué qu’une interdiction fédérale des saveurs dans les produits de vapotage avait été proposée il y a trois ans, mais qu’un règlement se fait toujours attendre.

Mme Doucas a aussi dit que la taxe sur les produits de vapotage n’est pas spécifique au Québec, comme c’est le cas pour la taxe québécoise sur le tabac, et que du travail pourrait être fait sur cet aspect.

«C’est un peu suspect de demander à ce qu’on veuille que les policiers interviennent, mais on ne veut pas un encadrement des joueurs dans l’industrie», a-t-elle soulevé.

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