L’ancien directeur général de Tourisme Montérégie, qui poursuivait l’organisme, cinq employés et deux administrateurs pour 3 M$, a été débouté en cour. En plus de qualifier sa requête d’abusive, la juge Marie Gaudreau permet à certains défendeurs de réclamer à Éric Fournier des dommages-intérêts compensatoires et punitifs.
Dans son jugement de 43 pages rendu le 16 janvier dernier, la juge Marie Gaudreau conclut que la demande d’Éric Fournier, un résident de Saint-Jean-sur-Richelieu, n’est pas fondée et est abusive.
« Comme le soulignent les procureurs en défense, ce procès a permis de mettre à jour l’instrumentalisation que fait Fournier de la procédure judiciaire pour bâtir sa cause. Il utilise les interrogatoires hors cour pour faire la lumière sur les responsables. Il songe même à poursuivre d’autres personnes », écrit la juge Marie Gaudreau.
Les procureurs des deux administrateurs et de Tourisme Montérégie avaient entre autres plaidé l’abus de procédure. Ils alléguaient notamment que la réclamation totale est passée de 320 000 $ à 3 590 570,10 $, qu’Éric Fournier a multiplié les procédures à caractère exploratoire et les demandes de communication de documents non pertinents en plus d’avoir modifié ou ajouté plus de 150 paragraphes à sa requête initiale.
Modifications
La première requête introductive d’instance d’Éric Fournier, datée du 18 novembre 2014, a été modifiée à quatre reprises, dont le 9 juin 2015 pour y inclure Tourisme Montérégie. En cours de procédures, il a poursuivi jusqu’à 11 personnes différentes.
La nature de la plus récente version, datée du 13 février 2018, était définie comme « atteinte à la réputation » dans laquelle Éric Fournier réclamait à Tourisme Montérégie, deux administrateurs et cinq employés la somme de 3 051 614,16 $ en salaire perdu, en dommages punitifs et pour rembourser ses honoraires extrajudiciaires.
Au terme de ces procédures, la juge permet à deux administrateurs et à Tourisme Montérégie de présenter au tribunal leurs preuves pour réclamer à Éric Fournier « des dommages-intérêts compensatoires et punitifs découlant de l’abus de procédure » dans un délai de 120 jours.
Croyant être en présence de « circonstances particulières », la juge a également accueilli la demande d’exécution provisoire du jugement, qui le rend valide avant l’expiration des délais de recours.
« Fournier entend se servir de tous ses moyens financiers et légaux pour avoir gain de cause contre ses anciens employés, son ex-employeur et deux administrateurs personnellement. Ses agissements ont causé des torts, du stress et de grandes inquiétudes parmi eux », explique la juge dans sa décision.
Lettre anonyme
Le litige opposant Éric Fournier à Tourisme Montérégie, certains administrateurs et employés a débuté en janvier 2014. Une lettre anonyme, qui exprimait la volonté de ses employés de ne plus travailler avec lui, a été transmise aux administrateurs de Tourisme Montérégie.
Quelques jours plus tard, Éric Fournier a été suspendu avec solde, tandis qu’un consultant externe a été embauché pour mener une enquête interne. Au terme de ce processus, Éric Fournier a choisi de démissionner et de signer une quittance le 22 février 2014.
Prescription
Lors d’une rencontre tenue deux jours plus tard, Réjean Parent, un des administrateurs de Tourisme Montérégie, a « fait un résumé complet de tout le contenu du rapport du consultant externe. Il est donc clairement établi que dès le 24 février 2014, Fournier a connaissance du rapport du consultant. Le recours en diffamation contre Tourisme Montérégie est donc prescrit », écrit la juge.
Éric Fournier plaidait qu’il n’avait eu accès au contenu du rapport qu’en novembre 2015 lorsque celui-ci a été déposé en preuve. En vertu du Code civil du Québec, un recours pour atteinte à la réputation doit être intenté dans l’année qui suit le jour où une personne a connaissance d’être diffamée.
En outre, la juge Gaudreau ajoute que la quittance signée par Éric Fournier lors de son départ de Tourisme Montérégie rend irrecevable son recours contre l’organisme et deux administrateurs. Elle souligne d’ailleurs que ceux-ci n’ont failli à aucun de leurs devoirs inscrits au Code civil du Québec et ont agi de bonne foi tout au long du processus.
La juge Gaudreau écrit aussi que le « fardeau de prouver l’atteinte fautive à la réputation incombe à celui qui l’allègue. Or, en l’espèce, l’identité du ou des auteurs de la lettre anonyme n’a pas été établie par Fournier ni par preuve directe ni par présomption. La diffamation de Fournier, par les défendeurs, en lien avec l’envoi de la lettre anonyme n’a donc pas été démontrée. »
Le Canada Français a tenté d’obtenir les commentaires de Me Louisa Lakeb, la procureure d’Éric Fournier et de Me Sabrina St-Gelais, qui représente Marthe Langlois, Réjean Parent et Tourisme Montérégie. Au moment d’écrire ce texte, il n’avait pas été possible de leur parler.
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