Dès l’âge de cinq ans, Luc Carreau savait qu’il allait devenir cuisinier. Aujourd’hui âgé de 50 ans, l’homme aux fourneaux du restaurant L’Angéluc, à Saint-Alexandre, est exactement à l’endroit où il souhaitait être. Et les clients doivent réserver près de 18 mois à l’avance pour pouvoir goûter à sa cuisine.
Luc Carreau a vécu les 27 premières années de sa vie à Mont-Saint-Grégoire. Benjamin d’une fratrie de six enfants, il n’hésitait pas, dès l’âge de cinq ans, à préparer le petit-déjeuner pour toute sa famille. «Je me levais tôt le matin et je préparais les œufs, le bacon, les pains dorés. Ma mère me laissait utiliser le four», se remémore l’homme.
Il a goûté à la frénésie de la restauration quatre ans plus tard. L’oncle et la tante de son meilleur ami détenaient l’érablière Le Sous-Bois. «Je ramassais les bouteilles de bière sur les tables. Ça, ça m’a confirmé que j’aimais l’effervescence du milieu. Quand j’étais jeune, que je fermais les yeux et que je m’imaginais où j’allais être quand j’allais être grand, et bien maintenant je suis exactement où je me voyais quand j’étais petit. Ça me confirme que je suis à la bonne place», confie-t-il.
L’Angéluc
Celui qui détient un diplôme d’études professionnelles en cuisine a travaillé durant 15 ans au restaurant L’Imprévu avant de se lancer en affaires.
En 1997, il achète la maison située au 480, rue Saint-Denis, à Saint-Alexandre, dans le but d’en faire un restaurant. «Je voulais m’installer à Mont-Saint-Grégoire, mais Saint-Alexandre était la seule municipalité qui permettait d’ouvrir un restaurant dans une maison», explique M. Carreau.
Deux ans plus tard, après plusieurs rénovations, dont la réfection de la salle de bain, de la toiture et du balcon, la réalisation de nouvelles divisions et la mise en place d’une cuisine, Luc Carreau, alors âgé de 31 ans, ouvre les portes de L’Angéluc.
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Dès lors, le succès est au rendez-vous. «Le restaurant était plein dès la première journée», se rappelle le père d’un garçon de huit ans.
Il ajoute que son plan de match initial était simple et il le suit encore aujourd’hui. «Mon but, c’est que les gens se sentent chez eux quand ils viennent ici. Je voulais offrir quelque chose de différent qu’un restaurant traditionnel. Je ne veux pas que les gens viennent juste pour manger, je veux que les gens viennent passer une soirée. C’est un tout qui fait la renommée», croit le chef.
Il y a 19 ans, son concept était unique, poursuit-il. «J’essayais aussi de me démarquer dans la présentation des plats, de faire les choses différemment afin que les gens aient un sentiment d’appartenance. Je pense que j’ai réussi mon objectif, enchaîne Luc Carreau. Encore aujourd’hui, les gens me disent qu’ils se sentent chez eux.»
Malgré les années qui passent, L’Angéluc propose toujours un souper six services. Au fil du temps, le chef a cependant ajouté plus de choix à son menu.
18 mois d’attente
Quand il a ouvert son restaurant, Luc Carreau prévoyait servir une quarantaine de clients par semaine. «J’en ai 80 par jour», lance-t-il.
«Je ne m’attendais pas à ce beau succès. C’est un métier gratifiant. Tu offres du bonheur aux gens. Rarement, les gens sont déçus. Il y a deux ans d’attente. Quand ils viennent, c’est enfin leur soirée. En même temps, ça me crée beaucoup de pression, mais la demande est toujours là», constate l’homme d’affaires.
Au moment d’écrire ces lignes, les prochaines dates disponibles pour les vendredis et samedis soirs sont en février 2020. Les réservations pourraient s’accumuler encore et encore, mais Luc Carreau retarde l’achat d’un agenda.
Personnalités
Les gens viennent de diverses régions, même des États-Unis, pour s’asseoir à l’une de ses tables. Le chef propriétaire a aussi l’occasion d’accueillir des personnalités connues du grand public.
La veille de sa rencontre avec Le Canada Français, Luc Carreau a reçu Pierre Bruneau, le chef d’antenne du réseau TVA. Pierre Karl Péladeau a aussi déjà savouré sa cuisine.
«Il a salué tous les clients et il a pris du temps pour jaser avec les gens, même les plongeurs. Il leur a dit que lui aussi avait déjà fait ça, même si son père était riche. C’était une belle leçon de vie. J’ai trouvé ça généreux de sa part», se rappelle Luc Carreau.
Chaque lundi, il téléphone à ses clients qui ont une réservation la semaine suivante pour s’assurer de leur présence. Et cela occasionne parfois certaines discussions embarrassantes. «Ça arrive qu’une dame me dise, par exemple, que c’est son mari qui avait réservé pour sa fête, mais qu’il est décédé. Ou encore que ce soit la femme du monsieur que j’appelle qui avait réservé, mais qu’ils ne sont plus ensemble», raconte M. Carreau.
À ce moment-là ou lorsqu’il a une annulation de dernières minutes, Luc Carreau affiche la disponibilité sur la page Facebook de son restaurant. Les places se comblent en quelques minutes.
11 employés
Luc Carreau se considère chanceux de vivre un tel succès. Le restaurateur n’a aucune perte de nourriture et peut prévoir les aliments dont il aura besoin.
«J’ai un concept le fun pour la restauration. Je pense que bien des restaurateurs aimeraient avoir cet heureux problème», lance ce père qui adore assister aux parties de hockey de son fils.
Au départ, il était seul en cuisine et sa mère lavait la vaisselle. Aujourd’hui, l’homme emploie onze personnes, soit cinq serveurs, quatre plongeurs et deux cuisiniers.
«Je prône l’être humain. Ma force, c’est d’être humain autant avec mes employés qu’avec les gens qui m’entourent. Je ne suis pas insensible à grand-chose dans la vie.» – Luc Carreau
S’il est fier de créer de l’emploi, il est heureux de pouvoir offrir de bonnes conditions à ses employés. «Tout le monde gagne bien sa vie chez nous. Je n’ai pas un gros roulement de personnel. Avec les réservations, ils ont un salaire assuré, ce qui est rare en restauration», constate le chef propriétaire.
Relève?
Luc Carreau est présent à son restaurant sept jours sur sept. «Mon entreprise, c’est comme un enfant pour moi», illustre-t-il.
Ce dernier se dit très rigoureux dans sa façon de travailler. «C’est comme un athlète qui s’entraîne. Je suis très routinier. C’est ce qui fait en sorte qu’il y a une constance. La clé du succès, c’est la constance. Et en tant que patron, je m’inculque une discipline pour montrer l’exemple», poursuit M. Carreau.
Il s’octroie, de même qu’à ses employés, six semaines de vacances par année. Celles-ci sont réparties dans le temps des Fêtes, à la relâche scolaire et durant l’été.
Luc Carreau a espoir d’avoir une relève pour assurer la pérennité de son restaurant. À ce jour, il n’a cependant pas personne attitrée à ce rôle. S’il adore ce qu’il fait, il ne cache pas qu’il a aussi hâte de passer un week-end normal ou encore d’aller lui-même au restaurant un samedi soir.
«Être à son compte, c’est un défi. Ça ne s’enseigne pas, ça s’apprend, dit-il. Si c’était à refaire, je ne le referais pas. J’aurais trop peur. Il faut avoir une belle innocence pour partir à son compte et une tolérance au risque. Si on m’avait dit les montants des acomptes provisionnels que j’allais devoir envoyer au gouvernement, je ne l’aurais jamais cru! J’avais une belle innocence…», constate-t-il.
Par chance, il souligne qu’il a été bien entouré, notamment par la présence et les judicieux conseils d’un ami qui exerce la profession de comptable agréé.
J’ai mangé chez Luc avec ma très chère amie Louise qui est la belle-maman de Luc. Ils sont pour moi “ famille” depuis déjà 48 ans d’amitié. Je me suis rapprochée du coin et il me ferait immensément plaisir d’y retourner au printemps. Amitié Louise Robillard (Yannonie )
Moi aussi, ça fait trop longtemps xoxo