BRUXELLES — Des convois avec des centaines d’agriculteurs en colère conduisant des tracteurs lourds ont semé le chaos devant le siège de l’Union européenne (UE), à Bruxelles, jeudi, exigeant que les dirigeants d’un sommet européen apportent un soulagement à la hausse des prix et à la bureaucratie.
Les agriculteurs ont bombardé la police de la capitale belge avec des pétards, des œufs et des bouteilles de bière à travers l’épaisse fumée provenant des bottes de foin en feu. Les forces de sécurité ont utilisé des canons à eau pour éteindre les incendies et empêcher un agriculteur d’abattre un arbre sur les marches du Parlement européen.
Les manifestations de jeudi marquent le point culminant de semaines de protestations d’agriculteurs en Europe. Ceux-ci plaident qu’il est de plus en plus difficile de gagner décemment leur vie, alors que les coûts de l’énergie et des engrais augmentent en raison de la guerre russe en Ukraine et que les importations agricoles sont plus nombreuses et moins chères.
Les agriculteurs constituent un groupe électoral clé – tant au niveau européen qu’au niveau national – et les dirigeants se sont empressés de répondre à leurs demandes avant les élections parlementaires européennes de juin. Ces dernières semaines, les politiciens populistes et d’extrême droite se sont intéressés au sort des agriculteurs.
La Commission européenne, le pouvoir exécutif de l’UE, a annoncé mercredi son intention de protéger les agriculteurs des importations bon marché en provenance d’Ukraine en temps de guerre et de permettre aux agriculteurs d’utiliser certaines terres qui ont été contraintes de rester en jachère pour des raisons environnementales. Plus tôt dans la semaine, le gouvernement français, où les manifestations ont été particulièrement perturbatrices, a comblé les agriculteurs de promesses, notamment une aide financière d’urgence et des contrôles sur les importations alimentaires.
Les agriculteurs ont également été inscrits à l’ordre du jour du sommet européen de jeudi, censé être axé sur l’aide financière à l’Ukraine pour sa guerre contre l’invasion de la Russie. Les dirigeants ont réussi à conclure rapidement un accord sur l’octroi à l’Ukraine d’un nouveau programme de soutien de 50 milliards d’euros – mais le premier ministre belge Alexander De Croo a déclaré que les demandes des agriculteurs devaient être prises en compte.
«Nous devons également nous assurer qu’ils peuvent obtenir le juste prix pour les produits de haute qualité qu’ils fournissent. Nous devons également nous assurer que la charge administrative qui pèse sur eux reste raisonnable», a soutenu M. De Croo, dont le pays assure actuellement la présidence de l’UE.
On ne sait toutefois pas si des propositions concrètes émergeront de la réunion des 27 dirigeants.
Des manifestations semblables – auxquelles participent principalement de jeunes agriculteurs soutenant leurs familles – ont eu lieu dans toute l’UE pendant la majeure partie de la semaine. Des manifestants ont bloqué mercredi les artères de circulation à travers la Belgique, la France et l’Italie, cherchant à perturber le commerce dans les principaux ports et d’autres secteurs économiques importants.
Alors que les contestations ont été largement pacifiques, la police française a arrêté mercredi 91 manifestants qui se sont introduits de force dans le plus grand marché de gros de produits alimentaires d’Europe, a déclaré le préfet de police de Paris.
Les agriculteurs français ont d’ailleurs maintenu jeudi des blocages de la circulation sur huit autoroutes autour de Paris, ainsi que sur d’autres routes principales à travers le pays.
La police a libéré 79 manifestants qui avaient été arrêtés au marché de gros de Rungis, au sud de Paris. Les enquêtes se poursuivront, notamment grâce à des vidéos de la scène, pour identifier les responsables des dégâts, ont indiqué les autorités dans un communiqué.