En Nouvelle-Calédonie, un leader indépendantiste appelle à «maintenir la résistance»

Barbara Surk, The Associated Press
En Nouvelle-Calédonie, un leader indépendantiste appelle à «maintenir la résistance»

Le chef d’un parti indépendantiste de Nouvelle-Calédonie a appelé samedi ses partisans à «rester mobilisés» dans tout l’archipel français du Pacifique et à «maintenir la résistance» contre les efforts du gouvernement de Paris pour imposer des réformes électorales. Les autochtones kanaks craignent que ces réformes les marginalisent davantage.

Christian Tein, le chef du parti indépendantiste connu sous le nom de Cellule de coordination des actions de terrain (CCAT), s’est adressé à ses partisans et aux manifestants dans un message vidéo.

Il a été publié sur les réseaux sociaux deux jours après que lui et d’autres dirigeants indépendantistes ont rencontré le président français Emmanuel Macron, lors de sa visite sur le territoire à la suite de troubles qui ont fait sept morts et de nombreuses destructions.

M. Macron a fait pression à plusieurs reprises pour la suppression des barricades des manifestants auprès des dirigeants des deux camps de l’amère division néo-calédonienne: les autochtones kanaks, qui veulent l’indépendance, et les dirigeants pro-Paris, qui ne la veulent pas.

Le président français leur a déclaré que l’état d’urgence imposé par Paris pour au moins 12 jours, le 15 mai, pour renforcer les pouvoirs de la police ne pourrait être levé que si les dirigeants locaux appelaient à la suppression des barricades, érigées par les manifestants et les personnes essayant de protéger leurs quartiers, dans la capitale, Nouméa, et au-delà.

Dans le message vidéo, M. Tein a appelé les manifestants à «desserrer légèrement l’étau» sur leurs barricades à Nouméa, dans sa banlieue et le long des grands axes routiers de l’archipel, afin d’acheminer du carburant, de la nourriture, des médicaments et de faciliter l’accès aux soins de santé des habitants des îles dans le Nord et le Sud.

Mais M. Tein a insisté sur le fait que les barricades resteraient en place jusqu’à ce que les autorités françaises lèvent les mandats d’arrêt à résidence contre plusieurs membres de son parti et que le gouvernement Macron abandonne la réforme électorale dont les Kanaks craignent qu’elle ne dilue leur influence en permettant à certains nouveaux arrivants dans l’archipel de voter aux élections locales.

«On reste mobilisés. On maintient toute la résistance dans les quartiers», a déclaré Christian Tein, exhortant ses partisans à rester fermes et à s’abstenir de toute violence. «Il y a trop de souffrances, trop d’enjeux qui ont été mis là-dedans, et il faut y aller jusqu’au bout. Mais de manière coordonnée, structurée, organisée, pour qu’on puisse atteindre les objectifs. L’objectif principal, c’est l’accession de notre pays à la pleine souveraineté», a-t-il fait valoir.

Tensions et divisions

Les barricades, constituées de véhicules calcinés et d’autres débris, ont transformé certaines parties de Nouméa en zones interdites et rendu les déplacements périlleux, notamment pour les malades nécessitant des soins médicaux et pour les familles qui s’inquiètent de la nourriture et de l’eau après les pillages et les incendies de magasins.

La police du nord de la capitale calédonienne a démantelé plusieurs barrages routiers ces derniers jours, mais les manifestants se sont rapidement regroupés et les ont reconstruits. Les tensions restent vives dans tout l’archipel, ont déclaré samedi les autorités locales, malgré les mesures d’état d’urgence, qui comprennent un couvre-feu quotidien de 12 heures, l’interdiction des rassemblements publics, du transport d’armes et de la vente d’alcool, ainsi que le blocage de TikTok.

Au cours des sept derniers mois, la CCAT de M. Tein a organisé d’importantes marches pacifiques en Nouvelle-Calédonie contre la réforme électorale soutenue par Paris. Les troubles ont commencé au début de la semaine dernière après qu’une manifestation contre le projet de loi en discussion au Parlement français ait tourné à la violence.

Dans une déclaration distincte, le Front de libération nationale kanak et socialiste, un mouvement indépendantiste, a appelé Emmanuel Macron à retirer le projet de loi de réforme électorale si la France veut «mettre fin à la crise».

Les deux chambres du Parlement français, à Paris, ont déjà approuvé la refonte. L’étape suivante aurait été la tenue d’un congrès spécial des deux chambres à Versailles pour le mettre en œuvre en modifiant la Constitution française. C’était prévu fin juin.

S’exprimant après avoir rencontré les dirigeants de Nouvelle-Calédonie, le président Macron a déclaré qu’il n’imposerait pas la réforme électorale contestée qui a déclenché les pires troubles que le territoire ait connus depuis des décennies.

Il a appelé les dirigeants locaux à trouver un accord alternatif pour l’avenir de l’archipel et a présenté une feuille de route qui, selon lui, pourrait conduire à un autre référendum pour le territoire.

Trois référendums avaient déjà été organisés entre 2018 et 2021 par les autorités françaises dans le cadre de l’accord de paix de 1988. Ils ont produit une majorité de votes contre l’indépendance, bien que les partisans de l’indépendance aient boycotté le dernier vote, en décembre 2021.

Emmanuel Macron a déclaré qu’un autre référendum pourrait porter sur un accord global qui viendrait enrichir le texte déjà voté par le Parlement, sur lequel il espère que les dirigeants locaux se mettront d’accord dans les semaines et les mois à venir, après le démantèlement des barricades des manifestants, permettant la levée de l’état d’urgence et le retour de la paix.

La Nouvelle-Calédonie est devenue française en 1853 sous l’empereur Napoléon III, neveu et héritier de Napoléon. Elle devient territoire d’outre-mer après la Seconde Guerre mondiale, la nationalité française étant accordée à tous les Kanaks en 1957.

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