Le président russe Vladimir Poutine a clôturé jeudi le sommet des pays du BRICS en saluant son rôle de contrepoids à ce qu’il a appelé les «méthodes perverses» de l’Occident.
Le sommet de trois jours dans la ville russe de Kazan a réuni les dirigeants ou représentants de 36 pays, soulignant l’échec des efforts menés par les États-Unis pour isoler la Russie à cause de ses actions en Ukraine.
Le conflit a été évoqué à plusieurs reprises lors de la réunion, qui a vu la première visite en Russie du secrétaire général des Nations Unies Antonio Guterres depuis plus de deux ans et a suscité une réaction de colère à Kiev. M. Guterres a appelé à «une paix juste» en Ukraine, conformément à la Charte des Nations Unies, au droit international et aux résolutions de l’Assemblée générale. Il a également appelé à une fin immédiate des combats à Gaza, au Liban et au Soudan.
Lors d’une conférence de presse jeudi soir, le président Poutine a été interrogé sur la promesse de l’ancien président américain Donald Trump de mettre fin aux combats en Ukraine.
«Ce que M. Trump a dit récemment, ce que j’ai entendu, c’est qu’il a parlé du désir de tout faire pour mettre fin au conflit en Ukraine, a déclaré M. Poutine. Il me semble qu’il l’a dit sincèrement. Nous saluons certainement ce genre de déclarations, peu importe qui les fait.»
On a également demandé au président russe si des troupes nord-coréennes étaient présentes en Russie, ce qu’il n’a ni confirmé ni démenti. Les États-Unis ont affirmé mercredi que 3000 soldats nord-coréens ont été déployés en Russie et s’entraînent dans plusieurs endroits.
«Les images sont une chose sérieuse, s’il y a des images, alors elles reflètent quelque chose», a-t-il déclaré lorsqu’on l’a interrogé sur les photos satellites des troupes.
M. Poutine a noté que les législateurs à Moscou ont ratifié plus tôt dans la journée un pacte avec la Corée du Nord sur l’assistance militaire mutuelle dans le cadre d’un «partenariat stratégique» avec Pyongyang.
«Nous n’avons jamais douté que les dirigeants nord-coréens prennent nos accords au sérieux. Ce que nous ferons et comment nous le ferons dans le cadre de cet article est notre affaire», a-t-il déclaré.
Sortir du modèle occidental
Le sommet a porté sur l’approfondissement de la coopération financière, y compris le développement d’alternatives aux systèmes de paiement dominés par l’Occident, les efforts pour régler les conflits régionaux et l’expansion du groupe des BRICS.
L’alliance qui comprenait initialement le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud lors de sa fondation en 2009 s’est élargie pour inclure l’Iran, l’Égypte, l’Éthiopie, les Émirats arabes unis et l’Arabie saoudite. La Turquie, l’Azerbaïdjan et la Malaisie ont officiellement déposé une demande d’adhésion, et plusieurs autres pays ont exprimé leur intérêt à rejoindre le groupe.
Le Kremlin a présenté le sommet comme «le plus grand événement de politique étrangère jamais organisé» par la Russie.
S’exprimant lors de ce qui a été surnommé la session BRICS+, qui incluait les pays qui envisagent de rejoindre le bloc, M. Poutine a accusé l’Occident de tenter d’endiguer la puissance croissante du Sud global avec «des sanctions unilatérales illégales, un protectionnisme flagrant, une manipulation des devises et des marchés boursiers, et une influence étrangère implacable favorisant ostensiblement la démocratie, les droits de l’homme et le programme de lutte contre le changement climatique».
«De telles méthodes et approches perverses – pour le dire franchement – conduisent à l’émergence de nouveaux conflits et à l’aggravation de vieux désaccords, a déclaré le président russe. L’Ukraine en est un exemple: elle est utilisée pour créer des menaces critiques à la sécurité de la Russie, tout en ignorant nos intérêts vitaux, nos préoccupations légitimes et la violation des droits des russophones.»
La Russie a particulièrement fait pression pour la création d’un nouveau système de paiement qui offrirait une alternative au réseau mondial de messagerie bancaire SWIFT et permettrait à Moscou d’éviter les sanctions occidentales et de commercer avec ses partenaires.
Dans une déclaration commune mercredi, les participants ont exprimé leur inquiétude quant à «l’effet perturbateur des mesures coercitives unilatérales illégales, y compris les sanctions illégales» et ont réitéré leur engagement à renforcer la coopération financière au sein du BRICS. Ils ont souligné les avantages de «moyens de paiement transfrontalier plus rapides, moins coûteux, plus efficaces, plus transparents, plus sûrs et plus inclusifs, fondés sur le principe de minimisation des barrières commerciales et d’un accès non discriminatoire».
Des alliances renforcées
Le président chinois Xi Jinping a souligné le rôle du bloc dans la garantie de la sécurité mondiale. M. Xi a noté que la Chine et le Brésil ont présenté un plan de paix pour l’Ukraine et ont cherché à rallier un soutien international plus large à ce plan. L’Ukraine a rejeté la proposition.
«Nous devons favoriser la désescalade de la situation dès que possible et ouvrir la voie à un règlement politique», a-t-il déclaré.
MM. Poutine et Xi avaient annoncé un partenariat «sans limites» quelques semaines avant que la Russie n’envoie des troupes en Ukraine en 2022. Ils se s’étaient déjà rencontrés deux fois cette année, à Pékin en mai et lors d’un sommet de l’Organisation de coopération de Shanghai au Kazakhstan en juillet.
La coopération de la Russie avec l’Inde a également avancé, New Delhi considérant Moscou comme un partenaire éprouvé depuis la guerre froide malgré les liens étroits de la Russie avec la Chine, rivale de l’Inde. Alors que les alliés occidentaux souhaitent que New Delhi soit plus actif pour persuader Moscou de mettre fin aux combats en Ukraine, le premier ministre indien Narendra Modi a évité de condamner la Russie tout en mettant l’accent sur un règlement pacifique.
Les médias russes ont présenté le sommet comme un coup politique fort qui a fait craindre à l’Occident de perdre son influence mondiale. Les émissions de télévision d’État et les bulletins d’information ont souligné que les pays du BRICS représentent environ la moitié de la population mondiale, constituent la «majorité mondiale» et défient «l’hégémonie occidentale».
Les animateurs de télévision ont cité abondamment des rapports des médias occidentaux selon lesquels le sommet a mis en évidence l’échec de l’isolement de Moscou. «L’Occident, les États-Unis, Washington, Bruxelles, Londres ont fini par s’isoler», a déclaré Yevgeny Popov, animateur d’une émission politique populaire sur la chaîne d’État Rossiya 1.