L’Ukraine et la Russie ont échangé vendredi des prisonniers de guerre, chacun renvoyant 75 prisonniers lors du premier échange de ce type au cours des trois derniers mois, ont indiqué des responsables.
Les prisonniers de guerre ukrainiens, dont quatre civils, ont été ramenés à bord de plusieurs autocars qui se sont rendus dans la région de Soumy, au nord-est de l’Ukraine. En débarquant, ils ont crié de joie et ont appelé leurs familles pour leur dire qu’ils étaient chez eux. Certains se sont agenouillés et ont embrassé le sol, tandis que beaucoup se sont enveloppés dans des drapeaux jaune-bleu.
Ils se sont embrassés en fondant en larmes. Beaucoup semblaient émaciés et mal habillés.
Cet échange était le quatrième échange de prisonniers cette année et le 52e depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022. Il comprenait un total de 150 prisonniers de guerre et les Émirats arabes unis ont aidé à négocier ce dernier échange, a indiqué le ministère des Affaires étrangères à Kyiv.
Les deux parties se sont mutuellement blâmées pour ce qu’elles considèrent comme un ralentissement des échanges.
L’Ukraine a par le passé exhorté la Russie à échanger «tous contre tous» et des rassemblements appelant à la libération des prisonniers de guerre ont lieu chaque semaine dans toute l’Ukraine. Un responsable ukrainien au siège coordonnant les échanges, Vitalii Matviienko, a déclaré que «l’Ukraine est toujours prête».
Tatiana Moskalkova, médiatrice russe des droits de l’homme, a déclaré plus tôt cette semaine que Kyiv formulait de «nouvelles exigences artificielles», sans donner plus de détails.
«Je serai bientôt à la maison»
Parmi ceux qui ont été rapatriés en Ukraine vendredi se trouvait Roman Onyschuk, un informaticien qui a rejoint les forces ukrainiennes en tant que volontaire au début de l’invasion russe. Il a été capturé en mars 2022 dans la région de Kharkiv.
«Je veux juste entendre la voix de ma femme, la voix de mon fils. J’ai raté ses trois anniversaires», a-t-il raconté. Au cours des plus de 800 jours qu’il a passés en captivité, il n’a jamais communiqué avec sa famille et il ne sait pas dans quelle ville ils se trouvent actuellement.
«C’est un peu bouleversant», a expliqué Roman Onyschuk.
Grâce aux échanges, y compris celui de vendredi, l’Ukraine a récupéré un total de 3 210 membres de l’armée et des civils ukrainiens depuis le début de la guerre, selon le quartier général de coordination ukrainien pour le traitement des prisonniers de guerre.
Ni l’Ukraine ni la Russie ne divulguent le nombre total de prisonniers de guerre.
Dmytro Kantypenko a été capturé sur l’île aux Serpents dans la mer Noire dans les premiers jours de la guerre. Il faisait partie des personnes libérées vendredi et a déclaré avoir appelé sa mère pour lui dire qu’il était de retour en Ukraine.
«Je serai bientôt à la maison», a-t-il en essuyant ses larmes. Il a appris que sa femme a fui en Lituanie avec leur fils. La famille M. Kantypenko est originaire d’Izioum, dans la région de Kharkiv, qui a survécu à l’occupation russe.
Dmytro Kantypenko a raconté que les Russes l’avaient réveillé au milieu de la nuit sans aucune explication, ne lui donnant ainsi qu’un peu de temps pour se changer avant de partir.
Les rapports de l’ONU basés sur des entretiens post-libération ont révélé que la majorité des prisonniers de guerre ukrainiens sont soumis à un défaut des soins médicaux de routine, à de mauvais traitements graves et systématiques, voire à de la torture. Les mêmes rapports ont fait état de cas isolés d’abus à l’encontre de soldats russes, principalement lors de leur capture ou de leur transit vers des sites d’internement.
Au moins un tiers des Ukrainiens rentrés chez eux ont subi «des blessures, des maladies graves et des handicaps», selon le quartier général de coordination ukrainien pour le traitement des prisonniers de guerre.
Parmi les personnes rapatriées vendredi se trouvaient 19 combattants ukrainiens de l’île aux Serpents, 14 personnes capturées à la centrale nucléaire de Tchernobyl et 10 combattants de la ville de Marioupol capturés par la Russie.
Cinq femmes figuraient parmi les prisonniers de guerre ukrainiens rapatriés, dont Nataliia Manuilova, qui était cuisinière dans le régiment d’Azov et a passé plus de deux ans en captivité. Les Russes l’ont emmenée chez elle, à Marioupol, lui ont mis un sac sur la tête et lui ont attaché les mains, a-t-elle raconté.
«Je les déteste. Ils m’ont enlevé deux ans de ma belle vie, a-t-elle déclaré vendredi en serrant son fils dans ses bras. Je ne peux pas croire qu’il ait grandi tant que ça», s’est émue Nataliia Manuilova.
Les prisonniers de guerre ont été emmenés dans des hôpitaux pour deux semaines de rééducation.
Les Ukrainiens arborant des drapeaux bleus et jaunes sont descendus dans la rue et ont accueilli bruyamment leurs défenseurs chez eux.
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La journaliste de l’Associated Press Vasilisa Stepanenko a contribué à cette dépêche.