Le Pakistan envisage d’expulser des centaines de milliers d’Afghans

Munir Ahmed, The Associated Press

Le Pakistan envisage un plan visant à expulser des centaines de milliers d’Afghans supplémentaires qui vivent dans le pays depuis des années, a annoncé le ministère des Affaires étrangères, jeudi, dans le cadre d’une répression gouvernementale de plusieurs mois contre les migrants sans papiers.

Le projet est toujours en préparation, a précisé aux journalistes la porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Mumtaz Zahra Baloch, et que le gouvernement pourrait finalement le rejeter.

Il s’agirait de la «deuxième phase» du «Plan de rapatriement des étrangers illégaux» et impliquerait des personnes ayant reçu des documents d’identité connus sous le nom de «cartes de citoyen afghan» pour légaliser leur séjour au Pakistan pour une durée limitée.

«À ce stade, je n’ai pas de date à partager avec vous», a indiqué Mme Baloch lors d’un point de presse hebdomadaire dans la capitale, Islamabad, ajoutant qu’une annonce concernant l’action serait faite «à un moment approprié».

La répression menée par le Pakistan contre les migrants sans papiers a suscité de vives critiques de la part des Nations Unies, des agences humanitaires et des groupes de défense des droits de la personne.

Depuis le début des expulsions, on estime que 600 000 Afghans sont retournés dans leur pays d’origine. Après avoir forcé des milliers de personnes à rentrer chaque jour, les expulsions ont ralenti et semblent s’être arrêtées ces derniers mois.

Mercredi, à la suite de la visite du chef de l’agence des Nations Unies pour les réfugiés, Filippo Grandi, Islamabad a annoncé avoir prolongé le séjour de 1,45 million de réfugiés afghans résidant dans le pays.

Au cours de sa visite, M. Grandi a salué ce qu’il a décrit comme la suspension des expulsions par le gouvernement pakistanais.

Cependant, Baloch a nié que ce soit le cas et a déclaré qu’il n’y avait pas eu de suspension de la répression des migrants qui cible les sans-papiers valides. Les expulsions ne concernent que les personnes se trouvant illégalement au Pakistan et elles sont effectuées de «manière humaine», a indiqué Mme Baloch.

Elle a insisté sur le fait que les réfugiés afghans vivant là-bas n’avaient pas à s’inquiéter, car leur séjour était désormais terminé.

Une décision saluée par Amnistie internationale

Amnistie internationale a salué jeudi la décision d’Islamabad de prolonger d’un an les séjours. Thyagi Ruwanpathirana, chercheur régional du groupe pour l’Asie du Sud, a exhorté le Pakistan à «étendre cette bouée de sauvetage à tous les réfugiés afghans au Pakistan».

L’organisme a également exhorté le Pakistan à suspendre officiellement le «Plan de rapatriement des étrangers illégaux» et à mettre un terme à tous les retours forcés d’Afghans dans le pays.

Le Pakistan accueille depuis longtemps environ 1,7 million d’Afghans, dont la plupart ont fui pendant l’occupation soviétique de leur pays entre 1979 et 1989. Plus d’un demi-million d’autres ont quitté l’Afghanistan après la prise de pouvoir par les talibans en 2021, et des milliers attendent au Pakistan d’être réinstallés aux États-Unis et ailleurs.

Mme Baloch a également appelé la communauté internationale à accélérer le processus de réinstallation des milliers d’Afghans qui ont fui après la prise du pouvoir par les talibans, dont la plupart se trouvent toujours au Pakistan.

Ces Afghans attendent désespérément que leur demande de visa soit traitée pour pouvoir partir aux États-Unis, au Canada, en Allemagne, en Australie, en Italie et dans plusieurs autres pays.

Le retard dans la réinstallation a laissé ces Afghans dans une position vulnérable, confrontés à des difficultés économiques et au manque d’accès à la santé, à l’éducation et à d’autres services au Pakistan.

Les remarques de Mme Baloch ont semblé prendre au dépourvu le ministère afghan des Réfugiés et du Rapatriement.

Abdul Mutalib Haqqani, porte-parole du ministère, dit avoir appris par les voies officielles que les expulsions avaient cessé. Il a déclaré qu’aucun réfugié afghan n’avait été expulsé de force du Pakistan — qu’ils aient ou non des papiers en règle — et qu’aucune arrestation n’avait été signalée dans le pays voisin au cours des dernières 24 heures.

M. Haqqani a appelé le gouvernement d’Islamabad à donner aux Afghans suffisamment de temps pour quitter le Pakistan de manière ordonnée et à ce qu’il n’y ait pas d’expulsions forcées.

«Notre deuxième demande est que nos frères afghans retournent volontairement dans leur pays, a-t-il souhaité. Maintenant, il y a la paix dans le pays, alors les réfugiés devraient retourner chez eux.»

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