Le Vermont demande aux pétrolières de payer pour les changements climatiques

Lisa Rathke, The Associated Press
Le Vermont demande aux pétrolières de payer pour les changements climatiques

Le Vermont est devenu le premier État à adopter une loi exigeant que les entreprises de combustibles fossiles paient une partie des dommages causés par le changement climatique, après que l’État ait subi des inondations estivales catastrophiques et des dommages causés par d’autres phénomènes météorologiques extrêmes.

Le gouverneur républicain Phil Scott a permis que le projet de loi devienne une loi sans sa signature, jeudi en fin de journée, en déclarant qu’il était préoccupé par les coûts et les résultats d’un petit État s’attaquant seul à «Big Oil» dans ce qui sera probablement un combat juridique épuisant. Mais il a reconnu qu’il comprenait qu’il fallait faire quelque chose pour lutter contre les conséquences du changement climatique.

M. Scott, un républicain modéré dans un État essentiellement démocrate, a récemment annoncé qu’il se présentait à la réélection pour un cinquième mandat de deux ans. Il est en désaccord avec la législature contrôlée par les démocrates, qu’il a qualifiée de déséquilibrée, et les défenseurs de l’environnement s’attendaient à ce qu’il oppose son veto au projet de loi, mais il l’a ensuite laissé entrer en vigueur.

«Au lieu de se coordonner avec d’autres États comme New York et la Californie, qui disposent de ressources bien plus abondantes, le Vermont ― l’un des États les moins peuplés et dont le PIB est le plus faible du pays ― a décidé de récupérer seul les coûts liés au changement climatique», a écrit M. Scott dans une lettre adressée aux législateurs.

Il a toutefois indiqué qu’il comprenait le désir de rechercher des fonds pour atténuer les dommages causés par le changement climatique qui a affecté le Vermont «à bien des égards».

En juillet dernier, des pluies torrentielles ont inondé la capitale du Vermont, Montpelier, la ville voisine de Barre et certaines localités du sud de l’État, détruit des maisons et emporté des routes dans cet État rural. Pour certains, il s’agit de la pire catastrophe naturelle qu’ait connue l’État depuis les inondations de 1927, qui avaient fait des dizaines de morts et causé des dégâts considérables. Il a fallu des mois aux entreprises ― des restaurants aux magasins ― pour se reconstruire, perdant ainsi leur saison d’été et même d’automne. Plusieurs d’entre elles n’ont rouvert leurs portes que récemment, tandis que des dizaines de propriétaires se sont retrouvés avec des maisons dévastées par les inondations à l’approche de la saison froide.

En vertu de cette loi, le trésorier de l’État du Vermont, en consultation avec l’Agence des ressources naturelles, devra fournir, avant le 15 janvier 2026, un rapport sur le coût total, pour les habitants du Vermont et l’État, des émissions de gaz à effet de serre entre le 1er janvier 1995 et le 31 décembre 2024. L’évaluation portera sur les effets sur la santé publique, les ressources naturelles, l’agriculture, le développement économique, le logement et d’autres domaines. L’État utilisera les données fédérales pour déterminer la quantité d’émissions de gaz à effet de serre couvertes attribuée à une entreprise de combustibles fossiles.

Il s’agit d’un modèle pollueur-payeur qui concerne les entreprises actives dans l’extraction de combustibles fossiles ou le raffinage de pétrole brut et dont les émissions de gaz à effet de serre sont supérieures à 1 milliard de tonnes au cours de la période considérée. Les fonds pourraient être utilisés par l’État pour améliorer les systèmes de drainage des eaux pluviales, les routes, les ponts et les voies ferrées; déplacer, surélever ou moderniser les stations d’épuration; et améliorer l’efficacité énergétique des bâtiments publics et privés. Il s’inspire du programme fédéral de dépollution Superfund.

«Pendant trop longtemps, les géants des combustibles fossiles ont sciemment allumé l’allumette du dérèglement climatique sans être tenus de faire quoi que ce soit pour éteindre l’incendie, a estimé Paul Burns, directeur exécutif du Vermont Public Interest Research Group.

«Enfin, et peut-être pour la première fois, le Vermont va obliger les entreprises les plus responsables des inondations, des incendies et des vagues de chaleur liés au climat à répondre financièrement d’une part équitable des dommages qu’elles ont causés.»

Le Maryland, le Massachusetts et New York envisagent des mesures similaires.

L’American Petroleum Institute, principal groupe de pression de l’industrie pétrolière et gazière, s’est dit extrêmement préoccupé par le fait que la législation «impose rétroactivement des coûts et des responsabilités à des activités antérieures qui étaient légales, viole l’égalité de protection et le droit à une procédure régulière en tenant les entreprises pour responsables des actions de la société dans son ensemble, et est prépondérante par rapport à la loi fédérale».

Dans une lettre adressée aux législateurs avant l’entrée en vigueur du projet de loi, l’Institut a également indiqué que la mesure ne prévoyait pas d’informer les entreprises potentiellement concernées de l’ampleur des frais potentiels.

Les législateurs du Vermont savent que l’État sera confronté à des contestations juridiques, mais le gouverneur s’inquiète des coûts et des conséquences pour les autres États si le Vermont échoue.

Le représentant d’État Martin LaLonde, démocrate et avocat, estime que le Vermont dispose d’un dossier juridique solide. Les législateurs ont travaillé en étroite collaboration avec de nombreux juristes pour élaborer le projet de loi, a-t-il déclaré dans un communiqué.

«Plus important encore, les enjeux sont trop importants ― et les coûts trop élevés pour les habitants du Vermont ― pour que les entreprises à l’origine de ce gâchis soient libérées de leur obligation de contribuer à sa dépollution», a-t-il lancé.

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