MILWAUKEE — Trois jours après la fusillade de samedi lors d’un rassemblement de Donald Trump en Pennsylvanie, les fidèles du parti républicain envahissant les rues du centre-ville de Milwaukee faisaient de cet épisode une source de courage plutôt que de peur.
Les partisans vêtus de rouge semblaient porter leur confiance dans la résilience de l’ancien président comme une armure à l’approche du deuxième jour de la convention nationale du parti – et de son thème, «Redonner sa sécurité aux États-Unis».
Les intervenants sur la tribune devaient se concentrer principalement sur des messages éprouvés sur la criminalité et l’immigration clandestine.
M. Trump a déjà prononcé plusieurs discours sur la sécurisation de la frontière entre les États-Unis et le Mexique lors de rassemblements à travers le pays, et les républicains considèrent cet enjeu comme un point fort du programme.
Mais ce n’est pas seulement la frontière sud qui est en jeu: certains législateurs de droite regardent aussi vers le nord. L’ancienne gouverneure de la Caroline du Sud Nikki Haley, qui doit prendre la parole à la convention mardi, fait partie de ceux qui réclament des mesures plus strictes à la frontière canadienne.
Mme Haley était la dernière grande rivale de M. Trump lors des primaires de cette année et ne figurait pas initialement sur la liste des orateurs, mais elle a confirmé qu’elle prendrait la parole lors de la convention de Milwaukee quelques heures après l’attentat contre M. Trump samedi.
«Le président Trump m’a demandé de m’adresser à cette convention au nom de l’unité», a-t-elle déclaré à la foule présente à la convention.
Les craintes concernant la sécurité des frontières ne sont pas réservées au seul modèle politique américain. Les demandeurs d’asile ont également été évoqués lors de la réunion des premiers ministres provinciaux à Halifax, lors de la réunion du Conseil de la fédération.
Le premier ministre du Québec, François Legault, avec le soutien de la première ministre de l’Alberta, Danielle Smith, a déclaré qu’il était clair que la situation actuelle dans sa province devait changer. Selon lui, quelque 190 000 demandeurs d’asile entrent désormais au Québec chaque année. «L’avenir du français sur l’île de Montréal est en jeu», a expliqué M. Legault.
Au cours de sa première présidence, les politiques de Donald Trump en matière d’immigration et de réfugiés ont contribué à un flux plus constant de personnes entrant au Canada, le plus grand nombre arrivant au chemin Roxham, un passage non officiel entre l’État de New York et le Québec.
L’Accord sur les tiers pays sûrs entre le Canada et les États-Unis signifie que les gens ne peuvent pas demander l’asile après avoir traversé légalement la frontière, car chaque pays considère l’autre comme un endroit sûr.
Mais une faille a permis à de nombreuses personnes qui contournaient les passages officiels de présenter une demande d’asile. Près de 60 000 personnes l’ont fait après être arrivées au Canada en provenance des États-Unis entre 2017 et 2020, dont environ 40 % étaient des résidents américains au statut précaire.
L’augmentation du volume s’est poursuivie même après la fin de la présidence Trump.
En 2023, le premier ministre Justin Trudeau et le président Joe Biden ont décidé de combler une lacune dans leur accord bilatéral, mais malgré une diminution du nombre de demandes d’asile – 15 000 en 2023, contre 40 000 en 2022 –, le gouvernement du Québec a continué de tirer la sonnette d’alarme.
Dynamique «nous contre eux»
Allison Prasch, professeure agrégée à l’Université du Wisconsin, a déclaré qu’il n’était pas rare que des partis politiques fassent campagne sur la sécurité ou l’immigration clandestine.
«Les citoyens veulent croire que leur gouvernement assurera leur sécurité», a déclaré l’experte en rhétorique présidentielle américaine. «Je pense que c’est un désir qui transcende les partis politiques.»
Se concentrer sur la criminalité et l’immigration illégale crée une dynamique «nous contre eux» qui peut être un outil puissant pour gagner du soutien. Tout ce que M. Trump a fait, c’est d’intensifier cette rhétorique, a déclaré Mme Prasch: «Il était juste prêt à dire tout haut ce que certains pensaient tout bas».
Depuis la tentative d’assassinat survenue samedi en Pennsylvanie, un nouveau discours se construit autour de l’ancien président, a-t-elle expliqué: face à la violence, aux problèmes de sécurité et à la criminalité, M. Trump se tient debout.
«Il peut s’élever au-dessus du chaos, littéralement et métaphoriquement, a déclaré la professeure Prasch.
«Si vous êtes venus ici illégalement sous Joe Biden, vous retournerez d’où vous venez sous Donald Trump», a déclaré Jim Banks, candidat républicain au Sénat, sous des applaudissements mardi soir.
M. Trump ne doit officiellement prendre la parole à la convention que jeudi, mais il est apparu pendant une partie de la nuit de lundi à mardi, l’oreille droite couverte d’un bandage blanc.
Les autorités ont confirmé que l’oreille de M. Trump avait été transpercée par une balle lorsqu’un homme armé d’une arme d’assaut a tiré depuis un toit près d’un rassemblement samedi après-midi. Un participant au rassemblement a été tué et deux autres grièvement blessés, avant que le tireur ne soit abattu par un membre des services secrets.
Le républicain Billy Pollard a affirmé que la force de M. Trump face au danger lui permettrait de remporter l’élection présidentielle.
«C’est terminé. Il a déjà gagné, s’est exclamé Billy Pollard. Nous ne faisons que nous réjouir et nous sommes gentils.»
M. Trump a appelé à l’unité dans des messages publiés sur les réseaux sociaux depuis la fusillade, mais les orateurs de la convention ont adopté une approche plus énergique et antagoniste pour critiquer les démocrates et M. Biden.
Le sénateur du Texas Ted Cruz a prononcé un discours enflammé, citant les noms de femmes récemment tuées, affirmant que les politiques de M. Biden avaient provoqué «une invasion à notre frontière sud».
Lundi soir, à l’issue de la première journée de la convention, le président du Comité national républicain, Michael Whatley, a lancé devant une foule en délire: «Nous devons faire preuve de la même force et de la même résilience que le président Donald Trump!».
Lundi aura été un grand jour pour cette convention républicaine: Donald Trump a été officiellement élu candidat à la présidentielle de 2024 et il a dévoilé l’identité de son colistier pour la campagne, le sénateur de l’Ohio J. D. Vance.
Tout se déroulait comme prévu à Milwaukee, malgré le malaise qui a suivi la fusillade, alors que des mesures de sécurité serrées et une présence policière renforcée ont pris le contrôle de la ville du Wisconsin.
M. Trump a lancé un appel à l’unité dans ses publications sur les réseaux sociaux depuis la fusillade, mais certains orateurs à la convention ont adopté une approche énergique et accusatrice dans leurs critiques des démocrates et du président Joe Biden.
«Ils ont promis l’unité et ont semé la division, a lancé la représentante Marjorie Taylor Greene. Ils ont promis la paix et ont provoqué la guerre. Ils ont promis la normalité et nous ont offert la Journée de la visibilité transgenre le dimanche de Pâques.»
La Journée de la visibilité transgenre est célébrée le 31 mars depuis 2009, mais le dimanche de Pâques tombait ce jour-là cette année, ce qui a provoqué un tollé parmi certains internautes.
Le Wisconsin fait partie de la poignée d’États qui devraient être le champ de bataille important lors des élections de novembre.
En 2016, le Wisconsin a voté républicain lorsque M. Trump a remporté la victoire. Mais en 2020, l’État est devenu démocrate et a contribué à faire entrer Joe Biden à la Maison-Blanche.