À l’approche des élections d’automne, faut-il craindre pour la démocratie canadienne?

Chuck Chiang, La Presse Canadienne
À l’approche des élections d’automne, faut-il craindre pour la démocratie canadienne?

Lors des cérémonies marquant le 80e anniversaire du jour J en France il y a un mois, le premier ministre canadien, Justin Trudeau, a lancé un avertissement sur l’état de la démocratie. Elle est, a-t-il déclaré, «toujours menacée aujourd’hui (…) menacée par des agresseurs qui veulent redessiner les frontières. Elle est menacée par la démagogie, la désinformation, la désinformation, l’ingérence étrangère».

Alors que les Canadiens sont prêts à se rendre aux urnes lors d’au moins trois élections provinciales cet automne et à un vote fédéral prévu l’année prochaine, la démocratie canadienne est-elle réellement menacée ? Les politologues affirment que même si la politique et les institutions canadiennes sont confrontées à une myriade de préoccupations, la situation n’est pas désastreuse dans l’ensemble.

Certaines des préoccupations les plus importantes découlent d’allégations d’ingérence étrangère.

Le chef conservateur, Pierre Poilievre, a accusé M. Trudeau «d’agir contre les intérêts du Canada» pour sa façon de traiter les allégations, tandis que le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD), Jagmeet Singh, a déclaré que M. Trudeau avait envoyé un message selon lequel il était «prêt à accepter une certaine quantité d’ingérence étrangère», affaiblissant la démocratie et sapant la confiance des Canadiens.

Justin Trudeau et le NPD ont, quant à eux, accusé les conservateurs de saper les institutions démocratiques en tentant d’évincer le président de la Chambre des communes, Greg Fergus, en mai.

Il y a également eu une attaque de cybersécurité en avril contre les adresses électroniques du gouvernement de la Colombie-Britannique, qui, selon la province, était probablement l’œuvre d’un acteur «étatique ou parrainé par l’État».

Le premier ministre David Eby a demandé ce mois-ci à M. Trudeau l’accès aux informations de l’agence d’espionnage canadienne pour aider à protéger la population de la province et ses institutions démocratiques.

La Colombie-Britannique se rendra aux urnes le 19 octobre, tandis que les élections au Nouveau-Brunswick auront lieu deux jours plus tard et celles de la Saskatchewan auront lieu le 28 octobre. En Nouvelle-Écosse, le premier ministre, Tim Houston, a semé le doute quant à savoir si des élections auraient lieu l’été prochain, au milieu des spéculations sur des élections anticipées.

Le Canada fait bonne figure dans le monde

Dans un rapport de 2023 de l’organisme de surveillance de la démocratie Freedom House, le Canada a obtenu une note presque parfaite de 98 sur 100, perdant des points uniquement en raison du projet de loi 21 du Québec qui interdit à certains employés du gouvernement de porter des symboles religieux et des inégalités auxquelles sont confrontées les communautés autochtones et noires.

Le projet allemand d’indicateurs de gouvernance durable a classé la qualité de la démocratie canadienne au 10e rang mondial, soulignant encore une fois les inégalités avec les communautés autochtones ainsi que les réunions «d’argent contre accès» entre politiciens et donateurs comme sujets de préoccupation.

La pression de la polarisation

Patrick Fafard, professeur de sciences sociales à l’École supérieure d’affaires publiques et internationales de l’Université d’Ottawa, a déclaré que même si les classements internationaux sont encourageants, il est clair que certains domaines doivent être abordés pour maintenir une démocratie de haute qualité.

M. Fafard a affirmé que l’un des changements les plus visibles dans la politique canadienne est la pression croissante exercée sur les politiciens pour qu’ils s’engagent dans une rhétorique partisane à court terme, à la recherche de l’actualité, qui non seulement ronge la confiance du public dans le gouvernement, mais peut également être sujette à désinformation.

«Je pense pouvoir dire en toute confiance que je suis plus inquiet aujourd’hui que je ne l’aurais été il y a, disons, 10 ou 20 ans, a affirmé M. Fafard. Il existe un défi constant que les politiciens sont tentés de relever en brandissant des slogans et en proposant des solutions simples, mais les problèmes sont complexes.»

«La controverse actuelle sur l’ingérence étrangère en est un merveilleux exemple», a-t-il mentionné.

Le problème «ne peut pas être résolu en pointant du doigt et en essayant de répartir les responsabilités», a-t-il illustré. Et c’est une question différente que savoir comment puis-je tirer parti de cela à mon avantage à court terme ?»

Robert Bothwell, professeur émérite d’histoire à l’Université de Toronto, a déclaré que le langage colérique utilisé dans la politique canadienne ne devrait pas être inquiétant. Ce n’est pas un phénomène nouveau, a-t-il rappelé, et d’autres périodes ont connu des discours encore plus controversés.

L’influence du sud

M. Fafard a reconnu que la rhétorique et la désinformation motivées par le populisme ne sont pas nouvelles – ce qui est nouveau, c’est qu’elles sont «coordonnées et financées d’une manière que nous n’avons jamais vue auparavant». De telles tendances ailleurs – en particulier lors de l’élection présidentielle américaine de novembre – influencent également le paysage politique canadien, a-t-il ajouté.

Il a toutefois souligné que le Canada ne semble pas avoir le même niveau de cynisme à l’égard des institutions publiques et que des tensions similaires sur la démocratie ne devraient pas apparaître à court et à moyen terme.

— Avec des fichiers de The Associated Press.

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