Carbone: les conservateurs exigent que les libéraux publient leur rapport «secret»

Mia Rabson, La Presse Canadienne
Carbone: les conservateurs exigent que les libéraux publient leur rapport «secret»

OTTAWA — Les conservateurs exigent que les libéraux publient ce qu’ils appellent un «rapport secret» qui prouve que la tarification du carbone nuit aux familles canadiennes, alors que le gouvernement affirme que cela n’existe tout simplement pas.

Il s’agit d’une série de documents sur l’impact économique de la tarification du carbone fournis par Environnement et Changement climatique Canada au bureau parlementaire du budget en mai.

Ils ont été demandés par le directeur parlementaire du budget (DPB) alors qu’il commençait à refaire sa propre analyse de la tarification du carbone, après avoir dû admettre récemment que ses rapports de 2022 et 2023 étaient erronés.

Ces deux rapports indiquent que même si les familles reçoivent plus d’argent en remises sur le carbone qu’elles ne paient directement en tarification, ces avantages sont effacés une fois que les impacts économiques plus larges sur la productivité et les salaires sont pris en compte. L’analyse était uniquement censée examiner l’impact économique de la tarification du carbone des consommateurs, mais elle a également inclus le prix du carbone industriel, connu sous le nom de système de tarification fondé sur le rendement.

L’erreur a été discrètement signalée sur le site Web du DPB en avril, mais est restée inaperçue pendant près d’un mois. Le directeur parlementaire du budget, Yves Giroux, s’est excusé pour cette erreur et pour ne pas avoir été plus transparent envers les députés à ce sujet.

Mais il insiste sur le fait que cela ne fera aucune différence et que la nouvelle analyse, attendue à l’automne, en viendra aux mêmes conclusions.

Le ministre de l’Environnement, Steven Guilbeault, s’est dit cette semaine «quelque peu troublé» par le fait que M. Giroux tire une telle conclusion avant que les chiffres appropriés soient établis.

Lors d’une comparution devant un comité de la Chambre des communes lundi, M. Giroux a déclaré qu’il était à l’aise avec une telle hypothèse parce que le gouvernement a produit une analyse qui le prouve, mais qu’il ne la rendra pas publique.

Il répondait aux questions du député libéral Ryan Turnbull, secrétaire parlementaire aux Finances, sur la façon dont il peut supposer que le nouveau rapport en arrivera aux mêmes conclusions.

«Nous savons, et je ne doute pas de M. Turnbull, que le gouvernement a ces chiffres sur l’impact économique de la tarification du carbone, a soutenu M. Giroux. Donc, la tarification du carbone et le système de tarification fondé sur le rendement, c’est l’affaire de votre gouvernement, monsieur, mais il n’a rien publié pour l’instant.»

Plus tard, interrogé par le député conservateur Marty Morantz, M. Giroux est allé encore plus loin, affirmant que le gouvernement avait ordonné à son bureau de ne pas divulguer les chiffres, mais que ceux-ci confirment les conclusions des deux rapports erronés du DPB.

«Nous avons vu cela, le personnel de mon bureau (l’a vu), mais on nous a dit explicitement de ne pas le divulguer ni d’y faire référence, a-t-il déclaré. Cela confirme pour l’essentiel le rapport que nous avons publié et c’est pourquoi je suis à l’aise avec ce que nous avons déjà publié.»

Une affirmation qualifiée de «scandaleuse»

Mercredi, lors de la période des questions, le chef conservateur Pierre Poilievre a demandé au gouvernement de dévoiler le rapport.

«Nous découvrons maintenant qu’il existe un rapport secret démontrant que, compte tenu des coûts économiques, la grande majorité des Canadiens paient davantage. Le gouvernement va-t-il mettre fin au silence, mettre fin à la dissimulation de la tarification du carbone et publier le rapport?»

M. Guilbeault n’était pas présent à la période des questions, mais dans une déclaration écrite, il a qualifié de «scandaleuse» l’affirmation selon laquelle le gouvernement bâillonne le DPB.

«Il s’agit d’une tentative désespérée de la part du Parti conservateur de détourner l’attention du fait qu’il a fondé ses communications au cours de la dernière année sur un rapport erroné, a-t-il lancé. S’il s’agissait de documents secrets, pourquoi les aurions-nous fournis au responsable économique indépendant afin qu’il puisse publier un rapport à ce sujet? Cela n’a aucun sens.»

Cependant, une lettre du sous-ministre de l’Environnement, Jean-François Tremblay, adressée au DPB le 14 mai, fournissant les documents en question, indique explicitement que les données ne devraient pas être rendues publiques.

«Les données fournies par le ministère contiennent des informations non publiées. À ce titre, je vous demande de veiller à ce que ces informations soient utilisées uniquement à des fins internes et ne soient pas publiées ou distribuées davantage.»

M. Guilbeault a dit que les informations fournies étaient des «ensembles de données brutes» et non des analyses. Il a ajouté qu’elles contenaient parfois des données privées sensibles.

«Environnement et Changement climatique Canada, comme tous les ministères du gouvernement, donne régulièrement au directeur parlementaire du budget un accès privilégié à de vastes ensembles de données pour l’aider à créer des analyses de haute qualité», a-t-il souligné.

Un responsable du DPB a confirmé que les informations étaient sous la forme de feuilles de calcul et non d’une analyse écrite.

La lettre de M. Tremblay mentionne que les données incluent «l’impact de la tarification du carbone» sur le PIB national et provincial entre 2022 et 2030, ainsi que l’impact sur le capital d’investissement et les revenus du travail pour la même période.

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